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Rixes : "La seule manière de se valoriser, c’est en se battant", déplore Adama Camara, "bagarreur repenti"

Adama Camara a fondé l'association "Sada", du nom de son frère cadet, tué dans une risque à Garges-lès-Gonesse dans le Val d'Oise en 2011.
Article rédigé par franceinfo
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Adama Camara, fondateur de l'association de lutte contre les rixes "Sada", lors d'une intervention dans une école de Corbeil-Essonnes (Île-de-France) le 7 avril 2023. (ALAIN JOCARD / AFP)

"La seule manière de se valoriser, c’est en se battant", déplore Adama Camara qui réagissait sur France Bleu Paris mercredi 6 décembre, à la mort lundi de Kendy d’un coup de couteau à Domont dans le Val-d’Oise. Adama Camara se présente comme un "bagarreur repenti". En 2011, son petit frère Sada meurt dans une bagarre devant la gare de Garges-lès-Gonesse dans le Val-d'Oise. Pendant trois ans, il veut se venger et guette ses agresseurs. En 2014, il leur tire dessus. Ils sont blessés et Adama Camara est envoyé en prison pendant 5 ans et demi. À sa sortie de prison, il va à la rencontre des jeunes partout en région parisienne pour dialoguer et mettre fin aux rixes, avec son association "Sada". Aujourd’hui surnommé "le Pasteur", il est devenu le porte-parole de ce combat contre les rixes.

Un manque "de valorisation" des jeunes des quartiers

Adama Camara estime que ces rixes et phénomènes de guerre de territoire conduisent aussi à la déscolarisation de certains jeunes. "Il y a des jeunes qui ne peuvent plus aller à l’école, parce qu’ils sont dans un territoire pour eux ennemi. Ils sont en train de gâcher leur vie pour rien parce que les raisons sont futiles", déplore Adama Camara. Avec son association, Adama Camara essaie de faire comprendre aux jeunes qu'ils ne sont pas "obligés" de participer à des rixes en solidarité avec leurs amis. "Qu’est-ce qui les oblige d’être dans les rixes ? Il n’y a pas assez de valorisation autour de cette jeunesse. La seule manière de se valoriser, c’est en se battant. Quand on se bat, on se fait un nom, et quand on se fait un nom, pour eux, on se fait respecter. Mais je leur fais comprendre que le respect ne passe pas par la violence."

Je leur parle des conséquences : demain tu meurs, c’est ta famille qui va pleurer. Ta famille va souffrir."

Adama Camarra, fondateur de l'association "Sada"

franceinfo

Le responsable associatif constate aussi une montée de la violence dans ces rixes. "C’est terrible les réseaux sociaux. Ce qui a changé aujourd’hui, ce sont les armes. Il y a dix ou vingt ans en arrière, c’était rare que quelqu’un sorte un couteau. Aujourd’hui si on fouille le sac de beaucoup de gamins qui vont à l’école, je pense qu’on va être surpris en fin de journée, alerte Adama Camara. Je ne dis pas qu’il faut les fouiller, mais il faut être vigilant car beaucoup de jeunes traînent avec des couteaux et pendant mes interventions me disent : 'Bah, moi avec un couteau je me protège'. On ne se protège pas avec un couteau, il faut le dire, même si dix jeunes te tombent dessus et que tu mets des coups de couteau, tu vas aller en prison pour assassinat ou pour meurtre."

Selon lui, il n'y a que "trois issues : le handicap, la mort ou la prison, c’est la réalité. Et des familles brisées". Dans sa série "Rixes", Adama Camara filme des parents devant la tombe de leur enfant, qui témoignent de leur douleur. "Aucune famille n’est préparée à la mort d’un proche. Demain tu meurs, ta famille meurt avec toi, tu vas en prison, ta famille va en prison avec toi".

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