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Témoignages "Ça peut motiver", "humiliation"... La question du "tabou" du redoublement à l'école divise les enseignants

Le ministre de l’Éducation a prévenu : il veut lever "le tabou du redoublement" et doit faire des annonces, mardi. Si le nombre de redoublements a considérablement chuté depuis les années 1980, cette mesure est loin de faire consensus chez les enseignants que franceinfo a rencontrés.
Article rédigé par Noémie Bonnin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un cours de mathématiques au collège Val de Nièvre à Domart-en-Ponthieu, dans la Somme, le 4 décembre 2023. (FRED HASLIN / MAXPPP)

Dans son collège de Dordogne, classé en éducation prioritaire, cet enseignant d'histoire-géographie n'a pas vu beaucoup de redoublements l'an dernier : "Zéro. Purement et simplement. Et cela fait des années que je n'ai pas vu un redoublement dans l'établissement où je suis". Quand il a commencé à travailler, il y a 26 ans, c'était beaucoup plus fréquent. Aujourd’hui, seuls 3% des élèves ont redoublé au moins une classe en fin de CM2 alors qu'ils étaient 33% en 1987. Le taux de redoublement a en effet chuté en France depuis les années 1980. 

Le redoublement, dont la France a longtemps été la championne, n'a jamais été interdit, mais simplement rendu exceptionnel en 2014 par un décret de la ministre d'alors, Najat Vallaud-Belkacem. Mais fin 2023, le ministre de l'Éducation a déclaré devant le Medef vouloir revoir la "question du tabou du redoublement". Gabriel Attal doit d'ailleurs faire une série d'annonces mardi 5 décembre afin d"élever le niveau" scolaire. Pourtant, le sujet du redoublement fait encore aujourd'hui débat dans le corps enseignant. 

Pour ce professeur d'histoire-géographie en Dordogne, sans que ce soit la solution miracle pour tous les élèves, le redoublement peut être utile pour les jeunes en difficulté, mais aussi pour en motiver un certain nombre. 

"C'est l'effet épouvantail, la "menace" qui est brandie vis-à-vis de beaucoup d'élèves" 

Un professeur d'histoire-géographie

à franceinfo

"On leur dit : 'Attention, si tu ne travailles pas, tu risques de redoubler', explique-t-il. Ça, ça peut motiver effectivement les élèves qui feraient preuve d'une certaine fainéantise et qui ne voient pas trop l'intérêt de se fatiguer s'ils sont sûrs et certains de passer dans le niveau supérieur, tout en n'ayant pas fichu grand-chose de l'année". 

D'autres professeurs, ou chefs d'établissement aussi, y voient un intérêt quand c'est lié à l'orientation, comme en fin de 3e par exemple, quand un jeune veut absolument passer en seconde générale. Pourtant, pour Marianne, professeur expérimentée de SVT, le redoublement est trop souvent vécu comme une humiliation. "J'ai des exemples d'élèves qui ont fait vraiment moins bien la deuxième année que la première", indique-t-elle. 

"Ils ont tout laissé tomber, ça les a découragés, démotivés..."

Marianne, professeur de SVT

à franceinfo

"Si on a un élève, qui arrive en 4e, on lui dit de redoubler, il se retrouve avec ceux qu'il considérait comme les petits, donc il se met au fond de la classe, il ne fait rien. Et puis, il s'isole, voire il ne vient plus, il commence à décrocher. Les exemples sont fréquents", poursuit-elle. 

À l'école primaire aussi, le redoublement est proposé en tout dernier recours. Gaëlle enseigne dans le Morbihan et selon elle, ce n'est que très rarement efficace : "J'ai rarement vu d'effet positif. On a des enfants qui arrivent d'autres écoles et qui ont déjà un an de retard et souvent, ils sont toujours en difficulté. Ça n'a pas résolu le problème de la difficulté scolaire. Moi, je pense que ce qui serait plus efficace, c'est qu'au sein de l'école, on ait encore des enseignants spécialisés, à l'image des 'Rased' [Réseau d'aide spécialisée aux élèves (maternelle et primaire) en difficulté] qu'on avait avant. Ils venaient dans les écoles, ils prenaient des enfants en petits groupes en fonction de leurs difficultés. Et on n'a plus ça". 

Redoublement ou pas, tous ces enseignants se retrouvent en tout cas sur l'importance des moyens consacrés à l’accompagnement des élèves, avec notamment des effectifs par classe plus réduits pour pouvoir aider les jeunes qui en ont besoin. 

Les enseignants divisés sur la question du redoublement : le reportage de Noémie Bonnin

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