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Non, le Conseil constitutionnel n'a pas donné son feu vert à la fessée

Dans une décision publiée jeudi, les Sages ont retoqué une disposition de la loi Egalité et citoyenneté portant sur les violences corporelles infligées aux enfants.

Article rédigé par franceinfo
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La décision du Conseil constitutionnel rendue le 26 janvier 2017 n'équivaut pas à un permis de fesser donné aux parents. (SEBASTIEN JARRY / MAXPPP)

"C'est un très mauvais coup contre la prévention des maltraitances faites aux enfants." La ministre des Familles, Laurence Rossignol, a fait part de sa "déception", vendredi 27 janvier, sur LCI, au lendemain de la censure par le Conseil constitutionnel d'une mesure devant lutter contre les violences corporelles des parents envers leurs enfants.

Cette décision du Conseil constitutionnel a donné lieu à des interprétations variées, allant jusqu'à une "réhabilitation de la fessée". Franceinfo revient en trois questions sur la portée réelle de cette censure législative.

Que contient la mesure retoquée ?

L'article 222 de la loi Egalité et citoyenneté, adoptée le 23 novembre 2016, porte sur la question de l'autorité parentale, et plus précisément sur la façon dont elle est définie dans l'article 371-1 du Code civil. Voici, en gras, la modification prévue par rapport à la formulation initiale de cet article : "[L'autorité parentale] appartient aux parents jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne et à l’exclusion de tout traitement cruel, dégradant ou humiliant, y compris tout recours aux violences corporelles."

En décembre 2016, après l'adoption de la loi, l'avocate en droit de la famille Myriam Mouchi estimait que cette mesure avait "surtout une portée symbolique et morale". Quels changements l'article allait-il entraîner ? Le texte serait "lu par le maire lors des célébrations des mariages" et "porté aux livrets de famille", indiquait l'avocate à L'Express. Il s'agissait également d'une forme de réponse au Conseil de l'Europe et à l'ONU, qui reprochaient à la France de n'avoir pas interdit clairement toute forme de châtiment corporel envers les enfants.

Que dit le Conseil constitutionnel ?

Dans sa décision publiée jeudi, le Conseil constitutionnel estime que l'article 222 de la loi Egalité et citoyenneté "ne [présente] pas de lien, même indirect," avec le contenu initial de la loi. Or, toute disposition ajoutée à un projet de loi doit porter sur un sujet déjà inclus dans le texte. Les Sages ont donc pointé un "hors-sujet" et considéré que l'article 222 avait été adopté "selon une procédure contraire à la Constitution". Résultat : les modifications prévues par cet article "sont donc contraires" à la Constitution.

Les membres du Conseil constitutionnel ne se sont pas prononcés sur le fond, c'est-à-dire sur la question des violences corporelles infligées aux enfants par leurs parents. Ils se sont contentés d'examiner la forme du texte de loi et ont repéré cet écart commis par les parlementaires.

La fessée est-elle autorisée ?

La décision du Conseil constitutionnel n'équivaut pas à un permis donné aux parents de fesser leurs enfants turbulents. Elle signifie simplement que le droit applicable reste le même qu'avant et qu'il ne faut pas tenir compte de la modification prévue par l'article 222.

Quel est donc ce droit ? Comme l'indiquait la magistrate Judge Marie sur franceinfo dès 2014, il faut se tourner vers l'article 222-13 du Code pénal, qui réprime toute violence commise sur la personne d'un mineur de moins de 15 ans. Cet article concerne notamment les violences "éducatives" comme la fessée. Ces dernières sont donc bien passibles de poursuites pénales, même si, comme l'écrivait Judge Marie, "la jurisprudence a pu dans certaines hypothèses admettre un 'droit de correction'". Tout est à l'appréciation du juge.

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