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Ce qu'il faut retenir du rapport de l'ONU sur les inégalités femmes-hommes au travail, bien pires qu'attendues

Selon cette étude, 15% des femmes qui sont en âge de travailler dans le monde souhaiteraient travailler, mais sont sans emploi, contre 10,5% des hommes.
Article rédigé par Valentine Pasquesoone
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Des femmes travaillent dans un atelier de fabrication de montres à Ernolsheim-lès-saverne (Bas-Rhin), le 27 octobre 2021. (MAXPPP)

Les inégalités entre les femmes et les hommes dans le monde du travail sont "plus importantes qu'on ne le pensait jusque-là". Telle est la conclusion tirée par un rapport (document PDF en anglais) de l'Organisation internationale du travail (OIT), publié lundi 6 mars, deux jours avant la Journée internationale des droits des femmes. L'agence de Nations unies souligne "les déséquilibres" à la fois "dans l'accès à l'emploi" et "les conditions de travail", "en particulier dans les pays en développement". L'OIT déplore également des progrès trop lents.

Pour arriver à cette conclusion, l'agence onusienne a développé un nouvel indicateur : le déficit d'emplois, qui prend en compte "toutes les personnes sans emploi qui souhaitent en trouver un". A l'aide de cet outil, l'ONU dresse "un tableau beaucoup plus sombre de la situation des femmes dans le monde du travail que le taux de chômage, plus couramment utilisé". Accès à l'emploi, écarts entre régions, inégalités salariales… Voici quatre informations à retenir de cette nouvelle étude. 

1 Un écart plus élevé que prévu dans l'accès à l'emploi

"Les nouvelles données montrent que les femmes ont toujours beaucoup plus de mal à trouver un emploi que les hommes", souligne l'ONU, se basant sur ce nouvel indicateur du déficit d'emplois. L'OIT rappelle qu'une personne est considérée comme demandeuse d'emploi si elle a récemment recherché un travail, et si elle est disponible pour commencer un nouvel emploi rapidement.

Or des femmes ne peuvent remplir ces conditions et donc être considérées comme demandeuses d'emploi, "du fait de leur implication disproportionnée" dans les tâches domestiques, de garde d'enfants et d'aide aux proches − un travail non rémunéré, pointe l'OIT. Certaines femmes sont par exemple disponibles pour travailler, mais elles manquent de temps pour chercher activement un emploi, ce qui les exclut des statistiques officielles du chômage. 

En prenant en compte ces freins dans l'accès des femmes à l'emploi, l'agence est parvenue à "des estimations beaucoup plus élevées de la sous-utilisation de la main d'œuvre", et de l'écart entre femmes et hommes dans le monde du travail. Dans l'ensemble, 15% des femmes qui sont en âge de travailler dans le monde souhaiteraient travailler, mais sont sans emploi, contre 10,5% des hommes. "Cet écart entre les genres est resté pratiquement inchangé pendant deux décennies", entre 2005 et 2022, relève l'OIT.

2 Des écarts plus importants dans les régions plus pauvres 

Ce déficit d'emplois dans le monde varie considérablement selon le niveau de revenus des pays. Dans l'ensemble, il augmente "à mesure que le revenu national diminue", "tout comme l'écart entre les femmes et les hommes". Dans les pays développés aux niveaux de revenus élevés, 9,6% des femmes souhaiteraient travailler, mais sont sans emploi, contre 7,4% des hommes. Dans les pays à revenu intermédiaire inférieur – une classification de la Banque mondiale – 17,4% des femmes ne parviennent pas à accéder à l'emploi, contre 11% des hommes.

Le pire déficit d'emplois est observé dans les pays à faible revenu. Dans ces Etats, la part des femmes qui veulent travailler, mais n'ont pas d'emploi atteint 24,9%, contre 16,6% pour les hommes.

3 Des résultats "inquiétants" sur les disparités salariales

Ces écarts en fonction des niveaux de revenus des pays se retrouvent également dans les inégalités salariales entre femmes et hommes. Sur ce point, l'Organisation internationale du travail alerte sur les résultats "inquiétants" de ses recherches. En 2019, quand un homme gagnait un dollar de revenu du travail, une femme gagnait en moyenne 51 centimes dans le monde. Dans les pays à revenus faibles, les femmes perçoivent en moyenne 33 centimes pour un dollar gagné par des hommes. L'écart est encore pire dans les Etats aux revenus intermédiaires inférieurs : les revenus du travail des femmes y sont de 29 centimes par dollar perçu par les hommes. Ces disparités sont moins importantes dans les pays à revenu élevé, mais restent néanmoins très élevées : les femmes y gagnent 58 centimes contre un dollar pour les hommes. 

Pour comprendre cette "disparité frappante" entre les revenus du travail des femmes et des hommes, l'OIT explique notamment que "les femmes ont tendance à être surreprésentées dans certains types d'emplois vulnérables". "Par exemple, les femmes sont plus susceptibles d'aider leur ménage ou l'entreprise de leurs proches que d'occuper un emploi indépendant. Cette vulnérabilité, associée à des taux d'emploi plus faibles, a des répercussions sur les revenus des femmes." 

4 La maternité, "facteur de plus faible participation" au marché du travail

Le fait d'avoir des enfants et de les élever reste "un facteur majeur qui réduit la participation des femmes au marché du travail dans le monde", regrette l'OIT dans cette nouvelle étude. Parmi les 25-54 ans, l'écart entre femmes et hommes dans la participation au marché du travail était de 29,2 points de pourcentage l'an dernier. Mais cet écart s'élève à 42,6 points de pourcentage pour les 25-54 ans ayant au moins un enfant âgé de moins de six ans. Dans ce groupe, la participation des femmes est de 53,1%, contre 95,7% pour les hommes. 

Une nouvelle fois, il existe des variations importantes selon les niveaux de revenus des pays. Dans les Etats aux revenus intermédiaires supérieurs, les mères participent près de 20% de moins que la moyenne au marché du travail parmi les 25-54 ans. Cette disparité est bien plus faible dans les pays aux revenus intermédiaires inférieurs (4,3%) et dans les pays à faible revenu (5,4%).

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