Commémoration de l'abolition de l'esclavage : des descendants d'esclaves sur la trace de leurs ancêtres
"En tout cas, ça me fait du bien de retrouver tout ça !" A chaque fois qu'elle remplit une case de son arbre généalogique imprimé sur une large feuille blanche, Chantal jubile. Il y a trois semaines, elle s'est décidée à entamer les recherches sur la famille de sa mère. Evelyne, de l'association antillaise CM98 (Comité marche 98, en référence à un défilé de plusieurs milliers de personnes à Paris en mémoire des victimes de l'esclavage), l'accompagne à Paris dans ses recherches.
"J'ai l'impression de renaître, de me retrouver : je suis remonté jusqu'en 1826, c'est-à-dire la grand-mère de ma grand-mère !"
Chantalà franceinfo
La mémoire de l'esclavage reste un enjeu. Mercredi 10 mai se tient à Paris une cérémonie à l'occasion de la Journée nationale des mémoires de la traite, de l'esclavage et de leurs abolitions, en présence de la Première ministre Elisabeth Borne. Dans les familles, l'esclavage reste un tabou."Trop souvent, on pense que les gens mis en esclavage étaient des lâches, explique Chantal, et c'est pour cela qu'on a du mal à accepter d'être originaires de ces personnes mises en esclavage. On a l'impression qu'ils ont accepté, alors que c'est faux."
L'initiative a été lancée il y a plus d'une vingtaine d'années et avec internet et la numérisation des actes d'état civil, les recherches sont plus simples. CM98 s'appuie sur les archives de l'Outre-mer et sur le site Anchoukaj, mot créole qui signifie affiliation. L'association a créé cette base de données en 2012. En 1848, au moment de l’abolition de l’esclavage, les esclaves ont reçu des noms de la part des officiers d’état civil français. Des patronymes que le CM98 répertorie petit à petit. Une quête intime dans la généalogie pour mieux comprendre l'histoire, qui intéresse toutes les générations.
"Notre spécificité, souligne Evelyne, c'est cette histoire, singulière, qui fait que beaucoup de jeunes se questionnent sur le fait d'être en France, d'être Noir en France. Et côtoyer d'autres communautés qui, elles, connaissent leur histoire, pousse parfois les jeunes à connaître la leur." C'est le questionnement de Gabriel, 19 ans. Son père est né en Guadeloupe et sa mère en Côte d'Ivoire. "J'ai fait des recherches de mon côté d'abord avant de venir ici. Je voulais absolument savoir vraiment d'où je venais, en savoir plus sur moi-même, témoigne-t-il. C'est une famille qui a été arrachée et je veux comprendre ce qui s'est passé. C'est une histoire douloureuse pour tous les descendants d'afros."
Pour remonter les décennies et pour retrouver les noms de ses aïeux esclaves dans les colonies, il suffit aux personnes intéressées de se munir d'un acte d'état civil de ses parents ou grands-parents.
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