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''Une atteinte à la vie privée et une atteinte au secret professionnel'' : des avocats ont été surveillés par le parquet national financier dans l'affaire des écoutes

Pendant six ans, à partir de 2014, le parquet a lancé une enquête sur les téléphones portables de ces avocats, pour tenter savoir qui fournissait d'éventuelles informations de procédure à Nicolas Sarkozy et à son avocat Thierry Herzog.

Article rédigé par franceinfo - Laure Debeaulieu
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Pierre-Olivier Sur, le 11 décembre 2019. (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

L'affaire, révélée par Le Point, fait beaucoup de bruit parmi les ténors du barreau parisien. Pendant six ans, à partir de 2014, le parquet a lancé une enquête sur les téléphones portables de plusieurs avocats pour tenter de savoir qui fournissait d'éventuelles informations de procédure à Nicolas Sarkozy et à son avocat Thierry Herzog dans l’affaire dite "des écoutes" qui touche l’ancien président. Lui et son avocat sont poursuivis pour avoir tenté d'obtenir des informations dans l'affaire Bettencourt.

Des avocats en relation avec l'affaire Sarkozy

Parmi les protagonistes, plusieurs avocats très connus, tous de près ou de loin en relation avec l’affaire Sarkozy : Éric Dupond-Moretti, Hervé Témime, Jacqueline Laffont, Jean Veil, des pénalistes de grands cabinets parisiens. Il y a aussi un magistrat et certaines lignes fixes du parquet financier. Les enquêteurs de l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières (OCLCIFF) ont épluché les fameuses fadettes, c’est-à-dire les relevés détaillés des communications téléphoniques, grâce auxquelles il est possible de savoir qui appelle qui.

Si certains de ces avocats ont un lien avec le dossier des écoutes de Nicolas Sarkozy, d’autres n’étaient que des connaissances de Thierry Herzog, l’avocat historique de l’ancien chef de l’État. C’est le cas de Marie-Alix Canu-Bernard. Elle est choquée que cette affaire ait été menée en catimini : ''Cela a été caché et n'avait pas vocation à sortir, indique-t-elle. Parce qu'à la limite, si on fait une enquête, tout est versé de façon très transparente à une procédure. Dont acte. Mais lorsque l'on cherche à le cacher pendant des années et à faire en sorte que ce soit sous le boisseau, c'est bien que c'était déloyal, sinon ça n'aurait pas été caché.''

Il y a non seulement une atteinte à la vie privée comme il n'y en aurait pour n'importe quel justiciable, mais également une atteinte à mon secret professionnel. Et cela sans autorisation, et surtout sans aucune motivation. C'est une folie !

Me Canu-Bernard

à franceinfo

Le but de ces écoutes était de découvrir une taupe éventuelle qui aurait averti Nicolas Sarkozy et son avocat qu’ils étaient sur écoute. Les deux hommes seront jugés au mois d'octobre pour corruption, trafic d'influence et violation du secret professionnel.   

Le bâtonnier de Paris en 2014, Pierre-Olivier Sur, a lui aussi été écouté. ''Dans cette affaire, finalement, il y a eu trois stades d'écoutes, explique-t-il. Les écoutes entre le président et son avocat. Les écoutes entre l'avocat et son bâtonnier, moi-même à l'époque, que nous avons fait annuler par la Cour de cassation. Et puis, troisième cercle, toutes les autres.'' ''Tout cela est absolument inacceptable ! Cela fait partie du marbre, non seulement des droits de la défense, mais de l'équilibre des libertés publiques. Ce d'autant que ce principe d'écoutes fonctionnait 'à filets dérivants' afin d'aller chercher des informations sur on ne sait quoi.''  Pour sa part Éric Dupond-Moretti annonce son intention de déposer plainte en début de semaine prochaine.

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