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Gymnases vétustes et stades hors d'âge: le sport scolaire et amateur dénonce

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Article rédigé par L'Oeil du 20 heures
France Télévisions
Alors que dans moins de huit mois, la France sera au centre de la planète olympique, l’état des gymnases et des stades fréquentés par les élèves et étudiants interroge. En trois ans, 500 millions d’euros de subventions ont bien été débloqués. Mais pour les écoliers, les étudiants et les professeurs que l’Oeil du 20 heures a rencontrés, c’est loin d’être suffisant.

Ce mardi matin, ils sont un peu plus d’une trentaine d’étudiants en filière STAPS (Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives) à s’entraîner sur la piste d'athlétisme de l’Université de Limoges. 

Et lors de cette séance de course de haie, les obstacles ne sont pas toujours ceux qu’on croit.

Alexandre Maleyrie, entraîneur de rugby et membre du collectif STAPS* se désole : "La piste est complètement endommagée, il y a des trous et des rustines partout, le tartan se décolle et le sol est aussi dur que du bitume".

"La piste, il y a des trous partout. C’est compliqué au niveau de la sécurité, on a peur de se faire mal."

Sarah Sompayrac, étudiante en licence STAPS

A L'Oeil du 20H

La piste de saut en hauteur, celle du saut en longueur sont elles aussi inutilisables. Elles sont aujourd'hui interdites pour des raisons de sécurité. Ce stade, construit dans les années 70 est aujourd’hui hors d’âge, en dépit des réparations. Dangereux même, pour certains étudiants : Là, on a eu une évaluation d’athlétisme. La piste, avec la mousse, ça glisse; Il y a des trous partout, c’est compliqué au niveau de la sécurité, on craint de se faire mal", confie Sarah Sompayrac, étudiante en licence STAPS.

Depuis trois ans, les professeurs alertent sur la dégradation des lieux et réclament une "intervention immédiate". Excédés, ils ont rejoint une pétition lancée par le collectif des étudiants en STAPS, et deux d’entre eux ont même démissionné de leurs fonctions administratives. I

"Toutes nos installations ont cinquante ans. Et là, de tous les côtés, on bouche les trous;"

Isabelle Klock-Fontanille, présidente de l'Université de Limoges

A l'Oeil du 20H

Contactée, la présidente de l’Université de Limoges, Isabelle Klock-Fontanille dit ne pas être directement responsable de la vétusté des équipements sportifs : “On n’est pas propriétaires de toutes ces installations. Ni locataires. Ces bâtiments nous sont affectés, c’est nous qui devons nous occuper de l’entretien. L’Etat ne nous donne pas d’argent pour l’entretien. Toutes nos installations ont cinquante ans. Et là, de tous les côtés, on bouche les trous."

Des installations sportives vieillissantes, il n’y en a pas qu’à Limoges. En 2022, une mission parlementaire faisait le point sur 272 000 équipements sportifs de notre pays. Son rapporteur, le député Renaissance de Moselle, Belkhir Belhaddad, relevait notamment : "près de 40% des équipements datent d’avant 1985, 61% ont plus de 25 ans et 70% n’ont jamais bénéficié de gros travaux."

Des infrastructures parfois vétustes, avec des inégalités selon les départements

À l’Oeil du 20h, nous nous sommes penchés sur les statistiques. Et selon nos calculs, avec 12,6 infrastructures pour 1000 élèves, le Haut-Rhin ou La Manche se situent dans la moyenne nationale. La Lozère est en tête du classement. Tandis qu'au fond de la classe, on trouve Paris mais aussi la Seine-Saint-Denis : 4,2 équipements pour 1000 élèves. 

En Seine-Saint-Denis, les infrastructures sont extrêmement sollicitées. À Bagnolet, par exemple, le plafond du gymnase de la Briqueterie est en partie effondré. "C'est en désuétude complète", déplore Serge Reitchess, ancien professeur d’EPS et membre du Collectif permanent de défense et de promotion de l’EPS (93). Créé en 1970, le terrain de rugby est quant à lui utilisé trois fois plus qu’il ne le devrait. La pelouse n'a pas résisté. "Cela n'émeut personne que des collègues fassent 20 minutes à pied, cherchent des installations sportives, fassent EPS dans la cour ou dans des conditions comme ça", lance Serge Reitchess, à quelques mètres d'une imposante flaque d'eau qui entrave la vieille piste d'athlétisme du complexe.

Depuis 2015, la municipalité de Bagnolet tente de financer la rénovation des lieux. Mais impossible d'assumer seul les 4,5 millions d’euros nécessaires aux travaux. Tony Di Martino, le maire (PS) de la commune dénonce le décalage avec l’ambition olympique à quelques kilomètres de là : "Il y a quelque chose qui manque, il va falloir que nous aussi dans nos territoires, on puisse bénéficier de l'effet JO et pas seulement concernant l'attractivité économique, mais aussi pour le financement de nos équipements."

Les rénovations de gymnases scolaires et de piscines municipales, grandes oubliées de Paris 2024 ?

Alors, comme le déplorent certains élus, les rénovations des gymnases scolaires et des piscines municipales sont-elles les grands oubliés de Paris 2024 ? Depuis trois ans, pourtant, le président de la République a lancé deux plans appelés “5000 terrains”. En plus de subventions existantes, 500 millions d’euros, dont 150 millions pour la rénovation ou construction de piscines ou d'enceintes sportives ont été débloqués.

Le député Renaissance de Saône-et-Loire, Benjamin Dirx, assure le suivi de ces programmes. Pour lui, l'effort va dans le bon sens. Le sport, qui à l'entendre, ne peut pas toujours être prioritaire. "On doit aussi faire pour nos hôpitaux, pour la justice, pour la gendarmerie, indique-t-il. Il faut bien faire des choix. L'État ne peut pas tout faire, partout et tout de suite." Contacté, le ministère des sports dit être conscient de la vétusté d'une "part importante des équipements sportifs" mais assure que le soutien aux collectivités territoriales a été renforcé ces dernières années.

PARMI NOS SOURCES

Quels équipements pour une nation sportive ? Mission parlementaire sur les équipements sportifs et les collectivités (Belkhir Belhaddad - Mars 2022)

Présentation du Plan « 5000 terrains de sport », annoncé par le Président de la République le 14 octobre 2021

Un nouveau plan intitulé « 5000 terrains de sport - Génération 2024 » pour engager d’ici à 2026 la construction ou la rénovation de 5 000 terrains de sport dans l’enceinte ou à proximité des établissements scolaires.

Emmanuel Macron promet 5000 terrains de sport supplémentaires d'ici fin 2026

La gouvernance du sport en France : ses atouts et ses défis

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