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VIH : "Aller se faire dépister, c'est rester en bonne santé", alerte la directrice générale de Sidaction

Florence Thune, directrice générale de Sidaction, rappelle mardi sur franceinfo que si "on meurt du sida en France", c'est parce que le dépistage n'a pas été assez rapide.

Article rédigé par franceinfo
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Un dépistage du VIH au CHU de Limoges, le 29 novembre 2021. (THOMAS JOUHANNAUD / MAXPPP)

Si le nombre de dépistage du VIH est reparti à la hausse en 2021, il n'a pas encore retrouvé son niveau d'avant Covid-19. Ce mieux est malgré tout "une bonne nouvelle", selon Florence Thune, directrice générale de Sidaction. En 2021, 29% des infections à VIH ont été découvertes à un stade avancé de l'infection, une proportion qui ne diminue pas depuis plusieurs années. 

franceinfo : Le nombre de dépistage du VIH remonte en 2021, est-ce une bonne nouvelle ?

Florence Thune : On doit considérer cela comme une bonne nouvelle, même-si on n'a pas retrouvé le niveau de 2019, c'est ce que l'on doit atteindre et même dépasser, c'est un challenge pour 2022.

La pandémie de Covid-19 continue donc à avoir un impact sur la lutte contre le Sida ?

Oui, elle continue même deux ans après. On avait mis en avant cette baisse en 2020 puisque on avait le confinement, avec des laboratoires qui étaient engorgés. Mais je pense que finalement, après deux ans de crise sanitaire, avec des laboratoires qui sont à nouveau ouverts au dépistage et avec une opération "Au labo sans ordo" qui a montré son succès, à travers laquelle les personnes peuvent aller dans n'importe quel laboratoire se faire dépister gratuitement et sans ordonnance, malgré cela, les dépistages ne sont pas remontés suffisamment.

Comment expliquez-vous ce retard qui peine toujours à être rattrapé par rapport à l'année 2019 ?

Je pense que c'est dû globalement à la perception de l'épidémie de VIH – indépendamment de la crise sanitaire, où les personnes se sentent de nouveau moins concernées par le VIH. On voit aussi que parmi les nouvelles découvertes de séropositivité, on reste, voire on a une légère hausse d'un nombre trop important de personnes qui découvrent leur séropositivité à un stade avancé, au stade sida.

On a effectivement un nombre de découverte de séropositivité qui se stabilise autour de 5 000 personnes et 29 % des infections au VIH sont découvertes à un stade avancé de l'infection. Cela ne diminue pas depuis plusieurs années. Pourquoi n'arrive-t-on pas à détecter plutôt ces infections ?

Aujourd'hui, on meurt du sida en France parce qu'on ne va pas assez rapidement vers le dépistage. Aller se faire dépister, c'est rester en bonne santé. Récemment, on a eu un échange avec un donateur du Sidaction qui a perdu son frère à 58 ans. Il n'avait jamais fait de tests de dépistage et il avait ignoré les quelques maladies qu'il avait eu et qui ne lui semblaient pas graves. Il y a toujours deux, voire trois raisons principales à cela : se dire que le VIH n'est plus là, ne nous concerne plus, se dire aussi que systématiquement, les médecins ou des centres de santé ne vont pas proposer ou ne vont pas oser proposer de tests de dépistage systématique.

On est vraiment sur une situation qui perdure autour de la question du VIH. On a peur d'aller se faire dépister, on reste sur des images très mortifères vis-à-vis du sida alors qu'aujourd'hui, grâce au traitement, on peut rester en bonne santé. Je pense qu'il faut vraiment encourager de manière globale, ne serait-ce que pour les médecins traitants de proposer à leurs patients des tests de dépistage réguliers.

Est-ce qu'il y a encore des idées reçues autour du VIH ?

De manière globale, on reste, voire on a une augmentation de ces fausses idées, notamment le fait de pouvoir être contaminé par le VIH en partageant un même verre d'eau, en embrassant une personne séropositive. Et là, effectivement, on a une augmentation de ces fausses idées qui augmentent la question de la discrimination. Or, aujourd'hui, on sait qu'une personne qui est sous traitement n'a aucun risque de transmettre le VIH une fois qu'elle est sous traitement efficace au travers d'une relation sexuelle, et donc encore moins en embrassant une personne ou en partageant le même verre d'eau.

Où en est la recherche aujourd'hui ?

Aujourd'hui, on connaît des grandes avancées qui sont faites en termes de traitement. Deux pistes sont importantes. C'est à la fois de pouvoir un jour atteindre un stade de rémission, c'est-à-dire espérer qu'un jour la recherche puisse identifier un traitement qui permettrait aux personnes de prendre un traitement une fois et d'être tranquille pour le restant de leurs jours. Aujourd'hui, je rappelle qu'on a des traitements qui sont efficaces en injection tous les deux mois, donc c'est déjà un progrès. Et puis, bien sûr, on continue à être sur la piste du vaccin qui nous donne beaucoup plus de fil à retordre que le vaccin anti-Covid. En tout cas, je pense qu'on verra sûrement, peut-être avant ce vaccin, des traitements plus espacés et puis aussi un accès plus important à la PrEP (prophylaxie préexposition), qui est cette pilule préventive qui arrive en plus du préservatif. Avec ces deux outils aujourd'hui, les personnes de toutes générations devraient pouvoir se protéger du VIH.

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