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Lutte contre l'alcool : des mesures "bien en deçà de la gravité du problème"

Un groupe d'experts en santé publique dénonce l'absence de mesures contre la consommation d'alcool, le poids des lobbies alcooliers et l'absence de courage politique du gouvernement concernant son Plan Prévention Santé.  
Article rédigé par La rédaction d'Allodocteurs.fr
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Lutte contre l'alcool : des mesures "bien en deçà de la gravité du problème" (©Pixabay)

"C’est catastrophique". Le Pr Michel Reynaud, professeur de psychiatrie et d’addictologie, président du Fonds action addiction ne mâche pas ses mots. Comme d’autres de ses confrères, il réagit très vivement aux mesures de prévention contre les dommages de l’alcool, annoncé dans le Plan National de Prévention. Ou plutôt, à leur quasi-inexistence. Alors que l’alcool tue presque 50 000 personnes chaque année en France, le gouvernent n’affiche aucune volonté politique de s’atteler au problème.

Un groupe de neuf experts en santé publique, dont le Pr Reynaud, estime, dans un communiqué de presse, que les mesures proposées par le gouvernement sont "bien en deçà de la gravité du problème". Selon eux, l’Etat est démissionnaire. "La responsabilité de l'alcool dans les dommages sanitaires et sociaux est du ressort de la puissance publique. L'Etat ne peut se limiter à des mesures cosmétiques face aux encouragements forcenés à consommer qui se multiplient", écrivent-ils. Les médecins pointent du doigt un "écart abyssal, témoin manifeste des pressions du lobby de l'alcool". Déçu, le Pr Reynaud n’est pas pour autant surpris. "Ces choix sont dans la lignée des déclarations du Président de la République et de celles du porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner."

ITW Pr Michel Reynaud, addictologue ralisée le 22/02/2018

Un (trop) petit pictogramme pour avertir des dangers de l’alcool pendant la grossesse

La seule initiative de prévention présente dans le Plan concernant l’alcool est l’augmentation de la taille du pictogramme pour les femmes enceintes. Les experts jugent cette mesure "très circonscrite" et estiment qu’elle "ne suffira pas à faire évoluer favorablement la situation". "Ce pictogramme, c’est tout ce que les alcooliers ont accepté de lâcher, pour donner l’impression qu’il y avait une mesure de prévention.  En plus, il est tellement dérisoire par sa taille, qu’il ne correspond même pas aux normes européennes. Il est évident que l’on ne réduira pas la mortalité avec cela", note le Pr Reynaud.

Les médecins réclament l’adoption de mesures rationnelles et courageuses, à l'efficacité démontrée. "Ces mesures sont demandées par l’Union européenne et commencent à être appliquées dans d’autres pays comme l’Angleterre et l’Irlande", souligne l'addicrologue.  Parmi elles :

  • un avertissement sanitaire actualisé remplaçant la mention « l’abus d’alcool est dangereux pour la santé » par « l’alcool nuit à la santé »
  •  une information des consommateurs sur les calories et les quantités d’alcool pur en grammes et de sucre
  • la suppression de messages trompeurs tels que la modération ou l'éducation à (bien) boire
  • un contrôle strict et une répression de la vente aux mineurs
  • une taxe sur les boissons alcoolisées en fonction du nombre de grammes d’alcool pur
  • une politique des prix pour freiner la consommation des jeunes, notamment sur les prémix à base de vin
  • un encadrement de la publicité, en particulier sur Internet
  • un coup d'arrêt au contournement incessant de la loi Evin par les marques alibis, et le sponsoring déguisé des manifestations sportives ou culturelles

Un dernier « baroud d’honneur » pour les addictologues

"Le gouvernement a clairement choisi son camp entre celui des alcooliers et celui de la santé publique, se désole le Pr Reynaud. La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, sait bien que ce ne sont pas de mesures de prévention, mais des arbitrages lui sont imposés au plus haut niveau de l’Etat." Les rédacteurs du communiqué nourrissent cependant un dernier espoir concernant le Plan gouvernemental de Prévention des Addictions. " Dans ce plan, c’est l’ensemble des mesures addictions qui vont être représentées. Il est encore temps d’y inclure un Plan National Alcool. On espère encore se faire entendre et mobiliser, même si c’est pour mener un baroud d’honneur... Pour nous, l’important c’est que la société perçoive les manipulations et le fait qu’elle n’a pas accès à une information honnête." Le Plan gouvernemental de Prévention des Addictions sera rendu public le 15 avril.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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