Une nouvelle stratégie pour traiter la cataracte infantile
Les nourrissons présentant un cristallin opaque (voir encadré) sont habituellement rapidement opérés, afin de permettre un développement normal du sens visuel. L'intervention chirurgicale conventionnelle est la suivante : on perfore sur 6 millimètres, en son centre, la capsule du cristallin (l'enveloppe transparente qui maintient cette lentille en place). Si les conditions sont réunies, on implante ensuite un cristallin artificiel ; sinon, l'enfant devra porter des lunettes spécialement conçues jusqu’à ce que cette opération soit envisageable.
Dans environ neuf cas sur dix, des complications post-opératoires plus ou moins importantes sont associées au remplacement du cristalin sur le nourrisson. En outre, un phénomène est fréquemment constaté : en quelques mois, des cellules souches résiduelles initialement présentes dans la capsule du cristallin se différencient, recouvrant partiellement la lentille artificielle.
Partant de ce constat, des chercheurs chinois ont expérimenté sur le lapin, puis sur le macaque, une procédure chirurgicale permettant de ne pas vider cette capsule de ses cellules souches. Il s’agit d’ôter le cristallin par une incision de 1,5 millimètre réalisée en périphérie de l’enveloppe. Préservées, les cellules souches se différencient progressivement, et reforment un cristallin fonctionnel en un temps compris entre trois et six mois.
Fort de ces succès sur le lapin et le macaque, les chirurgiens ont réalisé cette opération sur douze enfants chinois, âgés de moins de deux ans. Ceux-ci ont été choisis au hasard parmi 37 enfants devant bénéficier de l’extraction du cristallin, les 25 autres ayant bénéficié de l’intervention conventionnelle.
Des résultats très encourageants
Comme espéré, chez ces 12 enfants, la croissance des 24 cristallins s’est déroulée de façon normale durant les six premiers mois. Vingt-trois de ces cristallins étaient parfaitement transparents. Deux enfants ont présenté des complications post-opératoires, dont aucune n’a justifié de nouvelle intervention chirurgicale, notent les auteurs de l’étude.
Ils notent que chez les 25 enfants témoins, 42 de 50 cristallins artificiels se sont opacifiés au bout de trois mois – une chirurgie au laser afin d’éliminer la prolifération de cellules souches sur la lentille.
Six mois après la chirurgie, les performances visuelles moyennes des 12 enfants sont apparues équivalentes à celles des 27 enfants témoins.
La première des douze opérations a été réalisée il y a deux ans : le bénéficiaire aurait encore "une bonne vision", selon le principal auteur de l’étude. L’efficacité à long terme de cette stratégie est encore mal connue.
Les auteurs de l’étude sont optimistes quant à la possible généralisation de cette technique pour traiter de nombreuses cataractes infantiles. Des essais cliniques de plus grande envergure doivent être programmés pour confirmer les résultats encourageants obtenus dans cette étude.
Il est important de souligner que cette stratégie thérapeutique est difficile à envisager dans les cas où la cataracte infantile est d’origine génétique, le cristallin régénéré risquant de présenter les défauts de l’original.
Concernant les traitements des cataractes de l’adulte, les auteurs rappellent que différences importantes existent entre les formes de la maladie. On ignore encore si les cellules souches présentes dans la capsule du cristallin du sujet âgé, sont en nombre suffisant - et dans une "forme" suffisante - pour régénérer rapidement une lentille complète.
Source : Lens regeneration using endogenous stem cells with gain of visual function. H. Lin et coll. Nature, mars 2016. doi:10.1038/nature17181
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.