Apprendre pendant le sommeil : "C'est possible, le cerveau s'adapte à son environnement même en dormant"
Une étude publiée dans la revue "Nature Communications" pourrait remettre en question notre façon d'apprendre. "Le cerveau s'adapte à son environnement et apprend pendant le sommeil léger et paradoxal" a découvert Sid kouider, chercheur au CNRS.
C'est le rêve de tous les gros dormeurs : apprendre pendant leur sommeil. On savait déjà que la mémoire travaillait pendant la nuit mais les connaissances se précisent. Une étude publiée mardi 8 août montre qu'il est possible d'apprendre des choses nouvelles pendant le sommeil. Selon Sid Kouider, chercheur au CNRS, il sera possible d'apprendre "des choses complexes d'ici plusieurs années ou plusieurs décennies pendant qu'on dort".
franceinfo : Que nous apprend cette étude précisément ?
Sid Kouider : Dans certaines situations, le cerveau peut tout à fait s'adapter à son environnement pendant le sommeil. Donc le cerveau peut apprendre des choses nouvelles durant certaines phases précises du sommeil. Ce dernier est divisé en trois phases : le sommeil léger qui suit l'endormissement, le sommeil profond où on est vraiment déconnecté de l'environnement et le sommeil paradoxal où le cerveau est très actif tout en étant déconnecté de l'environnement. Pendant le sommeil profond, plus rien ne peut entrer dans le cerveau et là on devient incapable d'apprendre. Mais cette étude montre que pendant les autres phases de sommeil, on peut continuer à entendre des sons par exemple. À notre grande surprise, on s'est aperçu que le cerveau s'adaptait à ces sons et restait assez plastique pour créer de nouveaux contenus. Lorsqu'on testait les personnes le lendemain matin, elles gardaient un souvenir de ce qui leur avait été présenté pendant le sommeil.
Si on nous diffuse une leçon d'histoire pendant le sommeil, il est possible de la répéter au réveil ?
On en est pas encore là. On a commencé avec des choses simples, des sortes de grésillements, de bruits. Il est possible de se souvenir de ces sons bien particuliers le lendemain matin. On peut extrapoler et imaginer qu'il sera possible d'apprendre des choses plus complexes. La porte reste ouverte. Il est fortement possible que dans les années ou les décennies à venir, on puisse déterminer à quel moment précis pendant le sommeil on est le plus capable d'apprendre.
Que se passe-t-il dans le cerveau humain pendant ces phases de mémorisation?
Dans le passé, on avait tendance à croire que le cerveau était complètement éteint pendant le sommeil, qu'il y avait une perte de conscience totale. On sait maintenant que c'est totalement faux. Pendant le sommeil, le cerveau est extrêmement actif et cela a beaucoup à voir avec la mémoire et l'apprentissage. Ce qui avait déjà été montré, c'est que la mémoire de ce qu'on a appris pendant la journée est consolidée pendant qu'on dort. En clair, on va épurer les connaissances en gardant le plus important et en éliminant ce qui l'est moins.
Ce n'est donc pas une croyance transmise de génération en génération d'élèves ?
Pas du tout. Il y a même des hypothèses selon lesquelles on dort parce qu'on apprend tellement de choses pendant la journée qu'il y a une sorte de surcharge et un moment, il faut arrêter d'apprendre en se déconnectant de l'environnement. Mais ce que montre notre étude, c'est que même si le sommeil sert à consolider la mémoire de ce qu'on a appris pendant la journée, le dormeur reste connecté avec son environnement par moment et peut continuer à apprendre. Avant le sommeil profond vers lequel on va progressivement, on peut se créer de nouvelles représentations.
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