: Vidéo Covid-19 : "On n'a pas plus de lits, on continue à galérer avec le matériel…" Des services de réanimation au bord de la rupture
Au service de réanimation du CHU d'Amiens, dans la Somme, comment affronte-t-on la troisième vague de Covid ? Après une longue année de crise sanitaire, les journalistes d'"Envoyé spécial" ont rencontré une équipe éprouvée. Les infirmières se disent épuisées, parfois démoralisées. En cause, les décès dus au coronavirus, et aussi le manque de reconnaissance des pouvoirs publics.
"On est payées des clopinettes : 10 euros notre nuit de douze heures ? Mais c'est lamentable ! On dit que les gens qui tournent et qui font des nuits perdent sept ans de leur espérance de vie." "On est dans la même galère qu'il y a un an, et on est fatiguées." "Envoyé spécial" a suivi une équipe du service de réanimation au CHU d'Amiens : après une année de crise sanitaire, les infirmières sont épuisées par leur combat contre la maladie. Un combat souvent démoralisant, qui s'ajoute à celui qu'elles menaient déjà avant la pandémie : en sous-effectif chronique, elles s'étaient mises en grève juste avant l'arrivée du Covid-19 pour dénoncer la dégradation de leurs conditions de travail.
En grève avant la pandémie pour demander un statut spécifique d'infirmier en réanimation
Leur travail, elles l'aiment, elles le font par vocation, mais elles le savent difficile et le souhaiteraient mieux rémunéré. Dans ce service, elles gagnent entre 1 700 euros net en début de carrière et 2 600 euros après plus de vingt-cinq ans de métier... Après la première vague de Covid-19, les infirmières ont obtenu une revalorisation salariale de 183 euros net. En avril 2021, le gouvernement a annoncé une nouvelle hausse. Mais pour elles, ce n'est pas suffisant.
"On aimerait aussi, et c'était le but de la grève, explique l'une d'elles, que notre travail soit reconnu. On est infirmières de réanimation, on a des compétences, on a reçu des formations supplémentaires." Pour ce poste auquel "on ne peut pas mettre n'importe quel infirmier" et ce métier auquel elles ont "toutes mis des années à se former", elles demandent un statut d'infirmier spécialisé en réanimation, qui serait obtenu après une formation spécifique, et une revalorisation salariale correspondante.
"C'est démotivant de voir que rien n'a bougé"
Après cette année particulièrement éprouvante, elles sont amères. "On aime notre métier, on le fait avec cœur, et c'est un peu démotivant de voir que rien n'a bougé…" Face à une situation de crise, le service de réanimation est toujours en sous-effectif, dénoncent les infirmières. Et ce malgré des plannings qui font apparaître des équipes au complet – mais avec "des gens qui ne sont pas formés."
"Au niveau matériel, déplorent-elles, il n'y a rien qui a changé : on continue à galérer avec le matériel." En ce qui concerne le nombre de lits, elles ne voient pas non plus d'amélioration. "On n'a pas plus de lits… Les médecins ont demandé une ouverture de lits, il n'y a rien."
"On a voulu uniquement nous faire répéter la recette de la première vague"
Quant aux médecins du service, ils partagent ce constat. Ils espéraient eux aussi qu'à l'occasion de la crise sanitaire, les pouvoirs publics prendraient enfin conscience des problèmes de l'hôpital. Mais selon eux, ce n'est pas le cas.
"On a ce sentiment-là, regrette Julien Maizel, chef du service de réanimation, que finalement, on ne nous a pas écoutés avant ; pendant l'urgence de la vague numéro un, on s'est adaptés ; et puis derrière, au lieu de voir arriver une solution un peu plus pérenne, eh bien non : on a voulu uniquement nous faire répéter la recette de la première vague."
"On est dans une situation chronique, qu'il faut arriver à résoudre"
"Le fait d'avoir un nouveau type d'infection à coronavirus, ce n'est pas quelque chose qui va s'arrêter du jour au lendemain, il ne faut pas le croire, prévient Michel Slama, chef de service adjoint. On est passés d'une situation qui était déjà difficile à une situation aiguë, qu'on a réussi à gérer... Mais maintenant, on est dans une situation chronique, qu'il faut arriver à résoudre !"
Extrait de "Ma vie d'infirmière", un reportage à voir dans "Envoyé spécial" le 29 avril 2021.
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