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"Les femmes ont peur de sortir" : en plein confinement, des professionnels de l'IVG réclament un allongement des délais d'avortement

Ghada Hatem, gynécologue-obstétricienne, signataire d'une tribune avec d'autres professionnels de santé et des responsables politiques, met en garde des conséquences du confinement sur les femmes qui souhaiteraient interrompre leur grossesse.

Article rédigé par franceinfo - avec France Inter
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Le docteur Ghada Hatem devant la maison des femmes de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), le 5 août 2016.  (BERTRAND GUAY / AFP)

Plus d'une centaine de professionnels de l'IVG ont publié une tribune mardi dans le journal Le Monde (article réservé aux abonnés), réclamant "le maintien de l'accès à l'IVG" en période de confinement. Parmi les signataires, Ghada Hatem, gynécologue-obstétricienne, fondatrice de la Maison des femmes de Saint-Denis, demande mercredi 1er avril, sur France Inter, l'allongement des délais d'avortement, pour ainsi passer de 5 à 7 semaines pour une IVG médicamenteuse à domicile, et de 12 à 14 semaines pour une intervention chirurgicale à l'hôpital. Enfin, Ghada Hatem prévient que si ces revendications ne sont pas entendus, la gynécologue-obstétricienne procédera "probablement, peut-être" à des avortements hors délais.

Ne pas engorger les centres médicaux

D'après les signataires de cette tribune, l'accès à l'IVG est rendu plus difficile en cette période de confinement. "Les jeunes femmes ont peur de sortir et nos consultations sont en diminution", analyse Ghada Hatem avant de poursuivre : "La plupart des hôpitaux ne font plus d'IVG sous anesthésie générale dans les blocs opératoires puisque ces blocs sont devenus des salles de réanimation. On s'est donc reportés sur l'IVG médicamenteuse, si possible sous anesthésie locale."

En France on peut avorter à domicile, par voie médicamenteuse, jusqu'à 5 semaines de grossesse. "Nous demandons à ce qu'on puisse le faire à la maison jusqu'à 7 semaines de grossesse", avance Ghada Hatem. Cela évitera, pendant ces 15 jours, "d'augmenter la fréquentation des centres médicaux". Allonger ce délai "n'est pas risqué et cela se fait dans d'autres pays", rassure la gynécologue-obstétricienne.

Avec le confinement, certaines femmes risquent de ne pas consulter à temps

Par ailleurs, les signataires évoquent le cas des femmes victimes de violences. Le confinement aggrave ces situations. Résultat : certaines femmes n'osent pas sortir de chez elles, n'osent pas se rendre à l'hôpital ou le font trop tard, hors de la période légale d'avortement. "Sachant qu'avant le confinement, les jeunes filles qui étaient dans des familles compliquées ou les femmes qui vivaient avec un agresseur, venaient souvent consulter trop tard, désormais cela va être nettement pire, précise Ghada Hatem. Nous demandons donc au gouvernement, pendant la période de confinement et peut-être dans les 15 jours qui suivent, de pouvoir faire des aspirations chirurgicales à l'hôpital jusqu'à 14 semaines de grossesse, soit deux semaines de plus que la loi actuelle."

Le gouvernement, de son côté, s'est montré frileux vis-à-vis de ces demandes. "On s'est entendus répondre qu'on ne pouvait pas changer la loi", souffle Ghada Hatem. Par ailleurs, certains collègues de la gynécologue-obstétricienne ont violemment critiqué les propositions faites par le collectif de professionnels de l'IVG : "On nous a dit que c'était ignoble de vouloir profiter de la situation pour faire passer des revendications." Ghada Hatem rappelle que ces propositions ne concernent que la période de confinement.

On ne profite pas de la situation, on veut juste aider les femmes dans une période qui est plus difficile que d'habitude.

Ghada Hatem

à franceinfo

Face au silence du gouvernement, les signataires de la tribune envisagent d'enfreindre la loi. Ghada Hatem laisse ainsi entendre que "probablement" elle procédera à des avortements hors délais. "Si vraiment on avait un afflux de femmes désespérées, peut-être qu'on le ferait..."

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