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"Je ne pense pas que les Suédois se préoccupent beaucoup du virus" : dans un Stockholm non confiné, la population fait confiance à la stratégie du royaume

La Suède a fait le choix de ne pas confiner sa population face au coronavirus, préférant en appeler au civisme de chacun. Un pari risqué vu de l'étranger, mais qui sur place remporte l'adhésion de la majorité des Suédois, comme franceinfo a pu le constater à Stockholm.

Article rédigé par Louise Bodet
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Des collégiens jouent au basket dans la cour de leur école, à Bromma près de Stockholm, le 23 avril 2020. (LOUISE BODET / RADIO FRANCE)

Anders Tegnell est épidémiologiste et il est devenu en quelques semaines le visage et la voix de la gestion de crise à la suédoise. "Chaque pays doit avoir son propre système, car tout dépend tellement du contexte, de où en est l’épidémie, de vos capacités sanitaires et légales", explique-t-il. 

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Alors qu’en France le déconfinement soulève de nombreuses interrogations et fait l’objet de multiples débats et controverses, en Suède, le choix – pourtant unique en Europe - de ne pas confiner la population est largement soutenu par l’opinion. Cette stratégie ne fait pourtant pas l’unanimité parmi les scientifiques, y compris dans le royaume, mais elle correspond aux réalités sociologiques et à la culture politique du pays.

Une stratégie guidée par les scientifiques...

Face au virus ce n’est pas le gouvernement qui décide, mais la toute puissante Agence de santé publique. Indépendante du pouvoir politique, elle est soutenue par près des trois Suédois sur quatre, toutes générations confondues. "Notre stratégie se base sur la recherche scientifique et je trouve que c’est une très bonne idée de ne pas politiser les choses", affirme Nabila, 15 ans. "C’est très bien d’être guidés par les scientifiques", poursuit l'adolescente, qui continue d'aller au collège.

Des scientifiques loin d’être unanimes, mais la confiance des Suédois dans leurs institutions désarme les clivages, et l’on préfère ici le consensus à la confrontation, même féconde. Aucun triomphalisme d’ailleurs. Le taux de mortalité est bien trop élevé par rapport aux voisins scandinaves et l’avenir est bien trop incertain, relève Rebecca, rencontrée dans un restaurant de Stockholm. "C’est très difficile de savoir ce qu’il faut faire. J’arrive des Pays-Bas où j’habite en ce moment. C’est beaucoup plus strict là-bas et j’ai été choquée de voir ici tous ces gens dehors. Mais on ne saura pas avant des années quelle est la bonne stratégie", estime-t-elle.

... Et qui répond à des moeurs locales

La stratégie suédoise est-elle d’ailleurs exportable ? Pas sûr. Le royaume scandinave est peu peuplé, il n’est pas un hub planétaire comme la France ou l’Italie, et plus de la moitié de ses foyers comptent un seul habitant (record mondial), sans oublier la distanciation sociale, réflexe naturel ici, assure Hugo, croisé sur une place animée de la capitale. 

En Suède on a de toute façon l’habitude de garder nos distances et puis c’est une question de responsabilité personnelle. Si on se sent malade, on reste chez soi.

Hugo, habitant de Stockholm

à franceinfo

La responsabilité et le civisme érigés en vertus cardinales, sauf que le printemps pointe le bout de son nez et qu’Emilia en est toute chamboulée. "L'hiver est tellement long ici et tellement froid. Alors quand il fait chaud dehors, tu tentes ta chance !", explique-t-elle. "Je ne pense pas que les Suédois se préoccupent beaucoup du virus. On veut sortir, socialiser, profiter de la vie... On s'en fout", lâche-t-elle. Une insouciance qui inquiète les autorités. Le gouvernement a menacé vendredi 24 avril de fermer les restaurants et cafés qui ignorent les règles de distanciation sociale.

A Stockholm, le reportage de Louise Bodet, avec Arthur Gerbault aux moyens techniques.

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