Covid-19 : "Les soignants ne sont pas des super-héros", reconnaît une psychiatre
"Demander de l'aide psychologique n'est pas forcément une habitude chez les soignants", affirme Frédérique Warembourg qui reconnaît que leur situation reste "difficile".
"Les soignants ne sont pas des super-héros", a tenu à souligner lundi 29 mars sur franceinfo Frédérique Warembourg, psychiatre au CHU de Lille et responsable de la cellule d’urgence médico-psychologique (CUMP) du département du Nord, alors que la France enregistre quotidiennement entre 200 et 300 morts du Covid-19 à l'hôpital, et que l'Insee constate que la mortalité en 2020 est au plus haut depuis 70 ans.
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Pour les soignants, la situation reste "difficile", même s'ils sont "habitués à être confrontés à des décès", pointe Frédérique Warembourg. La psychiatre note notamment que chez eux, "demander de l'aide psychologique" n'est pas naturel.
franceinfo : Comment vivez-vous cette forme d'habitude de constater les 200 à 300 décès quotidiens du Covid-19 ?
Frédérique Warembourg : En tant que soignant, c'est très difficile. Parce la perception est très différente entre le vécu des soignants et le vécu de la population générale. Il n'y a toujours pas d'habitude de la situation en ce qui concerne les soignants à l'hôpital qui sont confrontés à cette crise depuis plus d'un an, dans des conditions difficiles, avec un épuisement qui est très marqué.
Est-ce que la durée est dure à supporter, après les coups de projecteurs qui étaient sur les soignants tous les soirs il y a un an ?
Les projecteurs qui s'éloignent, je pense que ça n'est pas forcément difficile. Il y a une disparition de la considération qu'il pouvait y avoir il y a un an, sur quelque chose qui était parfois peut être un peu trop. Parfois, on les a comparés à des super-héros. Alors, les soignants ne sont pas des super-héros. La preuve en est aujourd'hui : l'épuisement. Les super-héros sont rarement épuisés. Effectivement, on passe un peu de tout à rien aujourd'hui et c'est compliqué, même si les soignants sont habitués à être confrontés à des situations difficiles, à des décès.
"Le fait que cela dure depuis un an, avec des vagues, sans vraiment de stop entre les deux dernières vagues, l'impact est énorme en terme psychologique sur les soignants aujourd'hui."
Frédérique Warembourg, psychiatre au CHU de Lilleà franceinfo
Est-ce que c'est difficile à admettre pour un soignant qu'il souffre d'être confronté au quotidien ?
Les soignants ont du mal à demander de l'aide quand ça ne va pas. Ce qui est très véhiculé de manière générale, c'est que, comme on est soignants, on doit faire face. Cela fait partie de notre travail de faire face. On n'a pas vraiment le droit d'être faible. On a le sentiment de montrer une faiblesse si on dit que ça ne va pas. Ça commence à bouger pas mal. On remarque que, dans les services dans lesquels on passe régulièrement, la parole est un peu plus ouverte. Mais c'est vrai que demander de l'aide psychologique n'est pas forcément une habitude chez les soignants.
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