Coronavirus : pourquoi cette carte sur l’efficacité de la chloroquine ne doit pas être prise au sérieux
Relayée sur les réseaux sociaux, cette carte, comme l’article qui l’accompagne, comporte en réalité plusieurs erreurs.
Ces derniers jours, plusieurs internautes ont partagé une carte du monde. Dessus, les pays en bleu sont censés représenter les pays les plus touchés par le paludisme et en jaune, ceux qui sont le plus touchés par le Covid-19. Cela est supposé montrer que les pays où la malaria est traitée à la chloroquine sont ceux qui sont le moins touchés par le coronavirus. La carte provient d’un prétendu article (en anglais) attribué à deux chercheuses britanniques. Ce texte envisage l’existence d’"un lien potentiel entre la prévention médicale de la malaria et celle du Covid-19". Mais la démonstration, dont la véracité n'est pas prouvée, comporte des erreurs. La Cellule du Vrai du faux vous explique pourquoi.
Des données qui ne sont plus exactes depuis quelques jours... ou plusieurs années
Les données retenues pour qu’un pays soit bleu ou jaune sont les taux de mortalité supérieurs à 0,1 mort par million d’habitants, que ce soit pour la malaria ou le Covid-19. Si l'on se fie à cette carte, l’Afrique est épargnée par l'épidémie de coronavirus. Toutefois, cette infographie date du 14 mars.
Dix jours plus tard, l'Afrique a recensé 2 137 cas de personnes atteintes par le Covid-19 et 62 personnes ont déjà trouvé la mort. Par ailleurs, la faiblesse des systèmes de soins dans plusieurs pays africains faitt craindre une progression de la pandémie. Certains Etats comme l’Afrique du Sud ou le Nigeria ont déjà annoncé l’instauration d’un confinement pendant que le Sénégal et la Côte d'Ivoire ont proclamé l'état d'urgence.
La carte sur la malaria "n’est pas du tout à jour", explique de surcroît Sandrine Houzé à franceinfo. La coordinatrice du Centre national de référence du paludisme à l’hôpital Bichat, à Paris, relève plusieurs inexactitudes en Amérique du sud comme en Afrique. La professionnelle de santé prend pour exemple l’Algérie, qui est présentée sur la carte comme touchée par le paludisme alors qu’elle ne l’est plus, d’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Par ailleurs, selon cette spécialiste, la rigueur voudrait que la situation s’observe par régions et non simplement par pays. Cela permet de distinguer des zones plus touchées que d’autres à l’intérieur même des États, comme la forêt amazonienne par rapport au Brésil, par exemple.
Une grossière erreur quant au traitement contre le paludisme
Dans leur "étude", les prétendues chercheuses britanniques insistent sur la chloroquine comme traitement utilisé dans la prévention du paludisme. Là encore, la carte ne colle pas, surtout en Afrique. "Depuis plus d’une dizaine d’années, la chloroquine a montré son inefficacité majeure contre les souches du paludisme. Elle n’est donc plus recommandée aussi bien en prophylaxie qu’en curatif, dans tous les pays d’Afrique", indique Sandrine Houzé.
D’autres antipaludiques, beaucoup plus efficaces, sont désormais utilisés. Certes, il peut y avoir de la chloroquine en circulation, "mais pas de manière massive", selon cette spécialiste. "Ce sont des gens qui ne connaissent pas le paludisme qui ont écrit cela", conclut-elle.
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