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Coronavirus 2019-nCoV : les animaux domestiques peuvent-ils transmettre la maladie ?

Selon l'OMS, "rien ne prouve" que les chiens ou les chats puissent être infectés par le nouveau coronavirus. Les experts interrogés par franceinfo confirment qu'un franchissement de la "barrière d'espèce" est rare.

Article rédigé par Benoît Zagdoun
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Un chien portant un masque, promené en laisse, le 4 février 2020 à Guangzhou (Chine) pendant l'épidémie de nouveau coronavirus. (ANADOLU AGENCY / AFP)

Ils sont des victimes collatérales de l'épidémie de coronavirus 2019-nCoV. En Chine et notamment à Wuhan, des animaux de compagnie ont été abandonnés par leurs maîtres. Ces chiens et ces chats sont enfermés depuis des jours dans leur maison ou appartement, livrés à eux-mêmes. Leurs propriétaires sont pour beaucoup partis à l'occasion des vacances du Nouvel An lunaire et la quarantaine imposée à la mégapole les empêchent de rentrer.

L'Association de protection des petits animaux de Wuhan relate sur sa page Facebook avoir déjà secouru plus de 600 de ces animaux domestiques. Les bénévoles déployant parfois des trésors d'ingéniosité, afin de leur venir en aide.

Mais dans le même temps, la rumeur de chiens et de chats tués en pleine rue de peur qu'ils ne transmettent la maladie s'est répandue sur les réseaux sociaux, photos sanguinolentes à l'appui. Les images de chiens avec un masque de protection sur le museau se multiplient. Face à la psychose, une question se pose : les animaux domestiques peuvent-ils être infectés par ce nouveau coronavirus et contaminer à leur tour les humains à qui ils tiennent compagnie ?

Les transmissions entre espèces sont rares 

Un obstacle de taille se dresse sur la route du virus : "la barrière d'espèce", explique à franceinfo Olivier Bouchaud, médecin au service des maladies infectieuses et tropicales de l'hôpital Avicenne de Bobigny. "Cette barrière n'est pas infranchissable, puisqu'il est probable qu'un animal soit à l'origine de la transmission [du coronavirus 2019-nCoV] à l'homme, reconnaît le médecin.

Selon une hypothèse sur laquelle des scientifiques chinois travaillent, mais qui reste à confirmer, le nouveau coronavirus pourrait provenir d'une chauve-souris et un petit mammifère, le pangolin, pourrait avoir joué les intermédiaires entre le chiroptère et l'homme. Reste, insiste Olivier Bouchaud, qu'"il faut une succession de conditions particulières et rares pour que ce [franchissement de la barrière d'espèce] soit possible". 

Olivier Bouchaud juge par conséquent peu probable qu'un chien ou un chat d'appartement transmette le virus à son maître. "Au niveau individuel, se faire contaminer par son animal de compagnie paraît d'autant moins envisageable qu'il faudrait déjà que cet animal ait pu être en contact avec une personne infectée avec franchissement de la barrière 'dans l'autre sens'", relève le médecin.

Les animaux domestiques encore moins concernés

A l'instar de leurs maîtres, les animaux de compagnie ne sont certes pas immunisés contre les maladies virales. Mais ils n'attrapent en général pas les mêmes, souligne Anne Goffard, virologue au CHU de Lille et chercheuse à l'Institut Pasteur de Lille.

Il existe des coronavirus chez les chats et les chiens, mais jusqu'à aujourd'hui, ils n'infectaient pas les humains.

Anne Goffard

à franceinfo

Et l'experte de poursuivre : "Pour l'instant, les coronavirus humains ne passent pas chez les animaux de compagnie." "Le Sras a été isolé chez des animaux sauvages – les civettes – vendus sur les marchés chinois, mais pas chez des animaux domestiques", rappelle d'ailleurs Anne-Claude Crémieux, infectiologue à l'hôpital Saint-Louis de Paris.

Un risque théorique pour certaines espèces

"Pour que les animaux de compagnie soient infectés, il faudrait qu'ils aient le même récepteur cellulaire qui interagit avec le domaine de fixation du 2019-nCoV", développe Samira Fafi-Kremer, cheffe du laboratoire de virologie au sein des hôpitaux universitaires de Strasbourg. Or, précise l'experte, dans le cas du nouveau coronavirus, cette porte d'entrée de l'infection dans l'organisme pourrait bien être la même chez l'homme et chez certains animaux, d'après de récents travaux de recherche (iciici et ).

"Très récemment, des chercheurs chinois et américains ont rapporté que le récepteur cellulaire chez l'homme du nCoV est un enzyme appelé ACE2 qui interagit avec la protéine de surface du virus et qui permet l'infection des cellules humaines", détaille la spécialiste. Or, "il semblerait que les sites de fixation sur ACE2 spécifiques au nCoV sont les mêmes que celles présentes chez d'autres animaux comme le porc et le chat".

Aucun cas n'a été découvert chez un animal

Samira Fafi-Kremer en conclut donc qu'"en se basant sur ces données de la littérature, ces animaux peuvent être infectés et transmettre à l'homme ou vice-versa". Donc le risque existe en théorie mais aucun cas n'a été constaté pour le vérifier. Résultat : l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ne souscrit pas pour l'instant à cette conclusion.

A l'heure actuelle, rien ne prouve que les animaux de compagnie tels que les chiens ou les chats peuvent être infectés par le nouveau coronavirus.

Organisation mondiale de la santé

dans ses conseils au grand public

A ce stade, l'OMS indique donc plutôt qu'"il est toujours bon de se laver les mains à l'eau et au savon après un contact avec des animaux domestiques". Non pour se prémunir du nouveau coronavirus, mais parce que cela "protège contre diverses bactéries courantes" telles que l'Escherichia coli et la salmonelle "qui peuvent passer des animaux de compagnie à l'homme". Mais comme le rappelle Samira Fafi-Kremer, "encore faut-il que l'homme ou son animal rencontre le virus" et le nCoV-2019 "ne circule pas en France".

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