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Le Fonds public d'indemnisation des victimes du Mediator, devant leur permettre d'obtenir réparation, est lancé jeudi

Toutes les victimes ou leurs ayants droit peuvent désormais s'adresser à ce guichet unique, géré par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, afin d'y déposer une demande d'indemnisation.Ladite demande sera ensuite soumise à des experts pour déterminer "les dommages et les responsabilités", en principe dans un délai de six mois.
Article rédigé par France2.fr avec agences
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Le Mediator, médicament pour les diabétiques, aurait fait de 500 à 2.000 morts. (F2)

Toutes les victimes ou leurs ayants droit peuvent désormais s'adresser à ce guichet unique, géré par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, afin d'y déposer une demande d'indemnisation.

Ladite demande sera ensuite soumise à des experts pour déterminer "les dommages et les responsabilités", en principe dans un délai de six mois.

Le Mediator, médicament des laboratoires Servier essentiellement destiné aux diabétiques en surpoids, a été largement utilisé comme coupe-faim. Retiré du marché en novembre 2009, il serait responsable de 500 à 2.000 morts. Cinq millions de personnes en ont consommé.

Une avancée pour la reconnaissance d'un drame
"C'est la première fois en France qu'on a mis en place aussi rapidement un fonds de cette envergure", se réjouit le Dr Dominique-Michel Courtois, président de l'Association d'aide aux victimes du Mediator et de l'Isoméride ( AVIM). Mais il ajoute qu'il ne faut pas s'attendre à recevoir le chèque d'indemnisation aussitôt le dossier déposé. Selon lui, il faudra "au moins une année". Le Dr Courtois présentera "dans les semaines qui viennent 2.000 dossiers, surtout cardiologiques", sur les 3200 qu'il a réunis. L'idée, avec des cas de lésions mineures à modérées, est de faciliter les expertises sur dossier pour aller plus vite.

"C'est un moment fort, pas purement symbolique: les victimes vont enfin voir leur dossier et leur drame pris en compte", juge le Dr Irène Frachon, praticienne à Brest ayant sorti l'affaire du Mediator. "Après avoir été pendant des mois et des mois dans un déni farouche, les médecins, et plus peut-être les cardiologues, commencent à accepter que lea pu provoquer des valvulopathies", relève-t-elle. Mais "il y a encore des patients qui en ont pris pendant des années et qui n'ont pas encore eu d'échocardiographie", déplore le médecin qui leur "recommande" de la faire. "S'il n'y a rien, comme dans la grande majorité des cas, les gens seront rassurés. Et s'il y a quelque chose (une fuite aortique ou double fuite mitro-aortique), même mineure, il est légitime de déposer un dossier pour expertise auprès de l'Oniam", explique la pneumologue, qui estime à quelques centaines les atteintes graves des valves cardiaques.

Autre avis, celui de Jacqueline Houdayer, présidente de l'association Conseil Aide Défense des Usagers de la Santé, selon qui, "passer par le fonds est la voie la plus rapide, avec une procédure qui prend un an à un an et demi, une expertise gratuite et une réparation intégrale".

Pour le ministère de la Santé, qui a organisé le 31 août une réunion avec les associations, "ce dispositif permet une indemnisation intégrale des victimes tout en garantissant leur droit d'intenter une action pénale si elles le souhaitent".

Les associations participeront à un "comité de pilotage" du dispositif, a précisé le Dr Courtois dont l'association, outre les atteintes des valves cardiaques, a recensé "une centaine de cas d'hypertension artérielle pulmonaire", autre complication grave de l'intoxication au Mediator.

Pour sa part, Me Charles Joseph-Oudin "déposera une grosse dizaine de dossiers avec des préjudices importants", mais il prévient que "même avec le fonds, les laboratoires Servier ne vont pas se laisser faire".

Choisir entre indemnisation ou poursuites civiles
Les victimes du Mediator qui accepteront une indemnisation du Fonds public devront renoncer à obtenir réparation devant un tribunal civil mais ils pourront poursuivre pénalement les acteurs de ce scandale.

Chaque demande sera soumise, aux frais de l'Etat, à un collège d'experts qui rendra un avis. A partir de cet avis, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux demandera aux laboratoires Servier de faire une proposition d'indemnisation, dans un délai de trois mois. Si Servier refuse, les victimes seront indemnisées directement par l' Oniam qui se retournera vers Servier pour se faire rembourser, si nécessaire en saisissant la justice.

Les victimes du Mediator peuvent également engager une action devant un tribunal civil pour obtenir réparation. Nombre d'entre eux l'ont déjà fait pour obtenir la nomination d'un expert et l'évaluation de leur préjudice. Dans ce cas, le demandeur doit avancer les frais d'expertise.

Une victime pourra à la fois intenter une action civile et soumettre un dossier d'indemnisation au fonds public mais ne pourra percevoir in fine qu'une seule indemnisation.

Les poursuites pénales
Le recours au fonds public d'indemnisation n'empêche en revanche pas les victimes de s'associer au contentieux pénal qui vise à établir des responsabilités et des sanctions dans cette affaire.

Quelque 1.500 plaintes ont ainsi été centralisées à Paris dans le cadre de l'enquête pour "tromperie aggravée", "homicides et blessures involontaires", et "" au préjudice de la sécurité sociale conduites par trois juges d'instruction et qui pourrait durer plusieurs années.

Les laboratoires Servier, leur fondateur de 89 ans Jacques Servier, ainsi que la société Biopharma qui a commercialisé le Mediator sont aussi visés par des citations directes déposées par des victimes présumées et des associations devant le tribunal de Nanterre. Un procès devrait se tenir au printemps 2012.

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