Pourquoi les hôpitaux de Paris sont en grève
Tous les syndicats de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ont appelé à participer au mouvement, destiné à combattre le projet de réorganisation des 35 heures.
"Repos préservé, qualité des soins assurée." A l'unisson contre le projet de réorganisation des 35 heures, les syndicats de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) appellent à la grève, jeudi 21 mai. Il s'agit du premier conflit social d'envergure pour le directeur général, Martin Hirsch.
Fait rare, toutes les organisations représentatives (CGT, SUD, FO et même la CFDT) ont fait front commun avec la CFE-CGC, la CFTC et l'Unsa, invitant les agents grévistes à se rassembler à 11 heures devant le siège de l'AP-HP, dans le 4e arrondissement de Paris. L'offre de soins devrait toutefois être assurée, les personnels essentiels à la prise en charge des patients ayant été "assignés a minima".
Quel est le problème ?
La direction de l'AP-HP veut remédier aux journées trop longues et aux congés qui s'accumulent sans pouvoir être pris. Actuellement, plus de 60% des 75 000 agents (hors médecins) des 38 établissements de l'AP-HP travaillent 7h36 (soit 38 heures par semaine) ou 7h50 (39h10) par jour. De quoi atteindre un nombre de RTT allant de 18 à 20 jours par an, auxquels s'ajoutent des journées propres à l'AP-HP.
Mais en raison du manque de personnel, les journées non prises s'accumulent sur les comptes épargne temps (CET). Un stock évalué à 74,7 millions d'euros fin 2014, rappelle la direction. La réduction des plages horaires journalières à 7h30, voire 7 heures, atténuerait ces frais, en diminuant ou supprimant les RTT, même si Hirsch a d'ores et déjà exclu la "généralisation" de la journée de 7 heures.
Un chantier "difficile", reconnaît celui qui avait été nommé à la tête de l'AP-HP pour apaiser les tensions, en pleine polémique autour de la fermeture des urgences de l'Hôtel-Dieu, en 2013. Mais il est "indispensable" pour "préserver l'emploi" et la "qualité du travail", selon lui.
Il permettrait surtout d'économiser quelque 20 millions d'euros, à l'heure où l'hôpital public est sommé de se serrer la ceinture (3 milliards d'euros d'économies attendues d'ici à 2017, dont 860 millions sur la masse salariale).
Qu'en disent les syndicats ?
Rose May Rousseau, secrétaire générale de l'Union syndicale CGT de l'AP-HP, estime que réduire les plages horaires sans embauche serait "socialement injuste pour des agents dévoués et en première ligne au quotidien auprès des patients". "Faire en 7 heures ce qui se fait en 7h36 se traduirait par une productivité plus intense, moins de repos", et nuirait à la "sécurité des patients", s'indigne-t-elle, ajoutant que les salaires des agents sont gelés depuis 2010.
Les syndicats craignent en outre de perdre d'autres droits, comme la comptabilisation de la pause déjeuner de 30 minutes dans le temps de travail effectif. "En substance, le message qui est adressé [aux agents] est : 'Vous bénéficiez de trop de congés et de trop d'avantages'", s'est insurgé Force ouvrière Santé dans un courrier adressé, cette semaine, à Marisol Touraine.
L'intersyndicale attend désormais des garanties et des orientations précises de la direction générale, qui n'a présenté qu'un état des lieux, rejeté par les syndicats. "Nous voulons négocier sur la base de nos revendications, pas sur celles de M. Hirsch" qui ne visent "qu'à faire des économies sur le dos du personnel", résume Rose May Rousseau.
Quelle est l'attitude du gouvernement ?
Mardi, la ministre de la Santé n'a pas suivi la Fédération hospitalière de France, qui représente la quasi-totalité des hopitaux publics et qui réclame un soutien ferme à l'initiative de Hirsch, en plus d'un débat national sur la question des 35 heures.
Marisol Touraine a martelé que le gouvernement était attaché aux 35 heures, "à l'hôpital comme ailleurs", prévenant que la "réussite" du projet dépendrait de la qualité du "dialogue social".
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