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Grippe aviaire : la filière du foie gras sous le choc, un "vrai traumatisme"

C'est du jamais vu en France. A partir de ce lundi, il n'y aura plus aucun canard dans les élevages et les abattoirs de 18 départements du Sud-Ouest, frappés depuis le début de l'année par une épidémie de grippe aviaire. La fabrication du foie gras est à l'arrêt pendant plus de trois mois. Reportage dans le département des Landes, premier producteur de foie gras.
Article rédigé par Gaële Joly
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
  (Bernard Duval à côté de sa nursery de canards, entièrement vide © RF/ Gaële Joly)

"Ça, c’est ma salle de gavage, elle est vide" . Florence Lasserre a perdu son joli sourire. La jeune productrice de foie gras, installée à Bahus-Soubiran, au sud de Mont-de-Marsan, vient d'abattre ses derniers canards : "D’habitude c’est plein ici, et là on se sent un peu seul, mais le principal c’est de ne pas retrouver la maladie" .

Le coup est très dur, car Florence va devoir au moins attendre jusqu'à la fin de l'été pour remettre son activité en marche, et elle s’inquiète de la trésorerie : "Moi je suis jeune, j’ai une maison, la nounou à payer, les frais personnels, les frais professionnels" . D’ici quelques jours, elle mettra son salarié au chômage partiel.

 

Foie gras : une filière sous le choc, un "vrai traumatisme" - reportage Gaële Joly
  (Plus de canards à gaver dans la ferme de Florence Lasserre © RF/ Gaële Joly)

Bernard Duval lui aussi essaye de s'habituer à ce vide. Installé avec son épouse Catherine, au beau milieu de la forêt landaise, à Bourriot-Bergonce, plus au nord du département, cet éleveur de cannetons revient tout juste de la banque, il a dû renégocier ses prêts. Avec sa femme, ils improvisent pour pouvoir joindre les deux bouts : "On a la chance d’avoir des amis producteurs d’asperges et mon épouse est parti travailler chez eux pour la ramasse et le tri des asperges. Et moi j’ai pris quelques contacts avec les boites d’intérim" .

"C'est un vrai traumatisme"
— Fabien Chevalier, directeur général de Lafitte (foie gras)

Avec ce vide sanitaire, la filière va perdre 25 % de sa production. "Sur un an, le volume de canards produit en France s’élève à 36 millions. Cette année il va manquer 9 millions de canards" s'inquiète Christophe Barrailh, le président du CIFOG, l'interprofession du foie gras, et producteur lui aussi. Pour lui, c'est toute l'économie de la région qui va s'arrêter.

Si l'Etat a promis d'indemniser en partie les petits producteurs, l’enveloppe allouée aux entreprises est bien trop faible estime Fabien Chevalier, le directeur général de la maison Lafitte. La plupart de ses 171 salariés vont passer en chômage partiel ses 3 prochains mois, et pour l’entreprise le préjudice estimé est lourd : "Ça représente 10% de notre chiffre d’affaires. C’est un vrai traumatisme."

"Il y aura du foie gras du Sud-Ouest sur les tables à Noël", martèlent les producteurs

Mais au pays du rugby, personne ne veut se laisser abattre. Au siège de l'entreprise Delpeyrat, numéro 2 du foie gras en France, installé à Mont-de-Marsan, on prépare déjà la reprise. En attendant que la production reprenne, hors de question de se laisser doubler par le canard hongrois ou bulgare, explique Dominique Duprat, le directeur général adjoint de Delpeyrat. L’entreprise occupe le terrain, notamment au Japon : "Dans le mois qui va suivre, on va organiser des Masterclass à Tokyo avec des chefs japonais et l’ambassadeur de Delpeyrat, Guy Martin, le chef étoilé du grand Véfour à Paris"

 

A l'unisson, éleveurs et producteurs, ou industriels le martèlent : "Il y aura du foie gras du sud-ouest sur les tables à Noël ". Et l’enjeu est de taille puisque ça représente les trois quarts des ventes de l’année. 

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