PFAS : "On est face à une pollution systémique" et "ce n'est que le début", prévient le député écologiste Nicolas Thierry

"Les 'polluants éternels', c'est une famille de 12 000 substances, et on ne les a même pas toutes encore identifiées", lance le député écologiste, jeudi sur France Bleu Gironde. L'élu réclame une action forte de l'État.
Article rédigé par franceinfo - avec France Bleu Gironde
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Le député écologiste de Gironde, Nicolas Thierry, le 4 avril 2024 à l'Assemblée nationale. (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS)

Quatre prélèvements d'eau du robinet sur dix réalisés en France contiennent des "polluants éternels", les Pfas, à des taux parfois préoccupants, selon l'enquête des radios locales de France Bleu et de la Cellule investigation de Radio France publiée jeudi 19 septembre. "Ce n'est pas étonnant du tout. Dès qu'on se met à en chercher, on en trouve, et ce n'est que le début", prévient Nicolas Thierry, député les Écologistes de la 2e circonscription de Gironde, qui a déposé une proposition de loi pour interdire les Pfas dans les cosmétiques et les vêtements. Il était invité de France Bleu Gironde jeudi. 

"On est face à une pollution systémique, décrit l'élu. C'est un scandale qui a explosé aux États-Unis il y a maintenant 25 ans, on en parlait très peu en Europe et en France, donc ce n'est pas étonnant du tout. Dès qu'on se met à en chercher, on en trouve, et ce n'est que le début".

Les Pfas sont présents "à peu près partout dans les objets du quotidien, ils ont été développés par les industriels à partir des années 40, parce qu'ils permettent aux objets d'être imperméabilisants, antitaches, antiadhésifs… Progressivement ils se sont retrouvés un peu partout", poursuit-il. Mais une fois dans nos corps ou dans l'environnement, "on n'arrive pas à s'en débarrasser". Cela peut provoquer "l'émergence d'un certain nombre de pathologies comme l'infertilité, le cholestérol ou certains types de cancers. Les 'polluants éternels', c'est une famille de 12 000 substances, et on ne les a même pas toutes encore identifiées", rappelle Nicolas Thierry. La dépollution dans l'environnement est possible, mais elle coûte très cher.

Lobbying intense du groupe Seb

Une nouvelle norme va être imposée par l'Europe, à partir de 2026, de 100 nanogrammes par litre. Elle a "le mérite d'exister", mais elle est "très peu ambitieuse", juge le député. Sur les analyses faites à Bordeaux par exemple, l'eau reste potable, mais "il faut avoir conscience que c'est sur le long terme qu'il peut y avoir des effets." 

"Il va falloir investir dans la décontamination de l'eau et puis surtout cesser d'émettre des Pfas dans l'environnement."

Nicolas Thierry, député écologiste de Gironde

sur France Bleu Gironde

En avril dernier, une loi portée par le député écologiste est passée à l'Assemblée nationale puis au Sénat, pour interdire l'utilisation des Pfas dans les vêtements et les cosmétiques, mais pas sur les poêles et les casseroles. Elle doit passer une dernière fois à l'Assemblée nationale pour être adoptée. "À l'origine, on avait proposé d'interdire les 'polluants éternels' notamment dans les ustensiles de cuisine, raconte l'élu. Il y a eu un lobby extrêmement grossier de la part notamment de Seb. La direction de Seb a payé les salariés sur une journée, pour qu'ils se déplacent pour manifester et éviter que les ustensiles de cuisine soient concernés dans cette proposition de loi", dénonce-t-il.

Mettre en place une "taxe pollueur-payeur"

Néanmoins, ce texte permettrait à la France d'être "le pays qui aurait la réglementation la plus ambitieuse". Cela concerne notamment les cosmétiques, "un enjeu extrêmement important, notamment avec des jeunes filles qui aujourd'hui se maquillent de plus en plus tôt, souvent en pleine puberté, décrit Nicolas Thierry. On sait que ce sont des perturbateurs endocriniens".

Le député souhaite aussi que cette loi permette de mettre en place "une taxe pollueur-payeur, pour faire payer les industriels qui rejetteraient des Pfas dans l'environnement. Ça serait une grande avancée". Le député écologiste conclut : "la société civile s'en est emparée, il y a une énorme pression citoyenne, il faut maintenant que l'État prenne le sujet à bras-le-corps et qu'il y ait plus de transparence".

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