: Vidéo En 1986, le premier témoignage télévisé d'une victime d'inceste suscitait des réactions sidérantes
Il y a presque quarante ans, pour la premiÚre fois en France, une victime d'inceste témoignait à visage découvert à la télévision. Une époque pas si lointaine, et pourtant... Au standard de l'émission, mais aussi sur le plateau, bien des réactions susciteraient aujourd'hui l'indignation. Extrait du témoignage d'Eva Thomas, diffusé dans "Envoyé spécial" le 21 janvier 2021.
C'était en 1986, et c'était une premiÚre en France : une victime d'inceste témoignait à visage découvert à la télévision. Dans une émission phare de l'époque, Les Dossiers de l'écran, Eva Thomas racontait le viol perpétré par son pÚre quand elle était ùgée de 15 ans. Elle en avait alors 44. Pour "Envoyé spécial", elle a accepté de revoir cette émission.
Cette interview, elle l'a donnée à une époque pas si lointaine, et pourtant tellement différente... Ce soir-là , au standard de l'émission, les réactions des téléspectateurs étaient nombreuses, et beaucoup susciteraient aujourd'hui l'indignation sur un plateau.
Comme les propos de ce mĂ©decin : "Je suis amoureux de ma fille adoptive, ma famille le sait, l'accepte. Pourquoi semez-vous la zizanie dans les familles ?" Ou ceux de cet ingĂ©nieur : "J'ai des relations quotidiennes avec ma fille de 13 ans, pourquoi empĂȘchez-vous les gens d'ĂȘtre heureux ?" Ou encore ceux d'un agent technique : "OĂč commence et finit l'inceste ? J'ai une fille de 10 ans, que j'aime caresser, et je me demande si mes pulsions sont coupables."
Ces paroles qui résonnent aujourd'hui d'une façon choquante l'avaient-elles étonnée il y a presque quarante ans de cela ? "Dans le contexte de l'époque, pas tellement", répond Eva Thomas.
Sur le plateau, le surprenant discours d'un médecin gynécologue
En plateau, le 2 septembre 1986, elle insistait aprĂšs ces "tĂ©moignages" sur la toute-puissance du parent face Ă l'enfant, qui peut le laisser "se bercer d'illusions", rĂ©pĂ©tait que, en cas d'inceste, "l'enfant subit toujours une violence". Et alors qu'elle se tournait vers un invitĂ© en quĂȘte de son approbation, elle entendait un discours particuliĂšrement surprenant, celui d'un mĂ©decin gynĂ©cologue, renommĂ© Ă l'Ă©poque (et aujourd'hui dĂ©cĂ©dĂ©).Â
RĂ©futant le terme de "violence", le mĂ©decin prĂ©fĂ©rait parler "de persuasion, de tendresse, et mĂȘme de jeux de sĂ©duction". Plusieurs de ses patientes lui avaient racontĂ© leur premiĂšre relation incestueuse, affirmait-il, "dans des conditions... 'romantiques' : feu de bois, musique, tendresse⊠Et une des caractĂ©ristiques essentielles de ces victimes de l'inceste, appuyait-il, c'est qu'elles sont⊠elles crĂšvent de tendresse".
Sidérée, en écoutant de nouveau l'intervention de ce médecin, par "la confusion qu'il organise dans son discours", Eva Thomas rappelle encore une fois que "une relation sexuelle d'un adulte sur un enfant, ce n'est jamais de la tendresse. C'est un crime, point".
Extrait de "Inceste : le combat d'Eva", un témoignage diffusé dans "Envoyé spécial" le 21 janvier 2021.
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