Les pompiers exposés aux retardateurs de flammes, des polluants "très toxiques" et cancérigènes

Des chercheurs ont trouvé un produit chimique neurotoxique et cancérigène dans le corps des pompiers. Il s'agit des retardateurs de flammes, une substance présente partout dans les maisons et utilisée pour ralentir la propagation des incendies.
Article rédigé par Anne-Laure Dagnet
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Des pompiers interviennent à Resson, dans la Meuse, pour l'incendie d'une maison le 2 février 2012 (photo d'illustration). (PHOTOPQR / L'EST REPUBLICAIN / MAXPPP)

Pour la première fois en France, une étude indique la présence d'un polluant cancérigène dans le corps de pompiers. L'équipe de l'émission "Vert de Rage", sur France 5, a enquêté et a dévoilé mercredi 18 octobre, lors d'une conférence de presse, les résultats de deux études menées par des chercheurs indépendants. Elles révèlent que les retardateurs de flammes, ces produits chimiques contenus dans tous les objets du quotidien (meubles, textiles, etc.), font des ravages chez les pompiers. Il s'avère que 4 % d'entre eux seraient victimes de cancers dûs aux polluants, comme les retardateurs de flammes. 

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En France, il n'existe pas de données précises sur le nombre de pompiers professionnels atteints de cancer, qui seraient aux alentours de 2 200. "C'est tabou, Personne n'en parle", explique Martin Boudot, qui réalise l'émission "Vert de Rage". "En 2003, un rapport commandé par Nicolas Sarkozy recommandait qu'il y ait un travail épidémiologique sur les pompiers et une meilleure prise en compte des cancers. On est 20 ans après, ce n'est toujours pas le cas"

Seulement un cancer reconnu comme maladie professionnelle

Le réalisateur s'étonne que la France ne reconnaisse qu'un seul cancer comme maladie professionnelle chez les pompiers, alors qu'il y en a une trentaine aux États-Unis. Pour faire bouger les lignes, l'équipe de Martin Boudot a donc mené une expérience. Des pompiers volontaires ont porté, pendant leurs opérations, des bracelets capables de détecter des polluants. Et ils en ont en effet détectés, notamment des retardateurs de flammes. 

"Les retardateurs de flammes sont des produits utilisés dans les mousses de vos canapés, dans les plastiques des jouets, dans votre voiture. Ce sont des choses qui servent normalement à retarder la propagation du feu" , indique Martin Boudot. 

"C'est une bonne idée à l'origine mais le problème, c'est que c'est inefficace et en plus très toxique"

Martin Boudot, réalisateur de l'émission "Vert de Rage"

à franceinfo

Ces retardateurs de flammes, libérés par les fumées, sont neurotoxiques et cancérigènes. Ils ont aussi été retrouvés dans les analyses de sang pratiquées sur les pompiers.

>> Amiante : après plusieurs cas de cancers, les pompiers du Nord portent plainte

Stéphane Morizot, un ancien soldat du feu qui vient de prendre sa retraite, a récemment appris qu'il souffre d'un cancer de la prostate. Il défend aujourd'hui des mesures de protection toutes simples, car les pompiers sont aussi contaminés par la peau. "Tout ce dont on dispose pour la phase active est très efficace. C'est en amont et après l'opération qu'il faut modifier, entre autres, nos "process", demande l'ancien pompier. On va prendre les paires de gants en nitrile pour éviter le contact de la peau avec tous les équipements que l'on peut toucher. Il faut changer de cagoule à chaque opération de lutte contre un incendie et se doucher le plus rapidement possible au retour en casernement"

À la tête de son association, Stéphane Morizot veut sensibiliser ses collègues pour qu'ils se protègent des fumées toxiques. Il réclame aussi un vrai suivi des pompiers et la reconnaissance de plusieurs cancers comme maladies professionnelles chez les pompiers. 

Les pompiers exposés à des polluants cancérigènes, reportage d'Anne-Laure Dagnet

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