Cancer de la thyroïde : comment peut-on limiter les opérations chirurgicales jugées inutiles ?
Une étude du CIRC révèle que 500 000 personnes dans le monde auraient fait l'objet d'un surdiagnostic concernant le cancer de la thyroïde.
"Même si mon choix peut ne pas paraître évident, je veux me laisser une chance de vivre normalement. Et me plier à une surveillance active, fût-elle compliquée", confie Anne au Parisien. On lui a découvert deux nodules cancéreux dans le cou en 2014. Malgré l'avis d'un premier médecin, Anne a refusé de subir une ablation chirurgicale de la thyroïde et préfère surveiller l'évolution de ces grosseurs, comme le relate le quotidien.
En France, des milliers de patients atteints d'un cancer de la thyroïde subissent chaque année des traitements médicaux sévères. Et ce, sans que la gravité de leur cas ne le justifie, selon une étude du CIRC, l'agence de recherche sur le cancer de l'Organisation mondiale de la santé, publiée 18 août.
Depuis vingt ans, 500 000 personnes dans le monde auraient fait l'objet d'un surdiagnostic du cancer de la thyroïde, entraînant des milliers d'opérations chirurgicales et des traitements lourds, comme la prise d'iode radioactif et d'hormones de synthèse à vie pour pallier l'absence de thyroïde ou encore l'ablation des ganglions du cou. Mais comment éviter la multiplication de ces "surtraitements" liés au surdiagnostic du cancer de la thyroïde ?
En limitant le dépistage
En France, des médecins s'interrogent sur la multiplication des dépistages, en cas d'apparition de nodules. "Tout a commencé dans les années 1980 avec les échographies à disposition", explique le professeur Schlumberger au Parisien, on s'est mis à en faire à tout bout de champ même, quant à la palpation, la thyroïde paraissait normale." Or pour cet endocrinologue à l'institut Gustave-Roussy de Villejuif (Val-de-Marne), sur les 10 000 cancers de la thyroïde diagnostiqués chaque année en France, "seuls 4 000 méritent d'être traités tout de suite." Et en limitant les dépistages, de nombreuses ablations de la thyroïde pourraient être évitées.
L'American Thyroid Association, à laquelle appartient le professeur Martin Schlumberger, recommande ainsi d'éviter le dépistage systématique, comme cela est fait actuellement. Il préconise plutôt d'effectuer des cytoponctions (le prélèvement de cellules avec l'aide d'une aiguille) uniquement si le nodule dépasse les 10 millimètres, rapporte le Parisien.
En développant une surveillance active
Une surveillance active des nodules pourrait également éviter leur ablation chez certains patients, selon l'endocrinologue. Si celle-ci révèle un "micro-cancer" papillaire, plutôt que d'effectuer des opérations lourdes, il faudrait privilégier cette solution et n'avoir recours à la chirurgie uniquement en cas de progression.
Les chercheurs du CIRC citent également une étude de 2014 qui montre qu'une simple surveillance est tout aussi efficace que la chirurgie pour éviter les décès liés aux "micro-cancers".
Le cancer de la thyroïde n'est pas le seul à être confronté au surdiagnostic, c'est également le cas du cancer du sein. Aux États-Unis, une étude de 2012 estimait que plus d'un million de femmes avait été traitées inutilement contre ce cancer, interrogeant sur les campagnes de prévention et les mammographies systématiques. Les mêmes controverses concerent également le dépistage du cancer de la prostate.
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