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"C'est une chasse aux sorcières" : l'eurodéputée écolo Michèle Rivasi crée la polémique avec la projection d'un documentaire controversé sur les vaccins

La députée européenne a invité à Bruxelles Andrew Wakefield, radié de l'Ordre des médecins britannique, après la publication d'une étude dans laquelle il évoquait un lien possible entre vaccins et autisme.

Article rédigé par Louis Boy
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
L'eurodéputée écologiste Michèle Rivasi au siège d'Europe Ecologie-Les Verts, à Paris, le 7 novembre 2016. (SAMUEL BOIVIN / CITIZENSIDE)

Jusqu'où peut-on remettre en cause les vaccins ? Députée européenne et finaliste de la primaire d'EELV en octobre 2016, Michèle Rivasi est au centre des critiques pour avoir programmé à Bruxelles (Belgique), jeudi 9 février, une projection de Vaxxed, un documentaire controversé sur les vaccins, en présence de son très contesté réalisateur Andrew Wakefield. L'événement a suscité la colère du groupe écologiste au Parlement européen. Une autre projection, prévue le 13 février à Paris, a été annulée, remplacée par un débat sans Andrew Wakefield, a annoncé Michèle Rivasi mardi. Franceinfo vous explique les raisons de cette polémique.

Andrew Wakefield, une figure pour les antivaccins

Le Britannique Andrew Wakefield est une figure dans le milieu des sceptiques et des opposants aux vaccins, raconte le Huffington Post (en anglais), depuis une étude, publiée en 1998 dans la revue The Lancet, dans laquelle il évoque un lien possible entre le vaccin Rougeole-Oreillons-Rubéole (ROR) et l'autisme. Une conclusion fondée sur l'observation de 12 enfants et le témoignage a posteriori de leurs parents, convaincus que les symptômes de l'autisme ont débuté après la vaccination.

L'étude a été contestée de toutes parts. Aucune autre organisation n'a réussi à reproduire ses conclusions et trouver un quelconque lien entre le vaccin ROR et l'autisme, explique le Huffington Post. En 2004, 10 de ses 12 cosignataires ont officiellement retiré leur signature de cette étude, finalement dépubliée des années plus tard par The Lancet. Andrew Wakefield, lui, a été radié par le Conseil de l'Ordre des médecins outre-Manche, rappelle Allô Docteurs. Il lui a notamment été reproché de ne pas avoir fait état de ses liens financiers avec des avocats qui tentaient de traîner en justice les fabricants de vaccins.

Depuis sa disgrâce, il n'a pas changé de position : son nouveau film accuse toujours le vaccin ROR d'être la cause de la hausse du nombre de cas d'autisme détectés aux Etats-Unis, et l'agence du médicament américaine, le CDC, d'avoir couvert des tests présentés comme alarmants. En 2016, le festival du film de Tribeca, à New York, a dû déprogrammer Vaxxed face à la polémique provoquée par Andrew Wakefield.

Rivasi a reçu "un tsunami" de critiques et de soutiens

Depuis l'annonce de son événement, Michèle Rivasi, elle aussi, constate à quel point Andrew Wakefield est contesté. Elle explique que le flot des courriers qu'elle reçoit est "comme un tsunami".

Je suis envahie par les pro-, les anti-, les lobbies, c'est une vraie chasse aux sorcières. J'ai l'impression d'être instrumentalisée, d'un côté comme de l'autre.

Michèle Rivasi

à franceinfo

La polémique n'a pas échappé au groupe écologiste au Parlement européen. Les premières affiches de Michèle Rivasi annonçaient que la projection bruxelloise aurait lieu dans une salle du Parlement, et le logo du groupe y figurait. Mais le profil de son invité est mal passé quand le bureau du groupe a, comme le veut la procédure, étudié sa demande de financement pour une salle. "La réponse a été quasi unanime, explique le député européen Pascal Durand à franceinfo. On lui a dit que si elle voulait organiser cette projection, elle ne le ferait pas au nom du groupe et à l'intérieur du Parlement." Michèle Rivasi a accepté et modifié ses affiches.

Une étude "assez faible", reconnaît Rivasi

"J'ai été contactée par plusieurs associations qui m'ont demandé de faire passer le film, et de faire venir le réalisateur", raconte Michèle Rivasi. Elle-même ne se décrit pas comme "antivaccins" – elle insiste sur leurs bienfaits reconnus – mais "vaccins-sceptique". Elle s'est reconnue dans "tout un tas de questions posées par le film, sur les conflits d'intérêts liés aux vaccins, le fait qu'on n'ait pas accès à toutes les études cliniques sur les vaccins..."

L'eurodéputée assure qu'elle ne connaissait pas la réputation d'Andrew Wakefield quand elle a décidé d'organiser la projection et le débat qui l'accompagne. Sa radiation par l'Ordre des médecins n'est "pas forcément un critère" à ses yeux : elle cite l'exemple, en France, de Philippe Even, radié après son guide des médicaments "inutiles ou dangereux". En revanche, elle assure : "Il est hors de question que j'adoube quelqu'un qui a des conflits d'intérêt". Elle reconnaît par ailleurs que son étude sur le vaccin ROR et l'autisme, pourtant au cœur du film, lui semble "assez faible".

Pourquoi, alors, avoir maintenu l'invitation du Britannique ? "Je l'aurai en face, et je pourrai l'attaquer sur sa théorie", ainsi que sur les autres nombreuses critiques dont il fait l'objet, assure l'eurodéputée. "Il est très discuté scientifiquement, mais il ne faudrait pas que ce soit un lanceur d'alerte mis au pilori, s'inquiète-t-elle. Je n'en suis pas sûre mais je préfère l'avoir en face pour lui poser la question." L'exclure, conclut-elle, n'aurait fait que donner du grain à moudre aux complotistes.

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