Taux de TVA : le mauvais exemple des barres chocolatées
Une fin d'après-midi dans un
supermarché, au rayon confiseries. Mars, Kit Kat, Kinder, Milka, Snickers... Ici des
barres chocolatées, là des barres aux céréales, ailleurs au chocolat noir, plus
loin au chocolat blanc. Encore plus loin des barres au chocolat au lait, aux
céréales, nappées au caramel : les recettes se déclinent à l'infini. A la
caisse, surprise : à emballage différent mais composition quasi égale, le
taux de TVA flotte tantôt à 5,5%, tantôt à 19,6%. Chez le chocolatier, rebelote
: selon la pièce choisie (bonbon, bouchée, plaque, composition mi-blanc –
mi-noir...), la TVA n'est pas la même.
Au départ, une affaire de margarine
Il faut revenir aux années
70, lorsque, vingt ans après la création de la TVA, le gouvernement
français veut protéger la production de beurre, particulièrement exposée à la
concurrence de sa cousine la margarine. Le levier le plus simple est alors de
surtaxer la margarine via la TVA. Pour ne pas créer le sentiment d'un
acharnement fiscal et paraître fausser outrageusement la concurrence, d'autres
produits rejoignent le giron des damnés fiscaux : parmi eux, les confiseries, le
chocolat. Puis le caviar, inséré dans la liste sous Valéry Giscard d'Estaing. Les
années ont passé, et, lobbying des artisans chocolatiers aidant, les rigueurs
fiscales qui pesaient sur le chocolat se sont allégées. Elles se sont aussi
complexifiées à l'extrême.
Deux taux pour... dix catégories
"Il y a dix catégories
de chocolat , explique Isabelle Gueuné, la secrétaire générale de la
confédération des Chocolatiers et confiseurs de France. Elles sont prévues
par le "décret chocolat" du 29 juillet 2003, qui établit la liste
des chocolats pour lesquels on appliquera ou la tva à 5,5% ou la TVA à 19,6%. Par
exemple, les chocolats vermicelle, flocon, en poudre, ou le cacao maigre seront
taxables à 5,5%. Les chocolats blanc, au
lait, fourré, ou à la crème, eux, seront taxés à 19,6%. "
Si l'on applique ce distingo aux
barres chocolatées, le problème se complique, puisqu'elles sont souvent
composées, en quantités différentes, de plusieurs autres ingrédients (céréales,
caramel...), qui conditionnent, eux aussi, l'appartenance du produit à tel ou tel
régime.
Ainsi, si on applique simplement un taux de 19,6% de TVA à une barre chocolatée
composée exclusivement de chocolat, il faudra qu'une barre céréalière contienne au moins 50%
de céréales pour qu'elle puisse bénéficier du taux réduit. C'est-à-dire, pour
ce qui nous occupe, moins de 50% de chocolat... On voit là tout l'intérêt que
certains industriels producteurs de célèbres marques de barres chocolatées ont
eu à changer leur formule au gré des législations. Quitte, après s'être clamé "tout
chocolat", à se renier.
Langouste, truffes, obésité et
cacao
Or, au regard de ce que peuvent
éventuellement contenir certaines barres chocolatées (huile de palme, colorant,
conservateurs...), on peine à comprendre pourquoi, dans les rayons, certaines d'entre
elles bénéficient d'un taux réduit et d'autres pas. Notamment du point de vue,
d'abord, des politiques de santé, puisqu'un taux de TVA réduit est, en quelque
sorte, une incitation pour le consommateur à les préférer à d'autres.
On
comprend aisément qu'un taux réduit puisse s'appliquer à un chocolat à forte
teneur en cacao, plus difficilement lorsqu'il s'agit d'une barre chocolatée
particulièrement calorique. C'est, implicitement, ce que dénonce notamment l'UFC - Que choisir. Ensuite, au regard de ce qu'est le chocolat aujourd'hui,
c'est-à-dire un produit sorti depuis longtemps de la sphère des produits de
consommation de luxe, les distinctions entre catégories de chocolat paraissent largement
obsolètes. Et, pour les artisans chocolatiers, très coûteuses en paperasse.
Certains rappellent, au passage, que les truffes et la langouste bénéficient
encore du taux réduit de 5,5%.
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