Misère étudiante : la malnutrition chez les jeunes "commence à devenir chronique"
Pour le président de la Croix-Rouge française, Jean-Jacques Eledjam, "la précarité augmente chez les moins de 25 ans (...) il y a une forme de misère cachée".
La Croix-Rouge française a publié mercredi 31 mai son deuxième rapport annuel sur les jeunes. L'association s'inquiète notamment de la hausse de la précarité des moins de 25 ans et des conséquences de leur alimentation sur leur santé. "L'entrée dans la jeunesse, c'est tout un bouleversement nutritionnel", souligne le professeur Jean-Jacques Eledjam, président de la Croix-Rouge française, mercredi sur franceinfo.
franceinfo : Quel est l'état des lieux de la précarité chez les jeunes actuellement ?
Jean-Jacques Eledjam : La précarité augmente chez les moins de 25 ans et elle prend une part relativement importante parce qu'il y a une forme de misère cachée. Quand on est jeune, quand on espère la liberté, quand on quitte ses parents et quand on se lance dans la vie, on voudrait avoir des responsabilités totalement différentes. Et c'est un moment de déséquilibre relativement important. Il leur reste à peu près, selon les études que nous avons faites, 89 euros par mois pour vivre et se nourrir de façon tout à fait normale.
Il existe aujourd'hui une cinquantaine d'épiceries solidaires en France, mises en place par la Croix-Rouge, notamment pour aider les jeunes dans le besoin. Comment fonctionnent-elles ? Est-ce facile de pousser cette porte pour un étudiant ?
Il faut saluer les bénévoles qui s'occupent de ces épiceries solidaires. On se rend compte qu'ils ont été obligés d'aménager les horaires, d'abord de façon à pouvoir les recevoir, ensuite parce qu'ils viennent dans la plus grande discrétion possible. C'est un problème de fierté, de dignité. C'est un moment où vous avez l'impression que le monde vous appartient et que, finalement, vous allez manquer cette marche parce que vous n'avez pas de quoi vous nourrir. J'en suis choqué. Cette difficulté des étudiants a toujours existé, certains ont travaillé pour faire des études, mais là ça devient à l'évidence patent, et ça commence à devenir chronique. Alors pourquoi épicerie solidaire et non pas distribution alimentaire ? J'ai la conviction qu'il faut redonner aux gens qui poussent la porte d'une épicerie solidaire une certaine forme de dignité et qu'ils aient l'impression de participer à leur bien-être, à leur entrée dans la vie. Et s'ils participent financièrement, même modestement, ils ont l'impression qu'on ne leur fait pas la charité.
Sur quel curseur faut-il jouer pour améliorer la malnutrition chez les jeunes ?
Je voudrais insister sur le fait que le premier accès qui est supprimé dans la vie d'un jeune, c'est l'accès à la santé. L'entrée dans la jeunesse, c'est tout un bouleversement nutritionnel. L'éducation à la santé est quelque chose sur laquelle il faut qu'on insiste, et à laquelle les pouvoirs publics doivent s'intéresser. Les jeunes ont des modes alimentaires relativement différents. Quand vous ne mangez que des fruits ou des aliments très riches en graisse ou en sel, c'est peut-être parce que vous n'avez pas cette éducation à la santé.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.