Un "essai clinique sauvage" du Pr Joyeux interdit par l’ANSM
Un essai clinique "sauvage" mené "illégalement" sur au moins 350 malades de Parkinson ou d'Alzheimer. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a annoncé le 19 septembre son interdiction. Cet essai illégal a été mené en partie dans l’Abbaye Saint-Croix, près de Poitiers, au sein d’une structure baptisée Fonds Josefa. Et le vice-président de cette structure n’est autre que le professeur Henri Joyeux, contesté par la communauté médicale notamment à cause de ses positions anti-vaccins.
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"Une atteinte grave au code de la santé publique"
Cet essai visait à tester des molécules dont "la qualité n'est pas connue", selon l'ANSM. Outre cette décision de police sanitaire, "l'ANSM a également saisi la justice sur ces pratiques illégales", a-t-elle indiqué dans un communiqué. C’est précisément le pôle Santé du parquet de Paris qui a été saisi, a précisé à l'AFP Bernard Celli, directeur de l'inspection à l'ANSM.
Découvrir de tels essais sauvages "est très rare, a fortiori quand ils sont de cette ampleur", a expliqué M. Celli, selon qui il s'agit "d'une atteinte grave au code de la santé publique et au code pénal".
Une hormone aux effets inconnus sur la santé
L'expérimentation consistait à appliquer aux patients des patchs contenant deux molécules, appelées valentonine et 6-méthoxy-harmalan. Selon l'ANSM, ces molécules sont proches de la mélatonine, hormone fréquemment utilisée pour mieux dormir mais déconseillée à certaines populations par l'agence sanitaire Anses en raison d'effets secondaires.
Sur le site internet du Fonds Josefa, son fondateur, le professeur Jean-Bernard Fourtillan, revendique la découverte de la valentonine, supposée "protéger notre organisme et assurer la régulation des vies psychique et végétative". L’ANSM réplique : "La qualité, les effets et la tolérance de ces substances ne sont pas connus" et "un risque pour la santé des participants ne peut être exclu". Un essai que l’Agence qualifie même de pratique "aux confins du charlatanisme".
Inspection de contrôle
Sur son site internet, le Fonds Josefa se présente comme "un fonds de dotation à but non lucratif", auquel "ont été cédés […] les droits de propriété intellectuelle des brevets de médicaments" basés sur les molécules testées lors de l'essai illégal.
En pratique, "il semble que [les patients] passaient une nuit [à l’abbaye] et qu'ils subissaient une prise de sang le matin", explique Bernard Celli à l’AFP. L'ANSM a d’ailleurs découvert cet essai illégal grâce à une inspection de contrôle menée début septembre au laboratoire où ces prises de sang étaient envoyées pour analyse.
Aujourd’hui, l'ANSM demande aux participants à ces essais "de ne plus utiliser ces patchs" et "de consulter rapidement [leur] médecin traitant pour l'informer de la situation, réaliser un bilan de santé et s'assurer que la prise en charge de [leur] maladie est adéquate".
"Je pense que c’est une faute lourde, une faute grave"
Interrogée sur France Inter le 19 septembre, la ministre de la Santé Agnès Buzyn se dit "effondrée, horrifiée" et assure qu’il y aura "des sanctions et des poursuites". Elle rappelle également que "la loi est très claire sur les essais cliniques en France, elle est remarquablement encadrée". Elle poursuit : "que des professionnels de santé, si on peut encore les appeler comme ça, se permettent de faire des essais cliniques sans la régulation nationale, je pense que c’est une faute lourde, une faute grave et nous verrons quelles sanctions peuvent être prises."
Le Pr Joyeux assure que "ce n’est pas un essai clinique"
Egalement contacté par France Inter, le professeur Joyeux assure que l’hormone testée sur les patients présente un "intérêt extrêmement important pour l’avenir des traitements concernant les problèmes de sommeil, de l’Alzheimer et de Parkinson". Selon lui, "l’ANSM est parfaitement au courant, ce n’est pas un essai clinique […] donc ça ne peut pas être un essai clinique sauvage".
Le Pr Joyeux, partisan des produits naturels et figure des mouvements anti-vaccins, avait été radié par le conseil de l’Ordre des médecins du Languedoc-Roussillon en juillet 2016. Une décision finalement suspendue par une procédure d’appel en juin 2018.
Le Pr Henri Joyeux, un médecin controversé. Reportage diffusé le 28 février 2018 dans le Magazine de la Santé.
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