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Une province du Canada va tester la décriminalisation des drogues dures

En Colombie britannique, à l’extrémité ouest du pays, sur la côte pacifique, la consommation de drogues dures en petite quantité ne fera plus l’objet de poursuites à compter de ce mardi 31 janvier.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Illustration drogues. (BRENDAN SMIALOWSKI / AFP)

On parle bien là des opiacées, l'héroïne, la morphine, le fentanyl, et aussi la cocaïne, l'ecstasy, les métamphétamines, tout ce qu'il est convenu d'appeler "drogues dures". À compter du mardi 31 janvier, en posséder et en consommer pour son usage personnel ne sera plus illégal dans cette province canadienne et ce jusqu'à un plafond de 2,5 grammes. La consommation restera toutefois interdite dans les transports en commun, les gares, les établissements scolaires.

La Colombie britannique, qui compte cinq millions d'habitants, avait déjà dépénalisé la consommation des "drogues douces" comme le cannabis, il y a cinq ans. Mais décriminaliser l'usage des opiacées est une décision beaucoup moins courante. Seuls le Portugal et l'État de l'Oregon aux États-Unis ont pris une décision similaire. Vu de France, où l'interdiction reste la règle même pour le cannabis, cette décision canadienne peut paraitre sidérante. Mais elle répond à une situation bien particulière.

Plus de 100 000 morts aux États-Unis

Le Canada, comme les États-Unis sont confrontés à ce qu'on appelle la "crise des opiacés " qui fait des ravages. Le fentanyl en particulier, ce produit de synthèse peu onéreux mais extrêmement puissant, initialement commercialisé comme antidouleur par les laboratoires pharmaceutiques est devenu la drogue la plus répandue et de loin. Elle est désormais au cœur du trafic mafieux. Et le fentanyl est destructeur. On lui impute plus 87% des morts par overdose au Canada. Plus de 27 000 décès en six ans. Dont la moitié en Colombie britannique. Presque 5 000 en 2022, c'est autant que le nombre de morts du Covid dans la province.

Dans les rues de Vancouver, la capitale de la région, certains quartiers sont envahis par les tentes des junkies, et sont désormais surnommés "Zombieland". Et ce n'est rien par rapport aux États-Unis : les opiacés y ont fait plus de 100 000 morts en 2022. La décriminalisation vise à changer de logique : cesser d'arrêter les usagers qui recommenceront de toute façon à la première occasion. Plutôt leur proposer un suivi médical et chercher à enrayer le trafic. Au Portugal, les résultats, même s'ils sont controversés, ont été plutôt positifs avec une diminution du nombre d'overdoses.

Vente et trafic interdits

La ministre de la Santé canadienne Carolyn Bennett l'affirme : seule la consommation est dépénalisée, pas la vente ou le trafic. "Ce n'est pas une légalisation, affirme-t-elle. Nous n'avons pas pris cette décision à la légère. Cette décision est une première et elle implique des responsabilités pour la province." La Colombie britannique va tester ce système pendant trois ans et bien sûr, les neuf autres provinces du Canada vont surveiller les résultats avec attention, c'est aussi ce qu'explique Carolyn Bennett. Une autre province de l'ouest, le Yukon, s'interroge déjà sur l'hypothèse d'adopter la même mesure. D'anciens toxicomanes proposent d'aller plus loin, en autorisant la vente pour assécher les trafics et pour s'assurer aussi que les opiacés mis en vente soient non frelatés donc un peu moins dangereux, en quelque sorte. Mais pour l'instant, il demeure totalement exclu d'autoriser la vente.  

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