La Corée du Sud va imposer la vidéosurveillance dans les blocs opératoires
Dans ce pays d'extrême Orient, le Parlement vient d’adopter une décision saisissante : des caméras de vidéosurveillance vont être installées pendant les opérations chirurgicales.
Imaginez, vous êtes hospitalisé. Placé sous anesthésie générale pour une intervention. Et là, pendant toute la durée de l’opération chirurgicale, tout est filmé par des caméras installées dans le bloc. Ça pose quand même des questions sur protection des droits, de la vie privée, de la liberté individuelle. Mais ce sera donc le cas très prochainement dans tous les hôpitaux et toutes les cliniques de Corée du Sud. Les établissements de santé ont deux ans pour se conformer à cette décision, adoptée le 31 août au soir par l’Assemblée Nationale de Corée du Sud. Quelques hôpitaux ont d’ailleurs précédé l’appel et déjà installé des systèmes de caméras ces derniers mois. D’ici deux ans, toutes les interventions au bloc seront soumises à vidéosurveillance, avec malgré tout quelques dérogations, notamment pour certaines opérations aux urgences. Cette décision est l’aboutissement d’un très long débat public sur le sujet dans ce pays de 51 millions d’habitants. La première fois que l’Assemblée avait examiné cette hypothèse, c’était il y a 6 ans et demi. Si le texte est passé cette fois, c’est parce qu’une immense majorité de Sud-Coréens y est favorable : 98% selon un sondage effectué en juin dernier.
Scandales sexuels
Ca s’explique par une série de scandales dans plusieurs cliniques: plusieurs affaires qui à chaque fois se sont déroulées pendant que le patient ou la patiente est endormi/e. Par exemple, il y a 3 ans, à Busan, la 2ème ville du pays, un homme est tombé dans le coma pendant une opération. Et il est apparu après coup que l’intervention n’avait pas été effectuée par le chirurgien, mais par un commercial qui vendait du matériel médical. A Séoul, la capitale, autre scandale : un chirurgien a fêté son anniversaire avec force flonflons pendant l’opération et l’anesthésie. S’y ajoutent aussi plusieurs scandales d’attouchements sexuels pendant les anesthésies. Autre cas de figure : des vidéos à caractère sexuel tournées aux dépens des patients pendant qu’ils sont endormis. Une pratique d’ailleurs très répandue en Corée du Sud, bien au-delà des hôpitaux : c’est surnommé le « molka ». Le principe : des « caméras espion » qui filment une femme à ses dépens. Et c’est un véritable fléau : le nombre de cas a été multiplié par 10 en 10 ans selon une étude de l’ONG Human Right Watch.
Colère des médecins
Cette décision fait presque l'unanimité. Même la Commission Coréenne des Droits de l’Homme s’est déclarée favorable à ce système de vidéosurveillance. Il faut dire aussi que la Corée du Sud est un pays très habitué à ces formes de contrôle, par la vidéosurveillance et aussi par la voie numérique et les smartphones. On l’a vu à l’occasion de la pandémie de Covid. Les seuls à vraiment protester, ce sont les médecins. L’association médicale coréenne dénonce, je cite « une grave erreur », une « atteinte à la vie privée ». Et elle s’indigne qu’on puisse assimiler l’immense majorité des praticiens hospitaliers à des cas de scandale isolés. Elle a donc l’intention de déposer des recours pour éviter l’entrée en application du texte. Mais vu le soutien massif du grand public à cette disposition, ces recours ont peu de chances d’aboutir.
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