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Guerre en Ukraine : les Russes approuvent l'action de Vladimir Poutine à une écrasante majorité, selon l'institut d'enquête Levada

L’une des interrogations récurrentes soulevées par la guerre en Ukraine est de savoir si la population russe peut, à un moment donné, manifester son opposition au conflit et à Vladimir Poutine. Ce sondage du plus sérieux des instituts de sondage russes donne des éléments de réponse à la question.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Le président russe Vladimir Poutine tient une conférence de presse à Novo-Ogaryovo (Russie); le 25 mars 2022. (MIKHAIL KLIMENTYEV / AFP)

Les résultats sont saisissants. Selon un sondage publié jeudi 31 mars par Levada, l'institut d'enquête russe le plus sérieux, le taux d'approbation des Russes à l'action de leur président Vladimir Poutine atteint 83% (lien en anglais). Dans leur immense majorité, les 145 millions de Russes soutiennent donc l’action de Moscou. C’est presque 20 points de plus qu’en décembre (65%), avant la guerre en Ukraine. Vladimir Poutine retrouve ainsi des niveaux de soutien sans précédent depuis la prise de contrôle de la Crimée, il y a huit ans. Cet institut d’enquête est fiable. Levada est globalement considéré comme le centre de recherche le plus neutre et indépendant, aujourd’hui en Russie.

Toujours selon cette enquête, 69% des Russes estiment que leur pays "va dans la bonne direction". Ils n’étaient que 46% en novembre. Ils sont ainsi une majorité à avoir une image négative des Occidentaux : ce n’est pas nouveau pour les États-Unis mais ça l’est davantage pour l’Union européenne. Ainsi, 48% des Russes ont une image négative de l’Europe contre 37% qui ont une image positive. L’opinion russe semble donc, comme en 2014, animée d’une poussée de fièvre nationaliste, d’un réflexe de cohésion autour du pouvoir en place et contre l’ennemi extérieur. Vladimir Poutine peut se prévaloir d’une vraie popularité et d’un réel soutien populaire.  

Des chiffres à relativiser

Cela dit, la population russe ne dispose pas totalement de son libre arbitre. On ne peut pas prendre tous ces chiffres comme argent comptant. Il y a d’abord l’effet de la censure. Rappelons que les derniers médias indépendants, comme la radio Echo de Moscou, le journal Novaia Gazeta ou la télévision Dodj, ont tous fermé leurs portes ou suspendu leurs activités. Ils considérent que le travail journalistique indépendant est devenu impossible.

En effet, l’organisme de contrôle des médias, Roskomnadzor, surveille tout le monde de près. L’utilisation du mot "guerre" n’est toujours pas autorisée. Et le culte de la personnalité du chef - une vieille histoire en Russie - bat son plein depuis déjà plusieurs années. Les Russes sont donc nourris à une information d’État à sens unique. À la censure s’ajoute également l’autocensure : la peur d’être arrêté ou maltraité si l’on émet un avis dissident, a fortiori si l’on critique Vladimir Poutine. Cela relativise le travail des instituts d’enquête. Dernier élément de pondération : le soutien à Vladimir Poutine varie selon les catégories de population. Les jeunes, surtout en milieu urbain, sont les plus critiques. Là on est plutôt sur du 50-50 selon plusieurs chercheurs russes. C’est là aussi que l’on trouve les partisans de l’opposant emprisonné Alexeï Navalny.  

La conclusion logique est qu’il ne faut pas miser sur un éventuel soulèvement populaire en Russie. C’est une hypothèse très peu probable, presque une utopie. Ce n’est pas de là que peut venir un changement de cap. Vladimir Poutine peut légitimement penser que les Russes le soutiennent, même si la fièvre nationaliste va sans doute redescendre un peu, surtout si le conflit s’enlise. Si inflexion de l’offensive russe il y a, ce sera plus probablement dû aux impasses militaires en série ou aux hypothétiques pressions de l’entourage du maître du Kremlin. Mais pour l’instant, Vladimir Poutine est dans la place. et plutôt deux fois qu’une.    

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