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Si j'étais... Barack Obama

Emu, Barack Obama a fait ses adieux aux Américains dans un discours prononcé à Chicago, mardi 10 janvier. Karl Zéro s'est imaginé dans sa peau.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Barack Obama dans le bureau ovale, le 24 décembre 2016. (SIPANY/SIPA / SIPA USA)

Si j’étais Barack Obama, j'aurai fait mes adieux en direct de Chicago. C’était noir de monde et les tickets pour entendre mon bilan en demi-teinte se sont vendus jusqu'à 5 000 dollars au marché noir. Demi-teinte, marché noir, c’est curieux hein…

Malgré mes deux mandats, le clivage de la couleur est toujours bien présent, tapi jusque dans notre langage courant. Tout ce qui est noir, sombre, est synonyme de mauvais. Si tu es Noir aux Etats-Unis, tu es chômeur donc tu travailles au "black". Alors on te jette des regards noirs et tu broies du noir. Tu vois tout en noir parce que tu as mangé ton pain blanc, ta vie tourne à la série noire, parce que tu es la bête noire de la société. Tu rentres dans une colère noire en repensant au jour de mon élection (à marquer d’une pierre blanche) et à l’espoir qu’il avait suscité.

J’ai échoué dans ma mission, il y aura toujours cette connotation négative intrinsèque au noir, et je n'ai rien pu faire. Les synonymes de noir parlent d’eux-mêmes: hostile, mauvais, méchant, mélancolique, menaçant, obscur, sinistre, ténébreux… Moi je n’en n’ai jamais réellement souffert, étant né en demi-teinte, et ayant eu un parcours de pur produit de diplômé de "l’establishment made in USA". Mais mes électeurs, ils ont pris cher. Sans doute encore plus sous mes mandatures qu’avant.

Si j’étais Barack Obama, mon seul regret serait que ce soit finalement ça qu’on retienne surtout de mon passage à la Maison Blanche : "Barack Obama, premier et dernier président noir des Etats-Unis. Elu pour en finir avec la ségrégation à l’égard des Noirs, il a fait chou-blanc laissant à l’issue de son passage au bureau ovale une Amérique plus blanche, plus "white-power" tu meurs. Celle-là même qui a élu Donald Trump."

Colère noire

J’ai dit que si j’avais été candidat face à Trump j’aurais gagné, mais vu ce que sont les électeurs aujourd’hui, je n’en suis pas si sûr. Parce que c’est depuis mon arrivée en 2008 qu’il y a eu cette explosion de mouvements "alt-right" prônant la suprématie blanche. De même qu’il n’y a jamais eu une telle méfiance des cercles conservateurs (tous blancs) à l’égard d’un président noir.

Quant à notre police, elle ne m’a pas aidée. A croire qu’ils se passaient la consigne. Ecrite noir sur blanc. "Dès que tu croises un Noir, passé 23 heures, tu tires, et pas à blanc". D’où les révoltes, à Baltimore ou ailleurs, et les tee-shirts "Je ne peux plus respirer" en hommage à Eric Garner, étouffé par des policiers new-yorkais alors qu’il était asthmatique.

Dans le blanc des yeux

A ma décharge, étant élu par tous, je ne pouvais pas me lancer dans une politique ne favorisant que les Noirs. Ça aurait paru cousu de fil blanc. J’ai donc dit tantôt blanc tantôt noir. J’ai louvoyé, en disant : "Vous mes frères Noirs regardez-moi dans le blanc des yeux, je vous aime". Mais vous le savez, je suis connu comme le loup blanc pour ma prudence, c’est ma deuxième nature. 

J’ai donc passé mon temps à exhorter mes frères de couleur à prendre leur destin en main par eux-mêmes, quand il aurait fallu simplement les protéger. Parce que même si tu réussis quand tu es Noir, si tu as le malheur d’afficher des signes extérieurs de richesse, genre grosse cylindrée, tu es forcément un gangster ou un gangsta-rappeur. Et c’est toi qu’on arrête.

Si j’étais Barack Obama, pour me rattraper, je renoncerais à la retraite de hipster glamour qui m'attend à Hawaï,  et je la consacrerai à diriger un grand mouvement en faveur des droits civiques. J’ai l’étoffe du nouveau Martin Luther King. Dieu m'en donne le courage !

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