: Vrai ou faux

Megève : est-ce vrai qu'il n'y a pas de neige pour skier en ce mois de février, comme le suggère une vidéo ?

En pleines vacances de février, et alors que les températures sont particulièrement douces en France, une vidéo fait beaucoup réagir sur X (anciennement Twitter). Ces images, partagées par le journaliste Hugo Clément, montrent quelqu'un, assis sur le télésiège, avec ses deux skis aux pieds et tout autour, uniquement de l'herbe. La publication est accompagnée de ces quelques mots : "On vient de m'envoyer ça. Megève, un 13 février". La vidéo a été vue plus de 750 000 fois. Dans les commentaires, certains déplorent "la fin du ski" et évoquent le réchauffement climatique, d'autres parlent d'une "infox", d'une vidéo "trompeuse et alarmiste". Qu'en est-il vraiment ? Franceinfo démêle le vrai du faux.

Une vidéo prise à la sortie du village

La vidéo est authentique, mais le message peut être trompeur. Cette vidéo n'est pas prise en haut des pistes, sur le domaine skiable. Nous avons vérifié. Les images ont été tournées à la sortie du village de Megève, depuis le télésiège Petit Rochebrune, à environ 1100 mètres d'altitude. C'est vrai qu'il n'y a pas de neige dans le village en ce moment, comme le montrent les webcam. Quelque 16 degrés sont d'ailleurs attendus jeudi 15 février. Cette absence de neige est assez rare pour un mois de février, a confirmé la station à franceinfo, mais ça arrive.

En revanche, ce que ne montre pas cette vidéo, c'est que sur les pistes, au bout du télésiège, il y a bien de la neige. Environ 72% du domaine skiable est ouvert à date, précise la station. Le journaliste Hugo Clément a d'ailleurs répondu à tous ceux qui commentent en envoyant des photos des pistes enneigées, sur le domaine skiable : "Pour ceux qui pensent que c’est "normal" car la station est à 1200 mètres. Non, ce n’est pas normal en février, même à 1200 mètres. Il est temps de sortir du déni" (le village est en réalité à 1113  mètres d'altitude).

Des "conditions d'enneigement très déficitaires" en France

La neige manque en effet en ce moment en France. "Les conditions d'enneigement sont très déficitaires sur l'ensemble des massifs", écrit Météo-France. "La neige manque cruellement dans les Alpes en dessous de 2 000 mètres et dans les Pyrénées, en dessous de 2 500 mètres. Sur le Massif Central, les Vosges, et le Jura, la neige naturelle est désormais absente". Les stations font donc tourner les canons à neige, pour assurer de la neige de qualité : en France, aujourd'hui, quatre domaines skiables sur dix sont couverts par de la neige artificielle.

En 50 ans, les Alpes ont perdu un mois d'enneigement en dessous de 2 000 mètres

C'est un fait : les stations de basse et moyenne altitude sont les premières à voir les effets du réchauffement climatique. En 50 ans, les Alpes ont perdu un mois d'enneigement en dessous de 2 000 mètres d'altitude, a mesuré une étude publiée en 2021 dans la revue The Cryosphere, et réalisée par des chercheurs de différentes nationalités, parmi lesquels les chercheurs de Météo-France. "Le nombre de jours entre les premières neiges (novembre-décembre) et la fonte du printemps est en constant amenuisement, environ 5 jours tous les 10 ans en dessous de 2 000 mètres. Toutefois, cette tendance de fond se superpose à de fortes variations de l’état du manteau neigeux d’une année à l’autre", précisent les chercheurs. Sur les pistes aussi, cela se voit. Selon la même étude,  la hauteur de neige moyenne entre 1 000 et 2 000 mètres se réduit de 2,8 cm par décennie dans le nord des Alpes, et même de 4,1 cm dans le sud de l’arc alpin.

En raison du réchauffement climatique, les températures sur les massifs ont déjà augmenté de deux degrés en moyenne, par rapport à 1900. C'est plus que dans le reste du pays. Résultat : il y a de plus en plus de pluie qui tombe au lieu de la neige, et les températures élevées provoquent aussi une fonte plus rapide du manteau neigeux. Les chercheurs assurent que, quoi qu'on fasse à court terme pour réduire le réchauffement climatique d'ici à 2050, il y aura 10 à 40% de neige en moins sur les Alpes.