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Marine Le Pen dit-elle vrai sur les différences entre réfugiés syriens et ukrainiens ?

La candidate Rassemblement national à la présidentielle fait la distinction entre les personnes qui fuient le conflit actuel en Ukraine et celles qui sont parties de Syrie.  Avec deux arguments : les Syriens étaient essentiellement des hommes et la moitié d'entre eux n'ont pas obtenu le statut de réfugié.

Article rédigé par Antoine Krempf
Radio France
Publié
Temps de lecture : 84 min
Marine Le Pen, candidate du Rassemblement national, lors d'une conférence de presse à Paris (France) le 7 mars 2022 (THOMAS PADILLA / MAXPPP)

Marine Le Pen s'est prononcée pour l'accueil des réfugiés ukrainiens fuyants la guerre menée par la Russie. Pour la candidate du Rassemblement national, sur BFMTV, leur situation n'a rien à voir avec les demandeurs d'asile qui fuyaient à l'époque le conflit en Syrie. "Il y a une différence, incontestablement. Les réfugiés syriens qui sont partis de Syrie étaient quasiment tous des hommes. Cela interroge, je trouve. Dans une guerre, on ne s'étonne pas de voir les femmes, les enfants, les personnes âgées quitter les zones de combat. Ce qui est étonnant quand on ne voit que des hommes qui interviennent."

Non, les réfugiés syriens ne sont pas "quasiment tous des hommes"

Sur les dix dernières années, les femmes représentent plus de 40% de ces demandes de protection venant de Syriens, d'après les rapports de l'Ofpra, l'office français de protection des réfugiés et apatrides. En 2020, 958 femmes ont déposé une demande d'asile sur 2 170 dossiers déposés par des Syriens. La Syrie fait partie des trois pays d'origine dont les femmes sont les plus représentées parmi les demandes. 

Et parmi les Syriens qui ont obtenu la protection internationale en France après avoir demandé l'asile, 92,6% vivent en famille, selon les données de l'Office français de l'Immigration et de l'Intégration. En résumé : contrairement à ce que dit Marine Le Pen, les Syriens qui ont quitté leur pays n'étaient pas "quasiment tous des hommes".

Pas de détournement du droit d'asile par les Syriens

Marine Le Pen affirme aussi que contrairement aux Ukrainiens, les Syriens ou les Afghans ne fuyaient pas vraiment la guerre : "Les gens qui sont chargés d'accorder ou de ne pas accorder le statut de réfugié ont refusé d'accorder ce statut dans plus de la moitié des cas, parce qu'en réalité il n'était pas justifié. C'était en réalité un détournement du droit d'asile."

C'est faux là encore. L'an dernier, sur l'ensemble des demandes d'asile venant de Syriens, 78,3% ont obtenu une protection par l'Ofpra. Sur ce total, les deux tiers des demandeurs obtiennent le statut de réfugié et un tiers la protection subsidiaire.  Contrairement à ce que laisse entendre Marine Le Pen, cette protection subsidiaire n'est pas la preuve d'un détournement du droit d'asile. Elle est attribuée à une personne qui prouve qu'elle est exposée dans son pays à un risque de peine de mort, d'exécution, de torture ou encore de menace grave et indivduelle sur sa vie.

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