"Il y a 3.000 places de prison vides en France" ?
C'est désormais une triste habitude. A chaque fois que le Conseil de l'Europe se penche sur la situation des prisons dans ses 47 Etats membres, comme il vient de le faire ce mardi, la France est pointée du doigt pour sa surpopulation carcérale. De fait, seul six pays font pire que nos 115 détenus pour cent places de prison (au 1er février 2016).
Et pourtant, d'après Jean-Jacques UIrvoas, il existerait un stock de "3.000 places vides" dans les quelque 190 établissements pénitentiers français. En fait, c'est même un peu plus : environ 3.500 places non-occupées.
Des places vides mais une surpopulation carcérale ???
Pour comprendre d'où vient ce chiffre, il faut d'abord dire qu'il existe plusieurs types de prison en France : les maisons d'arrêt, les établissements pour mineurs et les établissements pour peines (centre de détention, maisons centrales, centres de semi-liberté et centres pénitiaires).
C'est dans cette dernière catégorie de prison que l'on retrouve la majorité des places disponibles. Et c'est normal. Les établissements pour peine sont réservées aux condamnés à de longues peines d'au moins deux ans. Ils ne sont accessibles que sur numerus clausus, c'est-à -dire qu'il y a un nombre fixe de condamnés qui peuvent y être enfermés. Résultat : les taux de densité carcérale varient de 70 à 90%.
{% embed infogram densite_carcerale_par_type_de_prison_au_1er_fevrier_2016" style="color:#989898!important;text-decoration:none!important;"> Densité carcérale par type de prison (au 1er février 2016)
Create pie charts %}
1.200 matelas sur le sol des cellules
C'est donc dans la centaine de maisons d'arrêt que se pose le problème de la surpopulation carcérale en France : 136 détenus pour cent places de prison. C'est dans ces établissements que quelque 1.200 détenus dorment chaque nuit sur des matelas posés à même le sol. Dans certaines maisons d'arrêt, la densité carcérale dépasse même les 200%, avec un record pour celle de Tahiti.
{% embed infogram les_maisons_darret_les_plus_surpeuplees_au_1er_janvier_2016" style="color:#989898!important;text-decoration:none!important;"> Les maisons d'arrêt les plus surpeuplées au 1er janvier 2016
Create bar charts %}
Le problème spécifique des maisons d'arrêt françaises vient du fait qu'elles sont censées accueillir les prévenus en attente de leur procès mais aussi, "à titre exceptionnel" d'après l'article 717 du Code de procédure pénale, les condamnés à de courtes peines de deux ans ou moins.
Les petites peines engorgent les maisons d'arrêt
Or l'exception est devenue la règle. Un vieux rapport sénatorial de l'an 2000 expliquait déjà que "la plupart des maisons d'arrêt hébergent aujourd'hui autant de condamnés que de prévenus, ce qui constitue une négation du principe des maisons d'arrêt ". Un phénomène qui s'est accentué au fil du temps avec l'allongement des peines de prison et le faible taux d'aménagement de peines pour les condamnés à de courtes périodes derrière les barreaux.
Sources
Statistique mensuelle des personnes écrouées et détenues en France, administration pénitentiaire février 2016
Le fonctionnement de l'administration pénitentiaire, vie-publique.fr
Edition 2014 des statistiques pénales annuelles du Conseil de l'Europe, CdE mars 2016
Les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires en France, rapport sénatorial 2000
Des peines de prison de plus en plus longues en France ? Vrai du faux, 19 octobre 2015
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.