Assassins du petit Valentin : la prison pour les fous ?
Lorsque le verdict du premier procès était tombé, la
réclusion criminelle à perpétuité pour lui, 18 ans de réclusion pour elle, Stéphane
Moitoiret et Noëlla Hego, étaient restés sans réaction, le regard fixe, vide,
avec leurs airs de zombies, comme durant tout leur procès.
Deux ans plus tard, à quoi ressembleront-ils dans le box des
accusés, pour leur procès en appel, devant les assises du Rhône ? Stéphane Moitoiret
qui se prenait pour le roi d'Australie et pour le "secrétaire" de sa "majesté"
Noëlla Hego arrivera-t-il à formuler une phrase cohérente, ce qu'il avait été
incapable de faire aux Assises de l'Ain ? La question de ses troubles mentaux sera
inévitablement au centre des débats de ce nouveau procès.
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l'assassinat de Valentin
"Si c'est un robot qui a tué, c'est insupportable
pour les parents"
Pour les parents du petit Valentin, ce deuxième procès sera
une nouvelle épreuve, un nouveau cauchemar prévient le député frontiste Gilbert
Collard, qui a repris sa robe d'avocat pour
défendre la famille du petit garçon assassiné. "Les parents de
Valentin vont mal, très mal" , dit-il. Et pour lui, la question de
culpabilité et de la responsabilité pénale de Stéphane Moitoiret ne fait aucun
doute.
Pour Gilbert Collard, Stéphane Moitoiret est bien coupable
de s'être aussi sauvagement acharné sur le petit Valentin, le soir du 28
juillet 2008, dans un petit village de l'Ain où l'enfant faisait du vélo. L'ADN
de Moitoiret a été retrouvé sur le couteau qui a perforé 44 fois le corps de
l'enfant. Moitoiret doit être jugé, même si son discernement était altéré au
moment de ce crime horrible, estime Gilbert Collard.
"Sinon, si
l'individu est reconnu irresponsable, c'est comme si un robot avait tué et
c'est insupportable pour les parents de Valentin" , martèle l'avocat et
parlementaire FN. Il ajoute que la question de la responsabilité de Moitoiret
est une question de "bon sens, on voit qu'il se cache derrière son
mutisme" .
"L'honneur de la justice,
c'est de considérer qu'on ne juge pas les handicapés mentaux"
Maître Hubert Delarue, l'un des deux avocats de Stéphane
Moitoiret, s'emporte contre cette vision de Moitoiret, même s'il sait que son client
est bien l'auteur de ce crime épouvantable. Mais ce qui est insupportable à ses
yeux, c'est que lors du premier procès, "la justice a jugé le crime,
pas le criminel" . Pourtant, "la justice compassionnelle, ce
n'est pas la justice" , rappelle-t-il.
"L'honneur de la
justice, depuis la nuit des temps, c'est de considérer qu'on ne juge pas les
handicapés mentaux" . Pour lui, il ne fait aucun doute que le
discernement de Stéphane Moitoiret était aboli au moment du crime, ce qui est
l'avis de quatre experts psychiatres de renom. Mais pour six autres experts, le
discernement était simplement altéré, ce qui autorise donc un procès, et une
punition, dans notre droit français.
"Dans des pays nordiques, les schizophrènes n'ont
jamais de procès"
Le docteur Pierre Lamothe, psychiatre en prison depuis des
années, et expert auprès de la Cour d'appel de Lyon, souligne que les médecins eux-mêmes
ne sont parfois pas d'accord avec la définition du discernement. Il précise
aussi que dans des pays nordiques, dès que le diagnostic de schizophrénie est
établi, on ne fait jamais de procès, on interne le criminel dans un hôpital
psychiatrique. Hôpital où la dangerosité est mieux contenue qu'en prison,
assure Christian Saint-Palais, avocat de Romain Dupuy, interné après avoir
sauvagement tué une infirmière et une aide-soignante à Pau.
Depuis ses crimes, Romain Dupuy, qui a été jugé
irresponsable, est à l'hôpital de Cadillac, en Gironde. Cadillac où il y a un cimetière,
insiste maître Delarue. Preuve que les malades peuvent y séjourner jusqu'à leur
mort, parfois donc plus longtemps qu'en prison. Pour les avocats de Stéphane Moitoiret,
celui qui se prenait pour le roi d'Australie et voyait souvent des Allemands ou
des hélicoptères au plafond, ne doit pas rester en prison. Le verdict de ce
procès en appel sera rendu le 22 novembre.
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