Scandale de corruption au Portugal : la démission surprise du Premier ministre plonge le pays dans une crise politique
Le Portugal est en pleine tourmente depuis la démission surprise, mardi 7 novembre, de son Premier ministre, António Costa. À l’origine de ce coup de théâtre : une affaire de corruption liée à l’extraction du lithium. Les magistrats qui enquêtent sur l'attribution suspecte de deux concessions récentes de mines de lithium parlent de "détournement de fonds", de "corruption de personnalités politiques" et de "trafic d'influence".
Mardi, ils ont sorti le grand jeu : la police avait en main plus de 40 mandats de perquisition. Elle a même débarqué dans la résidence du Premier ministre, qui pourtant n'est pas directement mis en cause, pour fouiller les locaux. Son chef de cabinet et son conseiller font partie des 5 personnes arrêtées.
Des concessions de mines accordées dans l'illégalité ?
Deux mises en examen visent le ministre des Infrastructures et le chef de l’agence portugaise de l’environnement, qui avaient validé les concessions et auraient, selon eux, enfreint le code des marchés publics. L'ouverture d'une mine venait tout juste d'être validée, le 7 septembre.
Si ces mines suscitent autant de convoitises, c'est parce que le Portugal est le premier producteur de lithium en Europe. Et qu’il possède encore 60 000 tonnes de réserves. C'est un métal brillant, léger et souple, longtemps réservé à l'industrie du verre et de la céramique (il est utilisé comme additif, c’est lui qui donne son lustre à la porcelaine).
Depuis une dizaine d’années le marché prometteur des véhicules électriques fait tourner les têtes, les concessionnaires se battent pour ouvrir de nouvelles mines et produire l'ingrédient indispensable des batteries au lithium. Mais l'opposition est forte, à la fois de la société et des ONG, qui ne veulent pas voir le paysage défiguré par les mines.
Figure de proue de la social-démocratie européenne
António Costa, lui, nie toute implication. Pourtant son nom apparaît aussi dans une autre affaire, un projet de production d'hydrogène vert au sud de Lisbonne et de la construction d'un gigantesque data center. Il est soupçonné d'être intervenu "pour débloquer des procédures".
António Costa dit avoir "la conscience tranquille" mais comme il l’a expliqué mardi, sa démission était une évidence car "la dignité des fonctions de Premier ministre n'est pas compatible avec un quelconque soupçon sur son intégrité".
Ce jeudi 9 novembre au soir, le président de la République va s’adresser au pays, encore sous le choc. Depuis 2015 António Costanio Costa régnait quasiment sans partage. L’an dernier son parti avait même obtenu la majorité absolue. Il était aussi devenu la figure de proue de la social-démocratie européenne.
Cela ne sera pas facile de tourner la page. Le chef de l’État n’a que deux options : désigner un nouveau chef de gouvernement socialiste lui aussi ou - plus vraisemblablement - organiser des législatives anticipées dans le courant du premier trimestre l'an prochain.
Avec le risque de créer un appel d’air pour l’extrême droite, qui ne cesse de dénoncer la corruption des élites... et entend bien tirer profit de ce scandale.
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