Relations entre la Grèce et la Turquie : malgré des rapprochements, Recep Tayyip Erdogan ravive les tensions

Après des décennies de tensions et de malentendus, la Grèce et la Turquie commencent à normaliser leurs relations. Pourtant le président turc vient de confirmer la conversion d'une église orthodoxe en mosquée, au grand mécontentement d'Athènes.
Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, et le président turc, Recep Tayyip Erdogan, à Ankara, le 13 mai 2024. (NECATI SAVAS / MAXPPP)

L'église de Chora, couverte de fresques et de mosaïques, est un trésor du patrimoine byzantin, située dans les zones historiques d'Istanbul, inscrite au Patrimoine mondial de l'Unesco. Elle a été convertie une première fois en mosquée par les Turcs Ottomans, en 1511, puis une deuxième fois en 2020, par un décret présidentiel. Cette décision avait eu lieu juste après la réouverture au culte musulman de l'ancienne basilique Sainte-Sophie.

L'annonce avait fait grincer des dents les dirigeants grecs, mais avec beaucoup de travaux, les choses se sont légèrement tassées et c'est seulement le 6 mai 2024, au lendemain des Pâques orthodoxes que les premiers fidèles musulmans y entrent pour prier et que l'indignation grecque se réveille.

"Ce n'est pas une façon de traiter le patrimoine culturel", dit alors le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis, qui juge la mesure "inutile" et "provocatrice", d'autant que "les mosquées à Istanbul ne sont pas franchement, une denrée rare". Il réitère son désaccord lors de sa visite en Turquie, le 13 mai, mais peine perdue, le dirigeant turc confirme que les lieux sont bien désormais consacrés au culte musulman.

La politique religieuse du président turc

Recep Tayyip Erdogan n'a jamais cessé de promouvoir un islam politique, ce resserrement religieux, entamé en 2020, visait à flatter son électorat conservateur et nationaliste, alors que la Turquie traversait déjà une grave crise économique et sociale.

Quatre ans après, les choses sont encore pires, puisque l'inflation grève le budget des Turcs et le jeu politique a été complètement remodelé, au détriment de l'AKP, le parti de Recep Tayyip Erdogan mis en déroute lors des dernières élections municipales. La position inflexible du chef de l'État peut être interprétée aujourd'hui comme une concession aux franges les plus islamistes du pays.

Cette décision n'a pourtant pas empêché la Grèce et la Turquie d'acter leur rapprochement et les deux dirigeants, qui se sont vus quatre fois en dix mois, ont signé en décembre 2023, une "déclaration d'amitié et de relations de bon voisinage".

Cependant, les sujets de tensions restent nombreux, entre la question de Chypre divisée, celle de l'église de Chora et plus que jamais celle du Hamas, que Recep Tayyip Erdogan n'a jamais voulu reconnaître comme une organisation terroriste, ce qui a aussi compliqué sa position au sein de l'OTAN.

Le président turc l'a redit, lundi 13 mai, "Je considère le Hamas, comme un groupe de personnes qui essaient de protéger leur propre terre." Il a également révélé que la Turquie soignait, à ce jour, "plus de mille membres du Hamas" dans ses hôpitaux. La statistique n'a pas été confirmée, mais là aussi, il donne des gages à son électorat et se positionne entre Israël et les organisations palestiniennes.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.