Faute d'accès aux soins dentaires, des Britanniques s'arrachent les dents !

Au Royaume-Uni, ne trouvant pas de rendez-vous chez le dentiste, une femme de 63 ans vient de s'arracher 12 dents elle-même. Une pratique de plus en plus fréquente, notamment dans les foyers les plus modestes.
Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Caroline Pursey, 63 ans, s'est arraché 12 dents pour mettre un terme à ses souffrances., elle a témoigné dans un reportage ITV NEWS (CAPTURE D'ECRAN ITV NEWS)

Le sourire édenté et jauni de Caroline Pursey en témoigne. Son histoire, diffusée le 7 février 2024 par la chaîne britannique ITV NEWS, a bouleversé le pays. Caroline a 63 ans, elle vit du RSA dans une petite ville du nord-est de l'Angleterre. Il y a quelques semaines, parce qu'elle a mal aux dents, elle contacte son dentiste, praticien conventionné, des tarifs très bas et bien remboursés. Mais elle découvre qu'il est sorti du système, pas assez rémunérateur. Il ne prend plus que des patients sous régime privé avec dépassements d'honoraires.

Caroline qui ne roule pas sur l'or tente d'autres cabinets, même réponse. Soit c'est le privé, et on lui demande plusieurs milliers de livres sterling, soit pour le public, elle patiente trois ans sur liste d'attente. Sauf que ses douleurs deviennent insupportables. Caroline prend une pince dans son placard à bricolage et une à une, elle s'arrache les dents, 12 dents au total, pour mettre un terme à ses souffrances. Ce n'est pas du Charles Dickens, c'est dans l'Angleterre du XXIe siècle, pays membre du G7.

Caroline Pursey, 62 ans, témoigne sur une chaîne britannique, elle a dû s'arracher 12 dents faute d'accès aux soins. (Capture d'écran Dailymotion)

Le phénomène du "Do It Yourself"

C'est un phénomène né pendant les confinements de la période Covid qui prend de l'ampleur. Le "Do it Yourself", faites-le vous-même, et on ne parle pas de la déco pour la maison. Les réseaux sociaux regorgent de témoignages de personnes qui débarquent à l'hôpital en overdose d'anti-douleur, de septicémies qui se déclenchent à cause d'un abcès ou d'un cancer de la bouche soigné avec des tisanes.

Les moins mal lotis ouvrent un crédit ou profitent d'un voyage à l'étranger pour se faire arracher une molaire. Depuis trois ans, la campagne "Toothless in England", les sans dent en Angleterre, qui rappellera des souvenirs à François Hollande, milite pour que chaque Britannique ait accès à un dentiste conventionné sans avoir à faire des centaines de kilomètres.

Un plan de relance jugé insuffisant

Si on en est arrivé là, c'est à cause de la crise générale du NHS, le système de santé publique britannique, éreinté par 15 ans d'austérité et aussi d'une réforme spécifique pour les dentistes qui en 2006 a considérablement baissé la rémunération à l'acte. La conséquence, d'après l'association britannique dentaire, c'est qu'en 2022, 90% des dentistes n'acceptaient plus de nouveaux patients aux tarifs réglementés, jugés pas assez rentables. Un système à deux vitesses s'est mis en place et la santé des plus modestes se dégrade. En décembre, le rapport d'un cercle de réflexion, The Nuffield Trust, expliquait que les services dentaires étaient "à un stade quasi terminal".

Début février, le gouvernement a annoncé un plan de relance avec le versement d'une prime aux dentistes pour chaque nouveau patient inscrit dans son carnet de rendez-vous, avec des budgets à hauteur de 230 millions d'euros. Des montants jugés insuffisants par les professionnels pour résoudre cette crise. Inadmissible dans un des pays du G7.

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