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"Convoi de la liberté" au Canada : les manifestants toujours mobilisés, le maire d'Ottawa décrète l'état d'urgence

Au dixième jour de mobilisation, les habitants de la capitale canadienne sont excédées face aux klaxons et perturbations en tous genres.

Article rédigé par franceinfo, Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 92 min
Un manifestant devant les camions stationnés devant la colline du Parlement à Ottawa, au Canada, le 3 février 2022. (ADRIAN WYLD / MAXPPP)

Le centre-ville d'Ottawa est toujours paralysé par des centaines de poids-lourds qui barrent les rues et klaxonnent jour et nuit, par des manifestants qui campent dans les rues malgré la neige et le froid (il fait moins 10°C dans la capitale fédérale canadienne). A tel point que le maire juge désormais la situation "hors de contrôle". "Ce sont les protestataires qui font la loi" dit Jim Watson, "nous devons reprendre notre ville". Les habitants sont excédés par le bruit, le chaos, les dégradations en tout genre et des altercations les opposent de plus en plus souvent aux manifestants. Selon La Presse, un avocat a même déposé un recours collectif en justice et réclame des millions de dollars de dommages et intérêts pour "nuisances"

Ce "convoi de la liberté" est né contre l'obligation faite aux routiers d'être vaccinés pour franchir la frontière entre le Canada et les États-Unis. Le cortège est arrivé dans les rues d'Ottawa le samedi 29 janvier, une semaine après être parti de Colombie-Britannique, 4 300 kilomètres plus à l'ouest. Très vite, le mouvement s'est transformé en colère plus globale contre l'ensemble des mesures sanitaires et pour certains, contre le gouvernement.

Les manifestants assurent qu'ils resteront sur place tant que les restrictions ne seront pas levées. De nombreux lieux publics sont encore fermés à travers le Canada et au quotidien, plus encore qu'en France, le pass vaccinal est un sésame indispensable.

Des contraventions à tour de bras

La police n'a pas réussi à déloger ces manifestants. D'ailleurs, elle se plaignait de manquer de moyens pour le faire. Pour l'instant, 100 policiers sont arrivés en renfort du reste de la province, 250 membres de la gendarmerie royale sont attendus. En attendant la police de la ville se contente de harceler les contestataires en dressant des contraventions à tour de bras pour bruit excessif, usage de feux d'artifice ou conduite en état d'ivresse. Plus de 450 personnes ont été verbalisées ce week-end.
Les forces de l'ordre essaient aussi d'étouffer le mouvement en s'attaquant au nerf de la guerre : le carburant.

Le Service de police d’Ottawa (SPO) a durci le ton à l’endroit des protestataires ce dimanche 06 février, en annonçant que le ravitaillement des manifestants était désormais interdit. Toute personne qui apporte aux routiers de l'essence pour leurs groupes électrogènes qui leur permettent de s'éclairer, de se chauffer et de se faire à manger tombe désormais sous le coup de la loi. Plusieurs personnes ont d'ailleurs été arrêtées.

10% des routiers concernés

A ce stade, le recours à l'armée est exclu. Le premier ministre Justin Trudeau, qui par précaution a quand même quitté la ville, juge que le convoi ne représente qu'une toute petite minorité. A l'image de la population adulte au Canada, 90% des camionneurs transfrontaliers ont en effet leurs deux doses de vaccin.

Un mouvement certes "minoritaire", mais qui s'étend : des protestations similaires ont eu lieu dans plusieurs grandes villes ce week-end, comme Toronto, Québec, Winnipeg ou encore Edmonton. Mais à l'image des gilets jaunes en France le mouvement est hétéroclite.

On a vu à Ottawa des conspirationnistes, des militants d’extrême-droite défilant avec des drapeaux confédérés, symbole des suprémacistes blancs américains. L'ancien président américain Donald Trump a d'ailleurs apporté tout son soutien au mouvement. Mais il y a aussi beaucoup de familles pacifiques qui réclament plus de liberté et moins d'Etat, credo repris par différents partis politiques au Canada.

Un "convoi de la liberté" européen ?

Le mouvement inspire à l'étranger : un appel a été lancé aux chauffeurs routiers européens pour converger vers Bruxelles lundi prochain, le 14 février.

Il est notamment relayé en Allemagne, en Italie, en Croatie et en France, où les anti-pass rêvent d'un "convoi de la liberté" qui monterait sur Paris pendant le week-end. Les syndicats ne soutiennent pas l'initiative.

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