Le monde de Marie. Aux Philippines, une sœur australienne de 71 ans risque l'expulsion pour "agitation politique"
Tous les jours, Marie Colmant revient sur un sujet passé (presque) inaperçu. Aujourd'hui, une religieuse australienne dont l'engagement a personnellement déplu au président philippin Rodrigo Duterte.
Patricia Fox doit être fixée sur son sort, lundi 18 juin. Cette religieuse australienne, sous le coup d’un arrêté d’expulsion des Philippines, a prévenu : "Je ne monterai pas dans cet avion". Cette dame de 71 ans attend tranquillement la police, dans cette petite maison de Manille qu’elle partage avec six autres sœurs de la congrégation de Notre-Dame de Sion.
Patricia Fox, avocate de formation, a fait appel de son arrêté d’expulsion. C’est la raison pour laquelle elle va se battre, convaincue d’avoir le droit de son côté, puisqu’on n’applique pas une décision qui fait l’objet d’un appel en cours. Certes, mais on est aux Philippines, un pays dirigé tout en brutalité par Rodrigo Duterte depuis deux ans, et avoir la loi de son côté n’est pas forcément un abri. C’est lui qui, d’ailleurs, a personnellement ordonné l’arrestation de cette religieuse qui lui tapait sur le système depuis un moment.
Dans le viseur de Rodrigo Duterte
Mais qu’a donc fait cette dame qui a peu passé l’âge de faire le coup de force pour énerver à ce point le président philippin qui accuse aujourd'hui cette étrangère d’avoir participé à des manifestations illégales ? En avril dernier, alertée par de nombreux messages, elle s’est rendue avec 30 autres défenseurs des droits de l’homme aux Philippines, dans la région de Mindanao aujourd’hui sous le coup d’une loi martiale, après des attaques de l’Etat islamique.
Mais une fois sur place, Patricia Fox et ses collègues découvrent que la loi martiale a bon dos pour expulser des indigènes et des petits fermiers, dont les terrains sont convoités par un consortium international d’exploitation minière. Ils répertorient plus de 100 cas de fermiers réticents à laisser leur exploitation sous le délai de trois jours exigés par l’armée, tués devant témoins. Et près de 400 cas de familles spoliées, et qui ont préféré céder.
De retour à Manille, le rapport des 30 est rédigé et publié... nulle part. Une semaine après son retour à Manille, Patricia Fox est arrêtée, son passeport est confisqué. Et elle se voit signifier son expulsion immédiate du territoire philippin pour activités politiques. En attendant, elle espère que son sort attirera l’intérêt de la communauté internationale sur les pratiques de ce président.
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