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Warren Zavatta raconte sur scène sa "Sortie de piste" : "C'est la deuxième chance, l'occasion de réparer tout ce que j'ai abîmé auparavant",

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, l’artiste, circassien et comédien, Warren Zavatta. Il est jusqu'au 3 juin 2023, les vendredis et les samedis, au Lucernaire pour son spectacle "Sortie de piste".
Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Warren Zavatta, lors d'un spectacle en 2011. (JEAN-BAPTISTE QUENTIN / MAXPPP)

Warren Zavatta est artiste, acrobate, circassien, comédien et metteur en scène. En même temps, il a de qui tenir, car il est le petit-fils du célèbre clown Achille Zavatta, et même si ce dernier ne lui a jamais accordé d'attention, il n'a jamais imaginé marcher sur d'autres traces que les siennes. Le cirque, c'est sa vie avec des personnalités qui vont rapidement le soutenir, comme Dany Boon qui a produit son premier spectacle "Ce soir dans votre ville" en 2011. Il est jusqu'au 3 juin 2023, les vendredis et les samedis, au Lucernaire pour son spectacle Sortie de piste.

franceinfo : Dans Sortie de piste, vous vous racontez à cœur ouvert. Est-ce que ce spectacle est une victoire sur la vie ?

Warren Zavatta : Oui, oui. C'est la résilience à l'état pur parce que je suis tombé dans tous les travers de la "notoriété" comme la dépression, la drogue, l'alcool, la prison, la totale. En fait, j'ai été détecté très tard d'une belle bipolarité, donc elle a explosé au moment où j'ai eu un peu de succès. Une fois que j'ai commencé à faire des interviews, des spectacles, il y avait quand même une certaine pression et là, c'est parti en vrille. Allez hop !

Est-ce que c'est douloureux de se raconter ?

Pour moi, non, sincèrement. Et puis j'ai pour maître-mot : dérision.

J'ai pris le parti d'essayer de rire de tout donc je me moque beaucoup de moi et sincèrement, me raconter, c'est plutôt agréable.

Warren Zavatta

à franceinfo

Ce nom de Zavatta date du XIIIᵉ siècle, il vient de Venise donc c'est vraiment un nom qui est très important. Il représente quoi ce nom de famille pour vous ?

Je vais sortir mon Joker, c'est compliqué.

Ce que je veux vous dire, c'est que vous avez toujours eu envie de faire ça et pourtant, ce grand-père ne vous a pas forcément accordé d'attention. Ça vous a touché ?

Énormément touché. J'ai été obligé de mentir à l'école parce que tout le monde me demandait : "Alors votre grand-père ? " Je répondais : oui, je l'ai vu il y a deux jours, alors que je l'ai vu une petite dizaine de fois dans ma vie.

Vous êtes parti très vite. A cinq ans, vous avez commencé le conservatoire, vous avez fait vos études et puis vous êtes parti avec l'idée de découvrir l'école de la rue.

Oui, en fait, je suis parti à New York et pour gagner ma vie, il fallait que je fasse quelque chose. Et je me suis dit : allez, spectacle de rue, donc j'ai monté un spectacle et j'ai joué là-bas. À Washington Square, il y a une fontaine désaffectée et j'ai commencé là puis je suis allé en Australie, à Circular Quay, là où les gens prennent le bateau pour aller dans les différentes villes.

Ensuite, vous êtes parti à Moscou. Je voudrais que vous me parliez de cet épisode-là parce qu'il est juste incroyable, vous faites une formation de clown. Pourquoi vouliez-vous devenir clown ?

C'est pour reprendre un petit peu la boutique et moi, j'étais très fier de mon grand-père et du métier. Je me suis dit : clown, je vais faire ça et je me suis rendu compte après que j'avais envie de parler. J'ai alors pris des cours de comédie. Je suis revenu en France et j'ai attaqué le texte.

Il y a une personne qui va croire en vous, c'est Dany Boon. Je voudrais qu'on en parle parce que vous avez fait votre mea-culpa en vous excusant de lui avoir fait du mal. Il a beaucoup cru en vous, a produit votre premier spectacle. À ce moment-là, justement, vous prenez conscience que vous avez quelque chose ?

Sincèrement, pas vraiment. Ça s'est fait très facilement. Il est venu me voir en spectacle puis dans ma loge et m'a dit : "C'est formidable, qu'est-ce qu'on fait ?" J'ai répondu ce que tu veux et il m'a vraiment beaucoup aidé. Je faisais ce que je voulais, j'ai eu des petits rôles dans ses films et on était en coécriture sur un film, sur l'histoire de mon premier spectacle et on devait tourner. J'étais en prison en fait. Et puis j'ai fait quelques sorties de piste donc au bout d'un moment, parce qu'un film, ça coûte beaucoup d'argent, il s'est dit : "Oh, le mec n'est pas fiable, je ne peux pas miser là-dessus".

Est-ce que ça vous a construit ? Est-ce que ça vous a permis de vous dire plus jamais ça, il faut que je change ?

Non, en fait, à l'époque, avec la bipolarité, on est un peu étranger de notre état. Finalement, on ne se rend pas bien compte du mal et du bordel qu'on laisse derrière nous. C'est ma femme qui l'a découvert et m'a dit : "Warren, je crois que tu as un problème. Il faudrait aller voir un psy".

Elle est toujours là ?

Elle est toujours là ! Elle a assuré franchement !

Est-ce que vous êtes fier aujourd'hui de pouvoir poursuivre cette aventure Zavatta ?

À ma façon, je continue de perpétuer la tradition familiale. Je suis donc assez fier de ça.

Warren Zavatta

à franceinfo

Moi, je suis très fier de ce nom, je trouve qu'il sonne bien d'ailleurs. Je suis fier du prénom aussi, Warren Zavatta, ça claque bien, je n'ai pas eu besoin de prendre un nom d'artiste.

Vous avez transformé vos blessures en force, ça, c'est une certitude. Est-ce que ce spectacle n'est pas aussi né pour aider les autres ?

Alors, sincèrement, je n'y ai pas pensé au début. Mais comme je fais la sortie du public, je sers la main à tout le monde, je fais les bises et tout. Il y a des gens qui m'attendent à la fin et qui me disent : "Oui, moi, j'ai un problème avec l'alcool, je ne sais pas trop quoi en faire", ou alors des gens qui se révèlent : "Je suis venu voir vos spectacles et en fait, j'ai découvert que ma femme est sûrement bipolaire". Ça, ça a été une surprise pour moi. Je ne m'attendais pas du tout à ça. Je l'ai vraiment écrit sans penser à rendre service ou à mettre un coup de projecteur sur la maladie.

Alors, ce spectacle représente quoi pour vous ?

C'est la deuxième chance. C'est l'occasion de réparer tout ce que j'ai abîmé auparavant. Un moment, c'est vraiment un miracle pour moi d'avoir écrit ce deuxième spectacle et de remonter sur scène.

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