Thibault Cauvin : "Mon prochain disque sera en duo avec -M-"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Jeudi 29 février 2024 : Le guitariste classique, Thibault Cauvin. Il est nommé dans la catégorie soliste instrumental aux Victoires de la musique classique qui se déroule jeudi soir.
Article rédigé par Elodie Suigo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 23 min
Thibault Cauvin, le 19 février 2024. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

Depuis sa naissance, les doigts de Thibault Cauvin se sont affinés, renforcés, positionnés et à cinq ans, ils ont épousé les cordes d’une guitare. Malgré les gammes, la rigueur nécessaire, il n'en a jamais divorcé. Le conservatoire ne l'a pas découragé, il en est même sorti avec les honneurs à 20 ans. Son premier album, enregistré en live, a marqué le début d'une carrière qui n'est pas prête de s'arrêter.

Jeudi 29 février, il a rendez-vous avec les Victoires de la musique classique. Il y est nommé dans la catégorie reine, celle de soliste instrumental pour son disque intégralement consacré à Jean-Sébastien Bach. Thibault Cauvin est aussi actuellement en tournée.

franceinfo : Vous qui collectionnez les prix et les récompenses, que représentent les Victoires de la musique classique ?

Thibault Cauvin : C'est très fort. C'est un symbole immense et ça me touche beaucoup. Bien sûr, quand on pense musique classique, on pense à Jean-Sébastien Bach, Beethoven, Mozart, mais je crois qu'il y a aussi une musique classique de maintenant, écrite par des compositeurs qui sont inspirés d'autres musiques du monde, de l'actualité. Cette musique d'aujourd'hui, classique, elle me plaît beaucoup et parfois elle a moins sa place dans le grand monde de la musique classique. De voir qu'aujourd'hui, à travers moi, on lui donne une place, ça me touche.

Ça signifie quoi être virtuose en termes de quantité de travail, on se lève le matin et on travaille tous les jours ?

Oui. Entre mes 12 ans et mes 25 ans, chaque minute de chaque journée, c'était la guitare. Je jouais huit heures, neuf heures, dix heures. C'était une folie totale qui a été exquise à vivre et qui, plus tard, vers l'âge de 25 ans, m'a un peu troublée parce qu'être trop virtuose, être trop spécialisé dans ce monde-là, ça isole inévitablement du monde.

"Mon père est un rockeur et j'ai vraiment cette philosophie de vouloir jouer pour tous et d'accueillir tous les rêveurs, tous les curieux partout dans le monde."

Thibault Cauvin

à franceinfo

Le chemin que je fais depuis une quinzaine d'années maintenant, c’est aussi d'oublier parfois la guitare et qu'elle redevienne un instrument, à savoir un outil, une passerelle qui permet d'aller au-delà et de m'offrir cette chance de pouvoir inviter ceux qui m'écoutent à sillonner les mondes que je leur offre.

Je voudrais que vous me parliez de vos débuts. Vous avez cinq ans, il y a ce son de guitare qui vous habite en permanence et qui très vite, vous donne cette envie d'en jouer.

Oui. Très vite, j'ai eu l'envie d'en jouer et très vite aussi, l'envie de jouer pour les gens. Tout petit, à sept ans, huit ans, dix ans, je donnais des concerts finalement presque chaque semaine. Alors ce n'étaient pas des concerts comme au Théâtre des Champs-Élysées, au Théâtre du Châtelet, bien évidemment, c'était simplement pour ma grand-mère, pour mon oncle, ma tante, pour des amis qui venaient dîner. Et aujourd'hui, comme j'ai la chance de jouer dans les plus beaux théâtres du monde, j’éprouve toujours ce sentiment-là qu'en fait, je joue pour ma grand-mère et que les gens qui sont là, sont des gens que j'aime, même si je ne les connais pas, et même si ça peut être au bout du monde.

Quel est votre rapport à la solitude ? Parce que c'est une carrière de soliste.

Je l'aime beaucoup. Et choisir ces instants de solitude, de contempler la vie, c'est vraiment très précieux et très enrichissant. J'ai vécu comme ça en voyage pendant de longues années exquises, seul. Je rencontrais des gens. J'arrivais à un aéroport, on m'accueillait, on me montrait les villes, on m'invitait dans de beaux restaurants et après, je repartais. C'était des petites vies qui s'enchaînaient et sur la durée, j'étais seul et j'ai vraiment développé ça longtemps en scène.

"Je joue seul pour être encore plus avec les gens qui m'écoutent. Et cette solitude-là me plaît profondément."

Thibault Cauvin

à franceinfo

Votre disque contient la célèbre Toccata et fugue en ré mineur BWV 565, l'intégrale de La Chaconne et des préludes transcrits par votre frère, le compositeur Jordan Cauvin. C'est donc une histoire de famille ?

Totalement. Initiée par mon père pour la musique et par ma mère pour la poésie de la vie et une certaine manière de contempler le monde. Et puis, avec mon frère, on est tout à fait en communion. Ensemble, on a une complémentarité qui est délicieuse et c'est aussi une manière de travailler. Je lui livre des rêves de composition, des idées que j'ai pu avoir. Lui les comprend, même si bien souvent mes idées sont complètement farfelues. Et puis on échange, on affine et on arrive à des petites œuvres que je rêve parfois grandes et qui ensuite rayonnent.

Scarlatti, Albéniz, Vivaldi, il y a eu aussi Cities 1 et Cities 2 avec des artistes invités comme Matthieu Chédid, Didier Lockwood ou encore Thylacine. Collaborer, fusionner les styles, permet de s'ouvrir davantage ?

Absolument. Ce qui me plaît maintenant, bien sûr, c'est de jouer avec des musiciens classiques, on parle la même langue, il y a quelque chose de très agréable, mais aussi de jouer avec d'autres musiciens comme Thylacine qui justement me fait le plaisir de remanier la partition Asturias d'Albéniz pour les Victoires de la musique. Je ne suis pas censé le dire, mais je le dis volontiers, mon prochain disque sera en duo avec M. Deux guitares, la mienne classique, la sienne électrique et là, à nouveau, on ne parle pas la même langue, mais on crée un monde qui est coloré de nos deux mondes et qui est tout à fait intime.

Thibault Cauvin sera en concert, notamment, le 8 mars 2024 à Thiers, le 30 avril à Neuilly-sur-Seine ou encore le 20 mai à Digne-les-Bains et en février 2025, il donnera trois concerts exceptionnels à l’occasion de ses 40 ans.

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