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BD : "Vous êtes Dieu pour vos personnages... et c'est très gai d'être Dieu", sourit Jean Van Hamme

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, le romancier et scénariste de bandes dessinées belge, Jean Van Hamme. Il signe le scénario de "Avant Blake et Mortimer - Tome 2 - La flèche ardente" aux éditions Dargaud.
Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Le dessinateur belge Jean Van Hamme, en 2023. (JOEL SAGET / AFP)

Jean Van Hamme est romancier, scénariste belge de bandes dessinées et de téléfilms. Il a eu très tôt envie de raconter des histoires, d'écrire, de créer des personnages et des séries que le public et la critique ont rapidement adopté. C'est en 1977 que naît Thorgal, XIII suit en 1984, et puis le fameux Largo Winch en 1990. Ses créations, ses albums ont été vendus à plus de 44 millions d'exemplaires. 

Il signe le scénario de Avant Blake et Mortimer - Tome 2 - La flèche ardente aux éditions Dargaud. Le prolongement de l'œuvre d'Edgar P. Jacobs, née il y a plus de 80 ans avec Le Rayon U.

>> Blake et Mortimer se dérident avec Jean Van Hamme dans leur nouvel album, "Le Dernier Espadon"

franceinfo : Vous avez découvert ce récit, enfant, avec émotion, car c'est une œuvre fondatrice belge de la science-fiction. Elle est folle cette histoire, parce qu'on a l'impression que c'est Jacobs lui-même qui l'a imaginé.

Jean Van Hamme : Il se fait que Jacobs fait le genre de bande dessinée qui me convient très bien comme lecteur. N'oubliez pas, Le secret de l'espadon démarre dans le journal Tintin en 1946. Et tout à coup, nous, les gamins que nous étions, on avait l'impression qu'on nous prenait vraiment pour des lecteurs sérieux. C'était terrifiant, ces méchants jaunes qui rasent le monde entier. Mais les personnages, les bons, les gentils, Blake, Mortimer et quelques autres, ce sont des gens sérieux. On ne fait pas dans le comique. Il n'y a pas le moindre humour donc on nous prend au sérieux. Et nous étions très fiers, les gamins que nous étions à l'école primaire, quand on discutait de ce qui se passait dans le journal Tintin avec cette question récurrente : "Qu'est-ce qui va se passer la semaine prochaine ?". Et pour ça, Jacobs, c'était le maître.

Avez-vous toujours été attiré par cette envie de raconter des histoires ? Et à quel âge cela commence ?

L’envie de raconter des histoires commence avec la lecture des livres.

Jean Van Hamme

à franceinfo

Je n'ai pas connu ma mère. Je vivais seul avec mon père, qui avait une grande bibliothèque. On habitait tout près d'un bibliothécaire qui louait des livres, un franc belge par semaine, par bouquin et qui me conseillait en fonction de mon âge. Mon école secondaire était à huit kilomètres de chez moi. Pourquoi mon père m'avait il inscrit là ? Parce que c'était le seul lycée qui était mixte et il voulait que je rencontre des filles. Je tombais amoureux tout le temps, mais ça n'a jamais marché. Mais résultat, je n'avais pas de petits camarades d'école près de chez moi, donc j'étais seul. Et quand on est seul, il n'y a pas la télé et on est encore trop petits pour aller au cinéma. Alors, il y a la lecture.

La lecture m'entraînait dans des mondes extraordinaires et je mimais les aventures que je venais de lire. Je ne savais pas qu'il y avait des auteurs derrière ces histoires. Je ne savais pas encore. Pour moi, c'étaient les personnages qui avaient écrit ces histoires et donc j'ai eu le goût des histoires d'abord comme lecteur et assez rapidement, je me suis mis à écrire, vers l'âge de 11 ans, ce que je croyais être des petites nouvelles. Bien entendu, c'était très mauvais et j'ai continué à écrire des petites histoires tout en faisant mes études. J'y ai pris goût. Et puis, un beau jour, le hasard a fait que j'ai rencontré Paul Cuvelier, comme on disait à l'époque : "Je suis entré chez Tintin" tout en continuant à travailler dans des bureaux.

Votre premier succès en votre nom avec Grzegorz Rosiński, ce sera un Thorgal qui va être traduit en 14 langues et vendu dans plus de 20 pays. Comment avez-vous vécu ce succès ?

Ce qui s'est passé, c'est que j'avais rencontré un garçon, Rosiński, qui ne subissait aucune influence. Chez nous, les dessinateurs étaient influencés soit par l'école Jijé, appelons ça l'école Spirou, soit par l'école Hergé avec un dessin plus réaliste. Il y avait toujours une influence et on sentait l'influence. Là, Rosiński arrivait avec un dessin qui ne subissait aucune influence de la bande dessinée franco-belge ou belgo-française. Et donc il y avait une force véritable dans son dessin. Quand vous avez un dessin qui permet d'atteindre l'émotion, alors il faut foncer dedans. Il faut servir cette capacité d'émotion par un scénario adapté. C'est donc ce mélange des deux et cette compréhension de ces deux parties qui donnent le succès.

Ces personnages que vous avez créés, une majorité a été effectivement adoptée par la critique et le public. On a même l'impression que Largo Winch fait partie de notre famille. Que vous a apporté le fait de pouvoir créer vos personnages ?

Ce qu'Hergé a assez vite compris, c'est qu'il vous faut aussi des partenaires autour d’un personnage. Vous les mettez en contradiction avec votre personnage principal. Le choix du personnage est la clé. Le début du succès.

Jean Van Hamme

à franceinfo

Je m'amuse énormément. Vous êtes Dieu pour vos personnages. C'est très gai d'être Dieu. Vous devez réfléchir à ce personnage parce que vous savez que vous allez devoir le faire vivre, le faire réagir. 

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