"J'avais tellement de choses à dire que la quantité de ce que je pouvais dire en groupe ne me suffisait pas" : Sinik se raconte dans l’autobiographie "Une époque formidable"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Vendredi 3 mai 2024 : le rappeur et tatoueur, Sinik. Il vient de publier un livre autobiographique, "Une époque formidable" chez Faces cachées Éditions.
Article rédigé par Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 18 min
Le rappeur et tatoueur, Sinik, le 3 mai 2024 sur franceinfo. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Sinik est l'un des rappeurs les plus marquants des années 2000, découvert par le biais du groupe L'amalgame, en 1996. Son premier album solo, La main sur le cœur, a fait l'effet d'une bombe. Pourtant sans notoriété, il s'est classé numéro 1 des ventes dès sa sortie. Il a vendu 1 400 000 exemplaires de ses albums en solo et il a atteint finalement le toit du monde en gardant son sang-froid dans sa zone dite "interdite".

Aujourd'hui, il publie Une époque formidable chez Faces cachées Éditions. Évidemment, pour les fans, on pense à sa chanson, celle qu'il a sortie et qui racontait son enfance aux Ulis. Une chanson et donc un livre basé et construit sur l'espoir de s'en sortir malgré les embûches de la vie.

franceinfo : Ce livre autobiographique est le résumé de votre parcours et de ce qui a fait de vous l'artiste et l'homme que vous êtes devenu ?

Sinik : C'est exactement ça. Je l'ai fait musicalement pendant beaucoup d'années et là, ce qui me faisait vraiment aimer ce projet, c'était que c'était une autre manière de se raconter. J'avais aussi plus de place pour détailler certaines choses. Les gens qui m'ont écouté musicalement vont mieux comprendre, peut-être certains morceaux, certaines punchlines, etc. Voilà, c'était une manière de repartir de zéro en racontant sa vie, chose que j'ai toujours faite, au final.

Vous nous donnez des clés de qui vous êtes. Vous êtes né Thomas Gérard Idir, à Paris, d'une mère française, d'un père algérien kabyle. Votre mère faisait 1,58 m, mais avait un amour des autres décuplé. Que ce soit en prison où vous avez été à plusieurs reprises, que ce soit en bas de l'échelle sociale ou que ce soit en tant que star, elle vous a toujours aimé de la même façon. Qu'est-ce que cette maman vous a le plus donné ?

Tout. De la motivation, de l'amour, des encouragements. Je pense que c'est propre à presque toutes les mamans, toutes les mamans au sens très noble du terme. Pour moi, c'était un repère. Je ne me confie pas énormément parce que, dans ma génération, nous les mecs, on n'est pas trop du genre à appeler des potes pour se confier, etc. Je n'avais pas beaucoup d'écoute et au final, je me rends compte que je revenais toujours vers ma mère. Je parlais pendant des heures avec elle au téléphone.

"Ma mère était plus qu'une maman. C'était une épaule, une écoute."

Sinik

à franceinfo

Sa disparition est un traumatisme, vous le dites.

Oui. Ça a été très dur. J'ai encore aujourd'hui un peu de mal à réaliser.

Vous avouez que vous avez dérapé très vite vers la délinquance. Vous dites que c'était vraiment la solution de facilité. Il y a un épisode que vous racontez où effectivement un braquage s'est annulé à la dernière seconde. Ce jour-là, vous avez pris conscience que vous étiez passé à côté de l'irréparable.

Oui. On a essayé une première fois. Ça n'a pas marché parce que le gérant de la station-service qu'on voulait braquer n'était pas là. On a voulu le refaire une deuxième fois. Il y a eu ce problème de pile, donc on s'est dit : "Bon, on ne va pas le retenter une troisième fois". Et entre-temps, je suis allée en prison pour une toute petite peine. Ça a été un déclic parce que j'ai perçu ça comme un signe. Je me suis dit : tu aurais dû être là pour beaucoup plus longtemps que tu ne l'es. Il faut arrêter, c'est un signe. On m'a laissé une chance et à partir de maintenant, il faut que ça change.

"J'en avais marre de cette vie dans la délinquance parce que c'est une vie épuisante, stressante. Vous n'êtes pas bien tous les jours. Voilà, ce braquage raté a été un déclic pour arrêter."

Sinik

à franceinfo

Le point de départ, c'est L'Amalgame avec cet effet de groupe mais nécessaire. Vous aviez besoin, pas de vous cacher, mais on comprend que vous avez eu besoin des autres pour naître.

Au départ, il y a un côté rassurant de l'effet de groupe. On est plusieurs, on travaille ensemble, il y a un truc collectif, une espèce d'osmose entre tout le monde. C'est beaucoup plus simple pour commencer. Après, j'avais tellement de choses à dire que la quantité de ce que je pouvais dire en groupe ne me suffisait pas. C'est pour ça que je suis parti très rapidement en solo.

En 2022, vous avez annoncé que vous vouliez prendre votre retraite. La musique passe aujourd'hui au second plan et pourtant, on a l'impression que vous ne pourrez jamais vivre sans elle. D'ailleurs, là, vous remontez sur scène.

Ça, c'est le vrai plaisir. C'est le vrai kif. Quand j'annonce la fin de ma carrière, pour moi, c'est faire des albums. J'ai fait le tour, mais je reste un passionné de musique et faire de la scène, c'est l'essence même de la vie d'artiste. Et jouer Une époque formidable, d'autres sons qui ont marqué une génération, c'est toujours un immense plaisir. C'est quelque chose. Revoir ce public qui m'a toujours suivi, sincèrement, c'est un kif. On a tous grandi ensemble, on se retrouve sur scène et on dirait une espèce de bande de potes qui ne s'est pas vue depuis un petit moment. Il y a ce côté vraiment très familial que j'aime beaucoup.

Le hip-hop au tout début était un art pluridisciplinaire, mélangeait le graphisme, le son, la danse, etc. Le graphisme fait partie de votre quotidien aujourd'hui puisque vous faites des tatouages. Pareil, l'amour du dessin faisait partie de vous ?

Gamin, c'était une de mes premières passions. Je passais des heures à dessiner. Et aujourd'hui, je me retrouve un peu dans cette fibre artistique. J'ai ouvert des salons. Pendant des années je les ai gérés et j'ai appris à tatouer par la suite parce que je voulais retrouver un peu ce goût du dessin que j'ai toujours aimé et que je n'ai jamais vraiment lâché.

Sinik sera en concert le 29 juin à Nice, le 3 août à La-Seyne-sur-Mer et le 16 août à Toulouse.

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