Guillaume Musso : "Je suis à la fois celui qui écrit et celui qui écoute"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Mercredi 20 mars 2024 : L’écrivain, Guillaume Musso. Il publie son 21e roman chez Calmann-Lévy : "Quelqu'un d'autre".
Article rédigé par Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
L'écrivain Guillaume Musso, le 28 février, à Nice. (FRANTZ BOUTON / MAXPPP)

Depuis 20 ans, Guillaume Musso est dans les bagages de bon nombre de lecteurs. Il est l'auteur le plus lu en France. La rencontre avec le public a eu lieu en 2004 avec son premier roman Et après... Depuis, il a vendu 34 millions d'exemplaires de ses 20 livres traduits dans 47 langues et distribués dans le monde entier. Quelqu'un d'autre sorti aux éditions Calmann-Lévy est le 21e roman dans lequel Guillaume Musso pousse encore le bouchon du suspense un peu plus loin.

franceinfo : Vous vous amusez à dépasser les bornes. Y prenez-vous du plaisir ?

Guillaume Musso : Oui. J'y prends un plaisir énorme. J'ai toujours considéré que la littérature était un jeu qui se jouait à deux. Je me dédouble un peu. Je suis à la fois celui qui écrit et celui qui écoute l'histoire qu'on est en train de lui raconter. Dans ce livre, on a le meurtre d'une héritière italienne retrouvée morte sur son bateau. À partir de là, on a quatre personnes qui livrent leur version de l'histoire. On a son mari qui est arrêté, on a la jeune maîtresse de son mari, on a la flic cannoise qui mène l'enquête et on a la victime, Oriana, qui nous raconte les mois qui ont précédé sa mort.

"Dans ‘Quelqu'un d'autre’, le jeu avec le lecteur est simple. Personne ne ment, mais tout le monde ne s'accorde pas sur la vérité. Tout ce que vous lisez, tout ce que disent les personnages, c'est vrai."

Guillaume Musso

à franceinfo

Il y a un autre paramètre que vous injectez dans cette histoire, c'est le titre, Quelqu'un d'autre, qui signifie énormément de choses.

Oui. J'avais deux idées en tête. Il y a d'abord lorsqu'on rêve de devenir quelqu'un d'autre, lorsqu’on a l'impression finalement de ne pas avoir la vie qu'on mérite. Et il y a aussi le quelqu'un d'autre, vous savez, au sein du couple, quand ça va mal, il y a toujours un moment où on demande à l'autre : "Mais est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre ?" Et je suis parti de ce paradoxe qui est, dans certains couples, le regard extérieur. On a l'impression qu'ils sont flamboyants, amoureux et dans l'intimité, ce n'est absolument pas ça. Or, l'intimité n'est connue finalement que par les deux personnages du couple. C'est cet écart que j'ai voulu explorer ici.

Il y a un peu de vous dans vos personnages, c'est quelque chose que vous avez toujours fait, alors quelle est la part justement de Guillaume Musso dans ces personnages ?

On prend des choses de soi et on les diffracte un petit peu comme de la lumière à travers les différents personnages. Donc, ce n'est pas un miroir, mais ce sont des préoccupations, des peurs que vous avez et qui, à un moment, s'incarnent à travers des personnages. Mais tout ça ne se fait pas de façon consciente.

"Je me vois comme un metteur en scène qui met en scène des personnages. Il arrive même que je fasse les voix comme pour les scènes de garde à vue".

Guillaume Musso

à franceinfo

Une des gardes à vue est un face-à-face qui crée même des tremblements, il y a des tensions qui sont palpables.

On a cette jeune flic cannoise qui interroge un homme. Elle pense qu'il a tué sa femme, mais elle se sent aussi un petit peu attirée par son mystère. Et ça, ce face-à-face, je le jouais au moment où j'étais en train d'écrire. Je faisais les deux voix pour que les dialogues coulent, pour qu'ils soient percutants. Et c'est assez agréable et drôle à faire.

La promesse était que jusqu'à la dernière ligne, on allait justement en apprendre et découvrir. Et c'est réellement ce qui se passe dans cet ouvrage. Est-ce que jusqu'à la dernière ligne, vous, vous espériez aussi que l'histoire continue ?

Oui. Alors ça faisait 20 ans que je cherchais une histoire dont le dénouement arriverait à la dernière ligne, voire le dernier mot. Pour tout vous dire, j'ai écrit le roman puis il restait les trois dernières pages et je me suis dit : "Laisse-toi te surprendre toi-même. Et si, il s'était passé quelque chose que toi-même, tu ne saches pas." Et lors d'un week-end, je me suis enfermé et j'ai écrit ces trois dernières pages un peu à la manière, non pas d'écriture automatique, mais en étant beaucoup moins en contrôle pour essayer de percer moi-même la vérité de ces personnages.

C'est ce qu'on découvre d'ailleurs dans cet ouvrage, vous êtes dans le self-control, mais complètement décontrôlé.

Il y a un savoir-faire qui est dû aux romans précédents, mais il y a aussi l'idée de continuer à s'amuser soi-même et pour cela, il faut continuer à se surprendre, à prendre davantage de risques et de voir finalement où tout ça va nous mener. En tout cas, avoir toujours le matin, quand vous ouvrez votre ordinateur, d'être un peu soi-même excité en se disant : "Ah, voilà, qu'est-ce qui va m'arriver aujourd'hui à travers la vie que je vis par procuration de mes personnages ?"

On sait à quel point on lit de moins en moins et pourtant, vous contribuez à vendre du livre et à faire comprendre que c'est important, ça vous touche ?

Je suis un grand ambassadeur, en tant que fils de bibliothécaire et en tant qu'ancien enseignant, de la valeur ajoutée de la lecture qui n'est remplaçable par rien d'autre. C'est une grande tristesse de voir que beaucoup de personnes lisent de moins en moins. Ça a tellement changé ma vie, à partir du moment où je me suis rendu compte que quand j'avais un livre dans ma poche, je n'étais jamais seul.

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