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De Sautet à Doillon en passant par Tavernier : le compositeur Philippe Sarde fête ses 50 ans de carrière

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, le compositeur de musique de film Philippe Sarde.

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Le compositeur Philippe Sarde à Paris (France) le 26 juin 2020 (JOEL SAGET / AFP)

Compositeur de musique de film, mais avant tout scénariste musical, Philippe Sarde raconte à travers ses partitions et phrases musicales une histoire parallèle et complémentaire à celle d'un metteur en scène. Claude Sautet a été son déclencheur, celui qui lui a fait oublier son envie d'être réalisateur. Roman Polanski avec le film Tess (1979), le fera connaître à l'étranger et Bertrand Tavernier le considérait comme son compagnon de mise en scène.

Du 23 au 27 juin prochain, le Festival de Cinéma et Musique de film de La Baule lui rendra hommage à l'occasion de ses 50 ans de carrière. Philippe Sarde y donnera aussi un concert exceptionnel le 26.

franceinfo : Comment raconteriez-vous vos 50 ans de carrière ?

Philippe Sarde : Je me dis que finalement, s'est passé très vite et j'ai eu la chance, pendant ces 50 ans, de rencontrer les plus grands cinéastes, ils m'ont fait confiance. Je suis très, très, très attaché à ce que la musique apporte un plus au film plutôt que de doubler ce qu'on voit.

Vous êtes né le jour de la Fête de la musique. Votre mère était chanteuse à l'Opéra de Paris. Vous avez commencé le Conservatoire à cinq ans. Entre vous et la musique ça a été un coup de foudre ?

Oui. Je suis né dans un milieu dans lequel la musique était une chose naturelle. Pourquoi suis-je allé vers le cinéma ? C'est que j'ai essayé de trouver quelque chose de parallèle, pouvant fonctionner avec la musique. Et j'ai eu la chance de travailler avec des professeurs qui avaient, finalement, le même sentiment que moi et m'ont laissé aller vers ma passion, c'est-à-dire le cinéma.

Il y a eu un coup de téléphone, celui de la production de Claude Sautet qui souhaite vous rencontrer alors qu'il préparait Les choses de la vie (1970). Ça change votre vie ?

Sur le moment, ça ne change pas grand-chose car je ne savais pas qui était Claude Sautet ! J'étais très jeune, 20 ans.

Claude Sautet était un homme d'exception.

Philippe Sarde

à franceinfo

J'ai été chercher, farfouiller dans ce petit synopsis qui résumait le scénario. Ça m'a donné l'idée de me mettre sur un coin de table et d'écrire en me disant qu'au moins j'aurais quelque chose à faire entendre à Claude Sautet.

Vous êtes un homme très fidèle en amitié, je pense à André Téchiné, Jacques Doillon, Pierre Granier-Deferre ou encore Bertrand Tavernier dont je voudrais qu'on en parle. Vous avez réalisé un coup de maître sur le film Coup de torchon (1981) avec cette fin musicale. Comment a-t-il pris ce coup de génie ?

On avait confiance l'un en l'autre. Quand j'ai vu le film, je lui ai dit , écoute Bertrand, la fin ne va pas du tout. Je crois qu'il faut que tu l'oublies. Laisse-moi t'écrire six minutes de musique et sur celle-ci, tu vas remonter des images que tu as déjà tournées dans le film et là tu auras la vraie fin de Coup de torchon. Alors, il a écouté la musique que j'ai enregistrée à Londres et a remonté la fin sur la musique.

Vous êtes toujours à la recherche de nouvelles sonorités. Vous ne vous êtes jamais contenté de ce que vous pensiez maîtriser ou connaître. Vous avez eu besoin aussi de mélanger la musique classique à la musique contemporaine. Vous avez énormément joué dans la musique du film La guerre du feu (1981). C'est une de vos plus grande fierté ?

J'adore les mélanges. C'est une plus grande fierté dans la mesure où il a fallu que je me batte avec tout le monde. Aussi bien avec la production qui disait : "Ce mec est fou" et moi qui savais où il fallait aller pour que le film de Jean-Jacques Annaud soit rempli, exprime ce qu'il ne pouvait pas exprimer puisqu'il était muet.

Dans le film muet 'La guerre du feu', il fallait que j'exprime avec la musique tous les sentiments des personnages.

Philippe Sarde

à franceinfo

J'ai été très loin. Et c'est vrai que les Français et les Américains qui produisaient la musique ont eu très peur, mais ils se sont dit : "Qu'est-ce qui vaut mieux ? Arrêter ce fou et on perd tout ou le laisser continuer et peut-être qu'on a une chance de gagner ?" Et ils ont choisi la deuxième solution. Ils m'ont laissé.

Vous considérez-vous comme fou par moments ?

Non, je ne suis pas fou du tout. J'essaie de me surprendre. De me dire, tiens, j'y suis quand même arrivé.

Quel regard avez-vous sur ces 50 ans de carrière ?

J'ai essayé de passer des Choses de la vie, par exemple, à Max et les ferrailleurs de Claude Sautet (1971), qui étaient des films totalement différents. Quand je suis passé de Max et les ferrailleurs à La grande bouffe de Marco Ferreri (1973), c'était encore une autre aventure. Je passais d'un film de Tavernier Le juge et l'assassin (1976) à L'Ours (1988) ou encore à La guerre du feu.

Jacques Doillon n'aimait pas la musique. Je crois qu'il l'a aimée avec moi parce que j'ai essayé de faire la musique qu'il avait en lui, la musique de l'homme.

Philippe Sarde

à franceinfo

Comment vous définissez-vous ?

Un homme qui a essayé d'aller au bout de lui-même. J'espère y être arrivé en partie.

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