Dans "Foule sentimentale", Alain Souchon fait le tri entre "les choses primordiales et le clinquant"
Toute cette semaine, Alain Souchon est l’invité exceptionnel du monde d’Elodie. Un tête-à-tête en cinq chansons qui ont marqué sa vie professionnelle comme personnelle. Aujourd’hui, "Foule sentimentale".
Alain Souchon est l'une des figures majeures de la chanson française depuis les années 70. Sa carrière est notamment marquée par sa collaboration, sa très forte amitié avec Laurent Voulzy depuis 1974. On accueille, avec plaisir, Alain Souchon à franceinfo pour passer la semaine ensemble et revenir sur cinq de ses titres incontournables comme une occasion de relire un peu son parcours. Il a sorti, il a quelques semaines, un best of : (Nouvelle) collection, comprenant trois CD avec 57 titres très connus ou un peu moins et aujourd’hui, on parle de la chanson Foule sentimentale.
franceinfo : Au fil de votre carrière, vous êtes devenu culte. Ça vous touche ?
Alain Souchon : Yves Simon disait que "les chansons, c'est un calendrier affectif", c'est-à-dire qu'une chanson que vous entendez et qui a été chantée il y a 22 ans, vous vous dîtes : "Ah oui, c'est sur cette chanson que j'ai rencontré untel ou untelle". Alors, ça fait de l'effet, c'est un calendrier affectif.
Vous avez toujours eu la musique dans la peau ?
Oh non ! Je suis un amateur, en musique. Amateur dans le bon sens du terme. J'aime et en même temps, je suis pas très professionnel. Je ne sais pas lire les répartitions par exemple.
Ça vous manque ?
Oui, cela me manque beaucoup de savoir lire une partition et de la jouer au piano. Je trouve ça extraordinaire, les gens qui prennent une partition de Chopin, puis en lisant, leurs doigts partent sur le clavier. Ça me fait envie !
Vous êtes chanteur, auteur, compositeur, mais aussi acteur. Vous allez faire votre première apparition au cinéma aux côtés de Catherine Deneuve et Serge Gainsbourg pour Claude Berri dans Je vous aime (1980). Il y a eu aussi Tout feu, tout flamme de Jean-Paul Rappeneau (1981) et L'Eté meurtrier de Jean Becker en 1983. J'ai l'impression que faire carrière dans le septième art n'est pas quelque chose qui vous a convaincu.
Non, je ne me suis pas trouvé très fort, mais c'était agréable de rencontrer Pierre Granier-Deferre ou encore Jacques Doillon puis de faire un film avec Jane Birkin dans la montagne (Comédie! 1987). On était isolés tous les trois, avec les techniciens, on n'a vu personne pendant deux mois. C'était intéressant, tout ça, mais en même temps, je voyais Michel Piccoli qui était mon idole absolue et puis les autres, et je me disais que je ne serai jamais à leur hauteur donc, j'ai arrêté.
"Quand j'ai fait du cinéma, c'était vraiment une petite parenthèse enchantée."
Alain Souchonà franceinfo
Avez-vous douté quand on vous l'a proposé ?
J'étais comme une midinette ! On m'a demandé : "Vous ne voulez pas faire du cinéma ?", j'ai dit : Oh si ! Mais après c'est un métier. Et puis, j'avais mon métier d'auteur-compositeur qui prend beaucoup de temps et qui prend la tête et je n'avais pas envie de mélanger les deux. Ça m'allait mieux d'écrire mes chansons dans ma chambre et de les chanter, plutôt que d'être acteur.
En 1985, sort l'album, C'est comme vous voulez. C'est un changement radical, avec aussi la fameuse Ballade de Jim, une chanson qui raconte l'histoire de Jimmy, qui se retrouve perdu, pleure, se saoule et tente de se suicider. Vous vouliez rappeler l'importance de garder confiance en soi ?
C'est marrant parce que cette chanson, on a eu énormément de mal à la faire. Laurent changeait la musique constamment. Il arrivait le matin et me disait : "Tu sais, j'ai changé", alors, je rétorquais : Alors, il faut changer les paroles ! "Oh oui!" Ça a duré peut-être pendant 15 jours ! Il changeait tout le temps, ça n'allait jamais, mes paroles étaient cucul puis, au bout d'un moment, ça a pris forme. Et puis, il y a cette histoire de road-movie, celle de ce garçon qui part, qui est malheureux, qui se saoule en conduisant sa voiture et qui s'envole. C'était surtout le désespoir de l'amour qui peut amener à faire des folies, l'amour ça rend dingo.
En 1988, sort l'album Ultra moderne Solitude avec le titre : Quand j'serai K.O.
C'est un moment où ça a un petit peu basculé dans ma tête, mais je ne sais pas l'expliquer. C'était un moment agréable, un changement.
Vous avez toujours aimé les changements, repousser un peu les limites.
Un petit peu, mais on est tous un peu pareils. On essaie d'aller un peu plus loin. Les poètes font ça, ils vont loin jusqu'à ce qu'on comprenne à peine ce qu'ils racontent. Dans la chanson, ce n'est pas la même chose parce qu'il faut que tout le monde comprenne assez rapidement. C'est un exercice de style qui est aussi sympa, celui de suggérer, que ce soit un peu élégant et en même temps très compréhensible.
Quand on évoque Alain Souchon, on pense immédiatement à Foule sentimentale.
Mes chansons sont des photos. Je regarde le monde et puis je décris. Et quand on regarde la folie d'acheter, de croire que le bonheur réside dans le fait d'avoir plein de choses comme de belles bagnoles et bien, si votre fiancée s'en va, vous pouvez toujours avoir trois Ferrari, vous êtes foutu.
"Il y a des choses primordiales et tout le clinquant s'évanouit vite comme de la poussière qui tombe. 'Foule sentimentale' dit un peu ça."
Alain Souchonà franceinfo
C'est quoi votre essentiel alors ?
De ne pas mourir tout de suite et puis que ma femme ne s'en aille pas avec Laurent Voulzy, que mes petits-enfants fassent des belles études, des choses comme ça.
Alain Souchon est actuellement en tournée, il sera par exemple le 3 janvier 2022 à Montbéliard, le 4 Nantes. Toujours en janvier 2022, il passera par Marseille, Dijon, Amnéville, Paris, etc…
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