Danièle Thompson, réalisatrice de la série "Bardot" : "Elle a créé l'image d'une femme qui ne se laisse pas faire"
Depuis sa plus tendre enfance, le cinéma fait partie intégrante de la vie de Danièle Thompson. Une passion transmise par ses parents. Évidemment, elle a effectué ses premiers pas en tant que scénariste au côté de son père, Gérard Oury, avec le film La Grande Vadrouille en 1966. Puis ont suivi d'énormes succès comme La Folie des grandeurs (1971), Les Aventures de Rabbi Jacob (1973), La Boum en 1980 et bien d'autres. Mais elle est avant tout une réalisatrice, une carrière qui débute avec son premier film : La Bûche est sorti en 1999.
Elle coréalise avec son fils Christopher la mini-série Bardot dont les deux premiers épisodes sont diffusés sur France 2 le 8 mai.
franceinfo : C'est vraiment un pari audacieux. Quand on plonge dans les coupures de journaux, on se rend compte à quel point la vie de Brigitte Bardot a été complètement réinventée, réadaptée, imaginée. Est-ce que ça vous a fait peur dans un premier temps de dire oui ?
Danièle Thompson : Ce n'est pas une question de peur. C'était vraiment une question d'intérêt. On me dit maintenant : "Dis donc, c'est quand même risqué de faire ça". On n'y a pas du tout pensé avec Christopher Thompson, mon fils, coscénariste et metteur en scène de la série. On a vraiment entièrement pensé à l'aspect artistique de cette histoire-là. On s'est demandé si on allait découvrir des choses passionnantes qui allaient nous donner envie de les raconter.
Quand on décide de raconter la vie de Brigitte Bardot, on pense évidemment au regard qu'elle va porter, elle, de fait, sur cette série. Est-ce que vous vous êtes souciés de ça ? Est-ce que vous avez appréhendé son regard ?
Je peux comprendre que c'est bizarre, mais nous n'avons pas eu à lui demander d'autorisation parce qu'elle est un personnage public et qu'on peut faire ce qu'on veut et qu'en aucun cas on a l'intention de lui faire du mal. Mais si je me mets à sa place, je peux comprendre que ce n'est pas évident.
"Je me demande si Brigitte Bardot aura la curiosité de regarder ce soir cette série ou si c'est quelque chose qui peut être perturbant. Et je le comprendrai aussi."
Danièle Thompsonà franceinfo
Brigitte Bardot très tôt a eu du chien, du charisme. Elle a crevé l'écran. Elle avait ce truc en plus. Vous qui êtes souvent derrière la caméra, c'est quoi ce truc en plus ?
Ce truc en plus, c'est un mélange entre justement cette beauté incroyable, parce qu'il y a des millions de photos de cette jeune femme qui sont plus gracieuses et plus délicieuses les unes que les autres, et une nature qui est à la fois dans la spontanéité, dans le charme, dans l'audace et dans la révolte.
On se rend compte à quel point elle a fait évoluer les mentalités, le regard sur les femmes aussi.
Elle a quand même tout à coup créé l'image d'une femme qui ne se laisse pas faire, qui décide de comment elle va s'habiller, comment elle va marcher pieds nus, comment elle ne va pas se coiffer, comment elle va finalement avoir des aventures avec des hommes avec lesquels elle a envie d'en avoir. Tout ça dans les années 50, c'est scandaleux et d'ailleurs, elle est adulée, traînée dans la boue, insultée. Tout à coup, il y a un mélange de réactions, de jalousie des femmes devant cette créature qui réveille chez tous les hommes des regards qui les exaspèrent. Et puis des milliers de jeunes filles qui rêvent de lui ressembler et d'avoir justement le pouvoir qu'elle a, de liberté et de séduction. Elle donne cette impression qu'on peut être comme elle, qu’on peut peut-être aussi vivre comme elle et on est bien avant Mai 68.
Vous vous êtes revue au même âge en vous disant : "Olala, ce qu'elle ose faire, je n'aurais jamais osé le faire" ?
Oui, je me suis revue au même âge parce que je suis plus jeune, mais pas tant que ça et que moi, j'ai vécu effectivement enfant et adolescente les années 50. En effet, c'était une éducation tout de même, ça fait sourire aujourd'hui, mais on n'avait pas le droit de porter des pantalons à l'école et au lycée, c’étaient socquettes et jupes. On portait des blouses. Et moi, j'avais des parents qui étaient comédiens et qui étaient bien entendu pas du tout dans une éducation bourgeoise. Mais quand même, j'ai un souvenir de ne pas avoir été lancé comme ça dans une vie de liberté, comme plus tard je le raconterai dans La Boum où dès l'âge de 11, 12 ans, à la génération de ma fille, on a commencé à partir à des boums avec des copines. Tout ça, c'était hors de question quand moi, j'avais 13 ans.
Quand vous travaillez aujourd'hui avec votre fils, est-ce que votre père est toujours un peu derrière et au-dessus de votre épaule ?
"J'ai adoré travailler avec mon père, Gérard Oury. J'ai un plaisir fou à travailler avec mon fils Christopher."
Danièle Thompsonà franceinfo
Mon père est toujours derrière. Ça fait quand même 20 ans qu'on travaille ensemble avec Christopher. On s'entend très bien et on a vraiment les mêmes réflexes, des tas d'idées très différentes l'un de l'autre, ce qui est très enrichissant. J'avais ça avec mon père aussi donc, c'est vraiment une suite de miracles dans ma vie, ça c'est certain.
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