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Le décryptage éco. Une ex-commissaire européenne rattrapée par sa société offshore

C’est une nouvelle fuite dans l’affaire des paradis fiscaux. Jeudi 22 septembre on a appris que l’ancienne commissaire européenne à la concurrence Neelie Kroes, était administratrice d’une société offshore située au Bahamas.

Article rédigé par franceinfo, Vincent Giret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Neelie Kroes, ancienne commissaire européenne à la conccurence en 2014. (AFP)

C’est un peu gênant ( et c'est un euphémisme) pour une institution qui n’avait franchement pas besoin de ça. D’abord, rappelons le contexte, vous vous souvenez des "Panama Papers" c’était il y a cinq mois, plus de deux journaux, dont le journal Le Monde, associés au sein d’un consortium international d’investigation avaient bénéficié d’une énorme fuite avec des dizaines de milliers de documents qui leur avaient permis de révéler et de démonter le fonctionnement d’un paradis fiscal, en l’occurrence celui du Panama.

Et bien cette fois, c’est la même chose, à une échelle toutefois plus petite et elle concerne cette fois les Bahamas. Cette fois-ci, c’est un quotidien allemand qui a bénéficié d’une source qui bien sûr va rester confidentielle. Et cette source a livré un certain nombre de fichiers qui portent sur plus de 150 000 structures offshore enregistrées au Bahamas au cours des 50 ans dernières années. Et ces documents permettent de dresser une sorte de registre du commerce de ce paradis fiscal et là surprise figure le nom Neelie Kroes, une femme qui a notamment occupé un poste de pouvoir extrêmement puissant, pendant près de six ans, de 2004 à 2010, celui de commissaire européenne à la concurrence. 

 À quoi servait cette structure offshore créée au Bahamas ?

D’abord Neelie Kroes a été co-administratrice de cette société offshore entre 2000 et 2009, c’est-à-dire pendant une partie de son mandat de commissaire européenne. Neelie Kroes partageait la direction de cette société avec un homme d’affaires jordanien, très proche du prince héritier des Emirats arabes unis. L’objectif était, semble-t-il, de réaliser une énorme opération financière, et de lever des fonds pour acquérir une partie des actifs d’une grande société américaine de l’énergie, Enron, qui avait fait faillite à l’issue d’une série de fraudes et d’un scandale retentissant. Cela ne s’est pas fait. Et l’associé de Neelie Kroes, qui lui est plus bavard, a affirmé que cette société avait ensuite été réactivée pour mener des opérations cette fois bien réelles à partir de 2005, une date à laquelle Neeli Kroes est toujours commissaire européenne 

Que dit l’ex-commissaire ?

Neelie Kros est manifestement assez embarrassée. Elle a d’abord nié l’existence de cette société puis s’est exprimée à travers ses avocats : oui, cette société a bien existé, mais elle ne fut jamais opérationnelle et d’ailleurs Nellie Kroes en a démissionné en 2009. Voilà la version officielle. Tout cela n’est pas forcément illégal à ce stade, mais c'est déjà totalement contraire aux règles déontologiques de la Commission européenne qui interdit aux commissaires d’exercer toute autre activité professionnelle, rémunérée ou non, et les oblige à déclarer toutes fonctions exercées au cours de dix années précédant leur entrée en fonction. L’ex-Commissaire a en tout cas écrit au président actuel de la Commission, Jean-Claude Juncker en lui disant qu’elle assumait tout. Simplement, aucune sanction n’est aujourd’hui prévue en cas de manquement aux règles déontologiques de la Commission. Il faut espérer toutefois que Bruxelles ouvre une enquête et fasse toute la lumière indispensable sur cette affaire. 

Et s’il fallait conclure sur une touche plus optimiste, ces enquêtes et ces révélations successives sur les réalités des paradis fiscaux montrent que plus personne n’est désormais à l’abri. Les médias et ces nouvelles méthodes d’investigation sont en train de faire voler en éclat les petits et gros secrets enfermés dans les paradis fiscaux. Et ça c’est une sacrée une bonne nouvelle.

 


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